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Retraite : l'OCDE valide que les Français partent trop tôt

Alors que le gouvernement devrait annoncer prochainement les orientations de la réforme des retraites et que le pays se prépare à un mouvement social de contestation, l'OCDE vient de publier un rapport plein d'enseignements pour la France (Panorama des pensions 2019). Ce rapport somme sur 200 pages des statistiques sur les systèmes de retraite dans les pays de l'OCDE. La France y apparaît dans une situation singulière avec un âge de départ à la retraite plus faible, une durée passée à la retraite plus longue grâce à une espérance de vie élevée. Un poids des cotisations pour financer le système de retraite parmi les plus hauts. Et au total une dépense de systèmes de retraite obligatoire rapportée au PIB de 13,9%, en 2e place derrière l'Italie.

Age de la retraite

L'âge de la retraite se situe en France juste dans la moyenne de l'OCDE (63,5 ans) et loin derrière plusieurs pays européens. Malgré les réformes en cours (augmentation de la durée de cotisation requise jusqu'à la mise en place d'une éventuelle réforme), l'âge de départ (65 ans) restera en dessous de ce qui est prévu dans de nombreux autres pays.

Certes l'OCDE montre que le système français a jusqu'à présent été très performant pour les retraités : taux de pauvreté parmi les plus faibles pour les retraités par rapport aux autres pays de l'OCDE, taux de remplacement brut moyen relativement élevé, revenu disponible moyen élevé rapporté au revenu de l'ensemble de la population.

Taux de cotisation

Mais cela au prix d'un taux de contribution qui est aujourd'hui parmi les plus hauts, avec un taux de cotisation en % du salaire moyen de 28%.

Nous sommes toujours le pays dont l'âge de sortie de la vie active est le plus bas (avec le Luxembourg) : 60,8 ans.  

On peut certes expliquer ce chiffre par le poids du chômage des seniors mais comme l'explique Hervé Boulhol, économiste à l'OCDE, cela s'explique aussi par le poids des départs à la retraite anticipés dont les carrières longues et les fameuses catégories actives.

Temps passé à la retraite

Cette caractéristique place la France parmi les pays où la durée passée à la retraite est la plus longue.

Durée passée à la retraite et rendement des régimes de retraite en points

Dans les régimes en points, comme les retraites complémentaires, ou le futur régime universel de retraite présenté par M. Delevoye, le "rendement du régime" représente la durée de pension au bout de laquelle les cotisations sont "remboursées". Pour les retraites complémentaires, le cabinet Spac actuaire a calculé que le rendement net était de 5,81% en 2019 ce qui signifie que les "cotisations sont remboursées" en 17 ans de pension. Or on voit à travers les chiffres de l'OCDE que la durée de vie passée à la retraite excède largement 17 années, d'où un déficit de financement.

Contredisant ceux qui expliquent que reculer l'âge de la retraite est inutile si le chômage des seniors est élevé, l'OCDE montre  un lien entre âge d'ouverture des droits et taux d'emploi des 60-64 ans. Un argument supplémentaire qui devrait militer en faveur du relèvement de l'âge légal de départ à la retraite. 

Dernier point, la réforme Delevoye qui prévoit de calculer des points sur toute la carrière nous rapprocherait de la norme en vigueur dans les autres pays de l'OCDE. Actuellement dans le régime général (CNAV) la période de référence de calcul des droits sont les 25 meilleures années et dans la fonction publique les 6 derniers mois. L'OCDE montre que très peu de pays ne prennent pas la carrière complète comme référence de calcul des droits.

En conclusion, l'OCDE rappelle que la France figure parmi les pays qui dépense le plus en parts de PIB pour son système de retraite obligatoire (13,9% du PIB derrière l'Italie à 16,2%). C'est presque 6 points de plus que la moyenne des pays de l'OCDE et l'organisation n'anticipe pas de recul des dépenses de pensions avant 2030-2035. Une situation qui nous commande d'agir.

Conclusion

On a surtout retenu dans la presse le soutien de l'OCDE à la réforme des retraites préparée par le gouvernement. Mais ce que précise l'organisation internationale c'est bien de revoir les conditions d'âge de départ à la retraite : "Relever l'âge légal de la retraite, à terme en l’indexant sur l’espérance de vie, pourrait aussi contribuer à accélérer l'augmentation de l'âge effectif de la retraite". Au vu des pays qui nous entourent, la France ne peut pas retarder cette réforme plus longtemps.

Les emplois atypiques et la retraite

Dans son rapport, l'OCDE revient longuement sur ce qu'elle appelle les emplois atypiques, c'est-à-dire les non salariés, les emplois à temps partiel et les emplois temporaires. L'organisation souligne les difficultés pour ces catégories d'emplois de concevoir un système de retraite qui ne les pénalise pas par des contributions trop élevées et qui puissent aussi leur permettre d'avoit des ressources suffisantes une fois à la retraite. L'OCDE souligne que ces formes d'emplois sont en développement en France comme dans tous les pays industrialisés.

Pour les (non-salariés) indépendants dont on sait qu'ils se sont fortement mobilisés contre le traitement que leur réserve la réforme Delevoye, l'OCDE souligne "une harmonisation complète n'est pas aisée car il n'existe pas d'équivalent du salaire brut". L'organisation voit plusieurs raisons qui rendent une harmonisation avec les salariés très compliquée à mener : la charge financière que représentera le fait de payer à la fois une cotisation salariale et une cotisation employeur, la difficulté à valider un revenu qui peut varier en fonction du temps de travail que l'indépendant peut librement adapter, ou de la conjoncture.