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Reculer l'âge de la retraite : quelle économie ?

Le consensus concernant la problématique des retraites complémentaires du privé est qu'il faudra réaliser, d'ici 2025, 5 à 7 milliards d’économies par an. Un début de solution pour atteindre cet objectif serait de reculer l’âge du versement des retraites ARRCO/AGIRC de deux à trois ans, le recul d’un an de l’âge moyen de la retraite permettant de réaliser en théorie environ trois milliards par an d’économies sur les retraites versées. Les cotisations supplémentaires des actifs seront également perçues pendant cette année supplémentaire, correspondant à un montant théorique d’environ un milliard d’euros.

Quels déficits pour les complémentaires ?

En 2013, les déficits des deux régimes sont de 0,4 milliard d’euros pour l’ARRCO et de 1,24 milliard pour l’AGIRC. Mais ces montants cachent des déficits structurels beaucoup plus importants. Sans les revenus financiers que ces régimes tirent de leurs réserves, ces déficits auraient été respectivement de 3 et de 1,4 milliards d’euros.  Ces revenus financiers ne sont naturellement pas garantis : de 2,7 milliards d’euros en 2013, ils n’étaient que de 1,9 en 2012 et 0,4 en 2011.

Quelles réserves pour les complémentaires ?

Les régimes complémentaires avaient en partie anticipé les déficits actuels et avaient constitué des réserves assez importantes :

  • L'ARRCO : entre 63 et 45 milliards d'euros de réserve suivant qu’on inclut les fonds de roulement ou pas ;
  • L'AGIRC : entre 16 et 7 milliards d'euros de réserve suivant qu’on inclut les fonds de roulement ou pas.

Economies réalisées par un recul de l’âge moyen de départ en retraite

 

Nombre de nouveaux retraités de droit direct par an

Montant moyen de la retraite (femme et homme)

Total par an

ARRCO

573.000 retraités

3.832 d'euros

2,196 Md €

AGIRC

124.000 retraités

8.909 d'euros

1,105 Md €

Total

-

-

3,301 Md €

Source.

Pour éviter l’épuisement des capitaux et viser l’équilibre à long terme, l’âge de versement des retraites doit être reculé de 2 à 3 ans (soit 64 à 65 ans) en 10 ans, à partir de 2018, soit de 2 à 3 mois par an (l'économie de 3 milliards d'euros par année constituant un maximum théorique, un chiffre de 2 à 2,5 milliards est réaliste). Ce recul consiste en une poursuite moins rapide que l’évolution actuelle vers 62 ans qui est de 5 mois par an jusqu’en 2017. 

Agir sur l'ensemble

Aujourd'hui, le débat sur la problématique des retraites se focalise plus sur les complémentaires alors que ces dernières ont, paradoxalement, encore des réserves tandis que les régimes publics et spéciaux qui se financent directement par l’impôt sont dans une situation beaucoup plus critique. Rien ne sert de réformer les complémentaires sans repousser l’âge de départ pour la CNAV et pour les régimes de retraites du secteur public. Il pourrait donc y avoir dans le cadre de la négociation une condition suspensive qui implique que si on repousse l’âge de départ à 65 ans pour les complémentaires (qui n’ont rien d’accessoire puisqu’elles représentent un tiers des retraites du privé), cela soit également le cas pour tous les régimes de retraite.

Agir sur l’ensemble des régimes en même temps est d’autant plus important que nous avons montré dans une étude de micosimulation que, si l’on appliquait le mode de calcul du privé (CNAV + complémentaires) aux retraites de l’État, une économie de 4 milliards d’euros serait constatée tous les ans.

Une réforme aboutie doit voir la mise en place d’un système unique par points avec le même mode de calcul, les mêmes critères pour la réversion et les majorations familiales, les mêmes cotisations. Ce serait un système plus juste et bien loin de nos 37 régimes de retraites différents et des écarts colossaux qui existent entre le taux de remplacement pour la retraite d’un indépendant, d’un salarié ou d’un agent public qui peuvent varier de 38 à 80% sans que l’on comprenne toujours pourquoi, et sans corrélation avec les cotisations versées. Aujourd’hui, il n’y a ni égalité ni équité dans nos systèmes de retraites et cela commence à se voir. Si une réforme systémique n’est pas menée, le risque est double : le taux de remplacement pour les prochaines générations à la retraite sera très faible et salariés et indépendants ne voudront plus d’un régime qui les ponctionne sans leur assurer une garantie de retraire décente.