Stopper le recours aux autorisations spéciales d'absence dans la fonction publique à partir du 11 mai
Dans la fonction publique, seuls les personnels indispensables sont tenus de venir travailler physiquement. Pour les autres, le télétravail devient l'organisation du travail par défaut. Si le télétravail est « impossible », les agents sont placés en autorisation spéciale d'absence et payés à 100%. Parfois au sein des équipes les agents se relaient entre autorisation spéciale d'absence et présence physique.
Le placement en autorisation spéciale d'absence concernerait 50% dans la fonction publique d'État et entre 40 à 50% dans la fonction publique territoriale. Les très nombreux agents placés en autorisation spéciale d'absence (ASA) sont rémunérés à 100% car le chômage partiel n'existe pas pour les agents statutaires ou contractuels (seuls ceux des EPIC peuvent être concernés).
Beaucoup de syndicats de la fonction publique préfèrent d'ailleurs de loin l'autorisation spéciale d'absence au télétravail et ont – pour certains — encouragé les agents de l'État à exiger d'être placés en ASA plutôt que de télétravailler. Les mêmes syndicats auraient souhaité pouvoir activer massivement le droit de retrait dans les services publics face au Covid-19, ils ont été fermement recadrés par le ministre.
Les agents publics continuent d'accumuler des congés payés
En télétravail, en chômage partiel ou en placement en autorisation spéciale d'absence, les agents publics continuent d'accumuler des congés payés. Les agents en autorisation spéciale d'absence, ne travaillant donc pas tout en étant payés normalement ne cumulent pas de droit à RTT. Les syndicats de la fonction publique ont bien fait pression sur le gouvernement pour que tous les agents continuent à cumuler des RTT mais cela a été, à juste titre, écarté. Comme a été écartée l'idée de verser une prime à tous les agents, même ceux qui étaient en ASA…
Pour la pause obligatoire -à la demande de l'employeur- de congés et RTT, les employeurs du public peuvent imposer la prise de congés et de RTT selon les modalités suivantes : pour les agents en autorisation spéciale d'absence, l'employeur peut imposer jusqu'à 10 jours de congés payés dont 5 de manière rétroactive entre le 16 mars 2020 et le 16 avril 2020 et 5 autres jours de RTT ou de congés annuels entre le 17 avril 2020 et la fin de l'état d'urgence sanitaire.
Pour les agents en télétravail, il est possible de prélever 5 jours de RTT ou de congés annuels entre le 17 avril 2020 et la fin de l'État d'urgence. À noter, les syndicats de la fonction publique se sont fortement opposés à la possibilité pour l'employeur d'imposer la prise de congés payés.
Au niveau du temps de travail (porté à 60 heures maximum par semaine dans le privé dans la limite de 48 heures en moyenne par semaine), dans le secteur public, il existait déjà avant la crise sanitaire des dispositions permettant de dépasser les durées maximales quotidiennes de travail de 10 et 8 heures et les durées hebdomadaires maximales de 48 heures.
Les modalités dérogatoires à la réglementation du travail dans le secteur public lors de la crise sanitaire sont donc assez importantes. Sensiblement dans la même proportion que pour le Code du travail.
Il apparaît cependant que l'autorisation spéciale d'absence est très largement pratiquée parfois pour des postes pour lesquels le télétravail serait possible et, dans certains ministères, cela a très fortement ralenti nos services publics au cours de ces dernières semaines (justice, culture, finances, services déconcentrés, opérateurs comme l'ONF, etc.)
On peut donc légitimement se demander pourquoi le gouvernement n'a pas décidé de calquer les règles de l'autorisation spéciale d'absence sur le chômage partiel en la rémunérant pendant la crise sanitaire à 84% et non à 100%.
Le ministère de la Fonction publique a tenu pied à pied face aux revendications syndicales. Mais cela risque de ne pas suffire en fin de confinement.
Après le 11 mai, nombre d'agents publics continueront vraisemblablement d'être placés en autorisation spéciale d'absence. Pour que nos services publics soient au rendez-vous pour les entreprises et les ménages, la doctrine en la matière mériterait d'être claire. Une ordonnance pourrait permettre au gouvernement de se calquer sur un dispositif de type chômage partiel pour que le placement des agents en ASA après le 11 mai soit de moins en moins utilisé.