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Lutte contre l’excès de normes : Le gouvernement doit aller encore plus loin

Tous les mercredis, avant le Conseil des ministres, Le Macronomètre, l'observatoire des réformes du gouvernement, lancé par la Fondation iFRAP, attribue une note aux réformes d'Emmanuel Macron. La note de la semaine du Macronomètre est présentée dans le Figaro. Cette semaine : 7/10 sur la production de circulaires.

Emmanuel Macron s’était prononcé pendant la campagne présidentielle pour une réduction du nombre de nouvelles règles édictées. La section VI de la circulaire du Premier ministre du 5 juin 2019 relative à la transformation des administrations centrales et aux nouvelles méthodes de travail, qui concerne l’encadrement et la révision de l’usage des circulaires, répond en partie à cet objectif. Cette mesure vise à compléter l’arsenal de lutte contre l’inflation normative, conjointement à la publication de la deuxième édition du Tableau de bord de l’activité normative sur Légifrance. Nous avions déjà pointé du doigt dans un précédent « Macronomètre » en novembre, les insuffisances de la stratégie gouvernementale en la matière. L’arsenal du gouvernement se complète donc aujourd’hui d’un dispositif de « rationalisation » et de « simplification » de la production des circulaires.

Les dernières données disponibles publiées en mai mettent en avant un gros effort de restriction du stock de circulaires. La circulaire s’en fait l’écho « l’opération décidée le 1er février 2018 de mise à jour de la base des circulaires (…) consultables (…) a été un grand succès, conduisant au retrait de 65% du stock de circulaires. » Un effort important puisque le stock « en vigueur » a été réduit de 27.853 à 10.150 entre le 1er janvier 2018 et le 1er janvier 2019. C’est assez spectaculaire.

Un flux impressionnant de nouvelles circulaires chaque année

Pourtant, comme le relève également la circulaire du Premier ministre, « l’usage des circulaires par les administrations centrales n’a pas évolué ». En clair, il y a toujours un problème quant au flux annuel de nouvelles circulaires créées. Et de fait, celui-ci est très important, de l’ordre de 1.305 en 2018 (dernière statistique connue), soit un niveau jamais atteint depuis 2013 (1.433 textes). Pire, l’augmentation entre 2017 et 2018 a été très rapide, +14,6%, notamment en matière de budget/fiscalité (+71,7%), d’administration générale (+276%) et de défense (+19,8%).

Le Premier ministre a donc décidé de prendre les choses en main, en structurant son action en fonction de la répartition par destination du flux de circulaires :

  • S’agissant des 38% de circulaires relatives à l’organisation et au fonctionnement des services, Edouard Philippe précise qu’elles ne doivent désormais plus intervenir « qu’à titre exceptionnel » et porter « sur des priorités d’actions du ministère ». En conséquence, ces textes devront impérativement « être personnellement signés par le ministre », une façon de ne pas lâcher la bride des administrations centrales des ministères ;
  • S’agissant des 33% de circulaires relatives à l’interprétation et au commentaire de la norme, le Premier ministre est encore plus dur, et précise qu’elles ont vocation à disparaître rapidement car ce « sont des outils du passé », remplacées par « la mise à disposition d’une documentation régulièrement mise à jour » commune aux agents publics, élus locaux et aux citoyens ;
  • Enfin, les circulaires doivent être recentrées sur la mise en œuvre des réformes des politiques publiques (9% du flux, les 21% restants étant de nature mixte et concernant les deux premières catégories). Celles-ci doivent inclure « la fixation d’objectifs, la définition d’indicateurs utiles et des calendriers d’exécution ». En clair, elles doivent permettre un suivi pertinent et chiffré des réformes en cours.

Édouard Philippe l’annonce sans ambages, « l’évolution de la pratique des circulaires doit être perceptible par tous et leur nombre réduit significativement ». Une bonne nouvelle, d’autant plus que celle-ci est suivie d’un dispositif de sanctions : s’agissant des circulaires d’organisation signées par les ministres, le Secrétariat général du gouvernement (SGG) pourra en refuser la publication pour non-observation des critères limitatifs définis par l’instruction du 5 juin 2019. Mais on aimerait que ce volontarisme du Premier ministre soit le début d’une vraie « simplification » normative dont plusieurs éléments restent en suspens : tout d’abord il n’y a pas de « cible chiffrée à atteindre » par catégorie de circulaires « en flux ». On ne dispose pas non plus d’un indicateur programmatique pour 2020 d’une simplification supplémentaire du stock en vigueur. Par ailleurs, il n’y a toujours pas d’organisme désigné (le SGG ?) chargé de publier en toute transparence l’impact économique et budgétaire de l’activité normative pour les particuliers, les entreprises et l’administration elle-même. Seules les collectivités territoriales jouissent d’un tel dispositif via le Conseil national d’évaluation des normes (CNEC) ; pourtant les Belges, les Allemands, les Britanniques et les Hollandais l’ont fait. Pourquoi pas nous ? L’intention est donc méritoire sur le flux des circulaires, les effets sur son stock, significatifs, mais le gouvernement doit aller encore plus loin et se fixer des cibles explicites.