Le rétablissement du jour de carence dans le secteur public n'est qu'une étape
Tous les mercredis, avant le Conseil des ministres, Le Macronomètre, l'observatoire des réformes du gouvernement lancé par la Fondation iFRAP, attribue une note aux réformes d'Emmanuel Macron. La note de la semaine du Macronomètre est présentée dans le Figaro. Cette semaine : 8 sur 10 pour le rétablissement du jour de carence.
L'absentéisme dans le secteur public est clairement plus élevé que dans le secteur privé et il est globalement, en France, plus important que dans les autres pays d'Europe. Il faut dire que dans le secteur privé, les salariés sont soumis à trois jours de carence en cas d'arrêt maladie (même huit pour les indépendants) avant que la sécurité sociale ne leur verse des indemnités journalières, même si environ 60 % des salariés ont leurs jours de carence pris en charge par leur entreprise. Résultat: 16,7 jours par an et par salarié (en moyenne) dans le privé (selon les données d'Alma consulting).
Alors que dans le secteur public, la Fondation iFRAP, après collecte des bilans sociaux des employeurs publics, chiffre à :
- 24,5 jours d'absence par an et par agent dans les communes ;
- 19 jours d'absence par an et par agent dans les départements ;
- 27,7 jours d'absence par an et par agent dans les conseils régionaux.
Pour répondre à ce problème, un jour de carence avait été mis en place en 2012 par « souci d'équité » entre fonction publique et secteur privé. Mais, présenté comme humiliant pour les agents par Marylise Lebranchu, il avait été supprimé au 1er janvier 2014.
Il n'est pas inutile de rappeler que dans un courrier de février 2013 adressé à la ministre par le président de la Fédération hospitalière de France, ce dernier indiquait qu'une étude menée sur huit mois en 2012 auprès de 17 établissements hospitaliers concluait à une économie de 9,9 millions d'euros hors charges, grâce à l'introduction du jour de carence...
Ce débat est désormais clos avec le rétablissement du jour de carence dans la fonction publique, une promesse de campagne d'Emmanuel Macron.
Le gouvernement attend pas moins de 270 millions d'euros en luttant contre le micro-absentéisme : 108 millions pour la fonction publique d'État, 100 millions pour les collectivités locales, 50 millions au titre de la Sécurité sociale et 13 millions pour les opérateurs de droit public. C'est un premier pas pour faire baisser un surcoût de l'absentéisme dans le secteur public estimé à environ 2 milliards d'euros par an.
En 2016, le gouvernement avait tenté d'introduire des dispositifs visant à renforcer le contrôle des arrêts de travail des agents. Mais la mesure, qui prévoyait que les employeurs publics puissent recourir non seulement aux médecins agréés par l'administration mais aussi aux médecins-conseils de l'assurance maladie et à l'ensemble des médecins, avait été retoquée par le Conseil constitutionnel.
Rappelons qu'en matière d'assurance maladie, les employeurs publics sont leurs propres assureurs. En pratique, cela signifie que les feuilles d'arrêts maladie ne doivent pas être adressées à la CPAM comme pour les salariés du privé, mais seulement à l'employeur public qui peut, notamment dans le cadre des arrêts de longue maladie, diligenter des contrôles. Problème, ce sont les arrêts de courte durée qui mobilisent les employeurs publics (de 8 à 30 jours et de moins de 7 jours) car ce sont ces arrêts qui affectent le plus leur fonctionnement.
La ministre de la fonction publique Annick Girardin avait donc été contrainte de rappeler par circulaire que toute absence au travail doit donner lieu à la transmission dans les délais réglementaires d'une justification, sous peine de retenue sur rémunération, que l'employeur public peut contrôler cet arrêt par le moyen d'une contre-visite médicale assurée par un médecin-conseil et en particulier veiller à ce que le fonctionnaire placé en arrêt cesse toute activité rémunérée. Un rappel et un processus insuffisants : il apparaît essentiel de distinguer les fonctions d'assureur et d'employeur. Le rétablissement du jour de carence n'est donc qu'une étape.
À terme, il faudra aboutir à des systèmes de carence identiques entre secteur public et secteur privé, ce qui permettra d'éviter les allers-retours inutiles. Appliquer à tous les salariés les principes de la convention bancaire serait un bon compromis: 3 jours de carence, mais 6 par an maximum pris en charge par l'employeur.