Le débat d’orientation budgétaire 2022 est biaisé
Le débat d’orientation budgétaire pour 2022 a eu lieu, mais avec la mauvaise prévision de croissance de 5% au lieu de 6%, alors que cela aurait pu être évité… Dans son allocution du 12 juillet, le Président de la République lui-même a fait état d’une estimation de la croissance pour 2021 à près de 6%. Un chiffre de l’INSEE connu depuis le 1er juillet. Pourtant, les documents budgétaires annexés au débat d’orientation des finances publiques pour 2022 de l’Assemblée nationale et du Sénat, publiés les 12 et 13 juillet, tablent, eux, sur une croissance 2021 de 5%.
Bref, faute de mise à jour des perspectives économiques de l’INSEE, survenues pourtant bien avant, le débat d’orientation budgétaire 2022 est désormais caduc.
Et c’est un problème car les conséquences de cette révision entre une croissance à 5 ou à 6% ne sont pas minces si la croissance à 6% se vérifie. En effet cela devrait permettre au gouvernement d’annoncer de fausses « bonnes nouvelles » sur le front budgétaire : une dette publique inférieure à 116% du PIB contre 117,2% annoncés aujourd’hui et un solde public en nette amélioration : -8,4% contre -9,4% actuellement par exemple. Et encore, une hausse des recettes de prélèvements obligatoires (44,9% contre 44,5% dans le DOFP), une baisse faciale en volume du montant des dépenses (60,1% contre 61,7%) dès 2021, etc. d’après les modélisations de la Fondation iFRAP.
Miser sur une croissance sciemment pessimiste se basant sur des documents budgétaires obsolètes est un remake de ce qui s’est passé en 2020 : le plan de financement de l’Etat et le programme d’émission de dettes publiques n’avaient pas, non plus, été modifiés à temps. En conséquence, les montants souscrits ont été plus importants que les montants utilisés et, par un tour de passe-passe budgétaire à la limite de la légalité, près de 28,8 milliards d’euros ont été reportés par la voie réglementaire sur l’exercice 2021.
En 2022 il y a donc un risque de rebelotte : puisque les prévisions se fondent sur une croissance pessimiste et que la programmation des émissions de dettes de la France n’a pas été revue à la baisse. Il se pourrait bien qu’une quinzaine de milliards soient empruntés en trop, reportés pour 2022 ou utilisés à payer les nouvelles promesses gouvernementales non chiffrées de prise en charge de toutes les baisses de chiffres d’affaires des secteurs touristiques et commerciaux touchés par la baisse de fréquentation liée à la mise en place du passe sanitaire.
Au vu de ces éléments, il devrait s’imposer un nouveau débat d’orientation budgétaire et une deuxième loi de finances rectificative pour 2021 avec chiffrage à jour à la fois des prévisions macroéconomiques (dépenses, recettes, déficit, dette) avec la croissance de 6% et le coût budgétaire de la nouvelle vague que quoi qu’il en coûte qui semble à nouveau d’actualité à Bercy.