Quelles propositions innovantes pour le logement ?
En cinquante ans, la qualité des logements s'est considérablement améliorée que ce soit pour leur confort (chauffage, salle d'eau, ascenseur) ou pour le nombre de pièces par personne. Et cela pour tous les types de logements : publics, privés, appartements et maisons individuelles. Mais trois problèmes ne sont toujours pas résolus : 1) une pénurie de logements pour un million de ménages, 2) des prix très élevés dans certaines régions, et 3) des quartiers dégradés.
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Propositions
- Densifier la construction dans les centres et les zones de la périphérie desservies par les transports en commun des grandes villes et simplifier la procédure d'instruction des permis de construire
- Rendre constructibles, mais seulement à densité moyenne, des terrains en milieu périurbain (et rural)
- Rééquilibrer les relations bailleurs/locataires
- Reprendre la déconcentration des activités de Paris vers les grandes villes de province
- Réserver les HLM aux ménages dont les revenus sont inférieurs à la moyenne et mettre en place des baux limités à 9 ans et vendre des logements HLM aux occupants qui peuvent les acheter
- Ouvrir les avantages HLM (prêts CDC et autres) à des entreprises privées
- Amortir fiscalement les investissements dans la construction de logements. [1] )]
Le quatrième et très sérieux problème pour une France surendettée et en déficit, ce sont les 35 milliards d'euros du coût de la politique du logement que la collectivité distribue chaque année, soit plus de la moitié de ce que l'impôt sur le revenu rapporte à l'État.
Se concentrer sur les vrais problèmes
La crise du logement n'est pas générale dans toute la France. Si le prix moyen du mètre carré est de 8.000 euros à Paris, il est de 5.000 à Cannes, 4.000 à Nice, moins de 3.000 euros à Lille, Nantes, Marseille, Bordeaux, Montpellier, Grenoble et Toulouse, autour de 2.000 dans des villes moyennes comme Reims, 1.400 à Belfort et encore moins dans de nombreuses autres zones. Dans certains endroits, les prix sont très élevés parce que les régions sont très touristiques (ex : certaines façades maritimes ou les stations de montagne).
Une grande partie des revenus des ménages sont identiques dans toute la France : SMIC et salaires fonctions du SMIC, fonctions publiques et entreprises publiques notamment, revenus des professions libérales (médicales par exemple) et revenus des capitaux. La charge du coût du logement est donc très différente entre Paris et une ville où les prix sont 4 fois moins élevés, montrant bien que l'action publique doit se concentrer sur les vrais problèmes. Quand les prix moyens sont inférieurs à 3.000 euros, la meilleure solution serait de laisser le marché gérer ce secteur, donc de vendre progressivement la totalité du parc public et de limiter les interventions publiques à l'Aide Personnel au Logement (APL) beaucoup plus simple à gérer et transparente que les aides à la pierre. La seule alternative crédible à la vente consiste à banaliser le statut des bailleurs sociaux vers un statut de droit commun.
La région parisienne
En Europe, la région parisienne ne peut se comparer qu'à celle de Londres, où les prix du logement sont également très élevés et tout à fait atypiques pour le Royaume-Uni. Si l'on estime qu'une région parisienne très puissante est nécessaire, il faut en tirer les conséquences et ouvrir à la construction dense les vastes zones autour des nœuds de transport en commun prévus pour le Grand Paris. Mais de toute manière et en parallèle, il est indispensable de reprendre une politique de déconcentration des activités vers les grandes villes de province. S'il n'y a pas de crise du logement en Allemagne, c'est en grande partie parce que Berlin n'est pas hypertrophiée comme Paris, et que les villes de province (Francfort, Munich, Hambourg, Stuttgart …) sont de véritables capitales régionales. Sans cette action de déconcentration, le problème du logement dans la région parisienne restera insoluble. L'implantation en province, dans des villes desservies par le TGV, de plusieurs ministères complets (équipement, santé, agriculture, culture, éducation nationale, …) serait un signal nécessaire et fort.
Le développement rural
Contrairement à ce qui avait été annoncé et redouté, de nombreuses zones rurales connaissent un renouveau démographique, d'après l'INSEE, et se développent plus rapidement que les grandes villes. Cela répond à la préférence marquée des Français pour des maisons individuelles et à un attrait nouveau pour une vie plus proche de la nature. Cette évolution contribue positivement à la lutte contre la désertification de nombreuses zones rurales et doit être encouragée. En 2011, 55% des logements existants sont des maisons individuelles et cette proportion est la même dans la construction neuve malgré le biais du logement social en faveur des logements collectifs. La volonté des politiques de « reconstruire la ville sur la ville » va à l'encontre de ce que souhaitent les Français [2] et n'est réaliste que dans les très grandes villes.
Dans ce contexte, le principal handicap réside dans la rareté et donc le prix élevé des terrains constructibles dans toute la France. Une anomalie dans un pays où la densité de population (114 au km2) est environ deux à trois fois plus faible qu'en Allemagne (231), Royaume-Uni (255), Italie (201), Belgique (351), et Pays-Bas (400). De nombreuses terres ne sont pas rentables ou ont déjà été abandonnées par l'agriculture. Au lieu d'organiser une pénurie artificielle, il est urgent d'ouvrir de vastes espaces à la construction comme cela a été fait en Languedoc-Roussillon.
Les relations locataires propriétaires
Les contraintes mises peu à peu à la charge des propriétaires ont conduit les plus rationnels, dont les assurances et les banques, à abandonner ce secteur d'investissement, à vendre la quasi totalité de leur parc locatif d'habitation et à se concentrer sur l'immobilier de bureau et commercial. Pour attirer les particuliers, plus attachés à la pierre, il a fallu mettre en place des dispositifs fiscaux efficaces mais coûteux et souvent mal adaptés : Robien, Robien recentré, Périssol, Besson, Borloo, Borloo populaire, Borloo ancien, Scellier. Dans ce domaine la complexité administrative a atteint un sommet avec la taxe sur les logements vacants : plutôt que d'alléger les contraintes qui dissuadent les bailleurs de louer (blocage des loyers, jurisprudence favorable aux locataires mauvais payeurs …), l'administration a créé une nouvelle taxe progressive pour punir ceux qui ne louent pas ! Une autre idée simple serait de supprimer l'ISF sur les logements locatifs et de réduire à due concurrence le coût de l'aide à la pierre ! Et pour compenser l'absence d'investisseurs privés, il faut sans cesse subventionner les logements publics (HLM ou autres), lieux de dérives régulièrement dénoncées par la Cour des comptes (ex : rapports sur les logements des hôpitaux parisiens, sur ceux du 1% logement ou sur ceux de la RIVP).
Pour résoudre la pénurie de logements, le retour des investisseurs privés est essentiel dans toutes les catégories de logements, des plus sociaux aux plus luxueux. Ce retour ne sera effectif que si l'État réduit les contraintes qui découragent les propriétaires (récupération du logement en cas de non paiement des loyers et en fin de bail).
Le coût de la construction
En 2012, l'urgence est de procurer un toit aux personnes très mal logées. Mais le coût de la construction est trop élevé en France à cause de la pénurie entretenue de terrains, l'excès de règlementation, l'absence de standardisation des logements et en raison de l'empilement des contraintes administratives et environnementales qui augmentent le coût de la construction d'environ 20%. (Deux exemples, la loi Spinetta, protectrice certes contre des malfaçons, conduit à les assurer 3 fois, une fois chez les constructeurs, une fois chez les contrôleurs et enfin par une dommage ouvrage pour payer plus vite en cas de conflit entre les deux précédentes, les contraintes d'accessibilité immédiate et générale aux handicapés, louable dans son principe augmente la surface minimale donc le prix des petits logements) En France, on construit pour des siècles, un souci louable, mais les personnes à la rue, dans des chambres de bonne ou dans des logements insalubres, préfèreraient vivre dans des lotissements de logements préfabriqués ou de « mobiles homes » confortables que de subir leur situation actuelle. La politique du logement, comme l'enfer, est aussi pavée de bonnes intentions.
Des pays voisins comparables (Allemagne, Espagne, Italie, Pays-Bas) ont résolu depuis longtemps des crises du logement aussi fortes, voire pires que la nôtre : notre politique du logement, coûteuse et défaillante, doit être complètement repensée.
[1] Comme en Allemagne
[2] Les grands ensembles des années 1950-1980 avaient déjà été construits contre le souhait des Français, avec les résultats que l'on constate