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La violence des SAFER en Bretagne

Ty-Losquet : quand une violence en entraîne une autre

Ty-Losquet n'est pas le nom d'une de ces nombreuses crêperies qui, de New-York à Moscou, ont conquis le monde, mais un point de forte tension au cœur de la Bretagne. Et, comme trop souvent, c'est l'intervention de la Société d'Aménagement Foncier et Rural (SAFER) de la région qui est à l'origine de cette crise. Quand les règles du jeu sont confuses, la tentation de faire aboutir ses revendications par la violence est inévitable.

Le problème a débuté quand une exploitation agricole de 14 hectares s'est libérée et que la SAFER l'a préemptée. Une fois dans les mains de la SAFER, trois personnes se sont portées candidates.
- A. Un projet d'élevage de chevaux, mais par un candidat trop âgé pour rentrer dans le quota d'installation de jeunes agriculteurs et donc éliminé rapidement.
- B. Le projet d'une jeune femme désirant travailler en association avec ses parents installés dans le voisinage, et prévoyant à terme de reprendre leur exploitation d'une centaine d'hectares.
- C. Enfin le projet de deux jeunes femmes désirant élever des brebis, produire des fromages et faire de la vente locale.

Violence n°1

La préemption constitue une première violence contre le droit de propriété et celui de contracter librement, même si elle est légale. Pourquoi la SAFER a-t-elle exercé son droit de préemption sur une exploitation qu'il aurait suffi de mettre en vente et qui aurait trouvé preneur sans problème ?

Violence n°2

Il semble que ce soit le porteur du projet B qui ait demandé l'intervention de la SAFER. Et quand la SAFER lui a attribué cette propriété, des doutes ont été émis sur les raisons de ce choix acquis par seulement 9 voix contre 8. Naturellement, personne ne peut dire si ces doutes sont justifiés ou non. Le fait que le projet gagnant (le B) soit « du pays » et « classique », tandis que le perdant (le C) soit « hors cadre familial », « bio » et « atypique » a fait remonter des clichés et alimenté des campagnes injustifiées dans les deux sens. Qui peut dire que, face à la concurrence européenne, le projet B n'a pas un besoin absolu de s'agrandir, ou que celui de vente locale, le projet C, n'a pas d'avenir ?

Violence n°3

A peine la décision connue, les porteurs du projet C se sont révoltés et ont mobilisé une dizaine d'associations écologiques et de syndicats concurrents de la FNSEA. A ce stade, on est passé d'une violence légale à des manifestations sur le terrain de la propriété, des conférences de presse, des publications sur Internet et des déclarations catégoriques contre le projet de la personne qui avait obtenu la propriété Ty-Losquet.

Violence n°4

Vu les proportions prises par les manifestations, la SAFER, les élus locaux et la préfecture se sont sentis contraints de trouver une autre propriété, tout en sauvant la face. Trente hectares d'une réserve foncière de la ville de Guingamp ont été miraculeusement découverts et promis à celle qui avait d'abord obtenu Ty-Losquet. Un appel à candidatures ne semble pas avoir été fait pour l'attribution de ces terres.

DERNIERE HEURE : Violence n°5

Comme on pouvait s'y attendre, les 30 hectares de Guingamp n'étaient pas à l'abandon, mais 12 hectares étaient déjà cultivés et promis à un autre agriculteur. Aussitôt le projet connu, des amis de cet agriculteur ont ressemé du blé sur ces terres qu'on lui avait donné l'ordre d'abandonner. Ils appelèrent à des manifestations et se préparèrent à aller en justice pour défendre leur collègue. Autre problème, le prix de vente de ces hectares. Alors que l'occupant actuel proposait de les acheter 8.800 euros l'hectare, la vente à celle qui vient de perdre Ty-Losquet se ferait autour de… 3.600 euros (le prix d'achat de l'hectare à Ty-Losquet ?). « Qui va prendre en charge cette différence de prix de 124.000 euros ? Pas la SAFER, mais le Conseil général, c'est immoral » s'insurge l'actuel occupant.

Cette affaire n'est donc pas terminée, mais elle illustre bien la confusion et les violences où, partout en France, les règles vagues et sujettes à interprétation fixées par la loi aux SAFER, entraînent les intéressés. L'action des SAFER devaient apaiser le marché des terres agricoles, elle attise les rivalités. Sans oublier le coût de cette agitation : SAFER, chambres d'agriculture, préfecture, communes, Conseil général, au lieu d'accomplir les tâches qui sont les leurs, dépensent nos impôts pour résoudre un problème qu'ils ont eux-mêmes créé. Le problème de Ty-Losquet agite la région depuis 9 mois. Et si l'une des 5 violences l'emportait finalement sur les autres, ce serait un encouragement à encore plus de violences pour les prochaines affaires.

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