Haute fonction publique et missions gouvernementales… il faut la transparence !
En temps de crise, la puissance publique doit donner l'exemple de la vertu budgétaire. Et si pour le moment la question de l'amputation des salaires des ministres et ceux de la haute fonction publique n'est pas encore à l'ordre du jour, contrairement à nos voisins européens (Angleterre mais également Espagne), la polémique récente sur les missions données à d'anciens ministres pourrait permettre de faire évoluer sensiblement les pratiques actuelles.
La proposition de bon sens de Valérie Pécresse consistant à « faire publier la liste des personnalités ayant reçu une mission du gouvernement et les modalités financières de ces travaux » gagnerait à être mise en œuvre sans plus tarder. La Fondation iFRAP se prononce à cet égard pour la publication conjointe du coût général et des frais de mission occasionnés (déplacement, frais d'hôtel, transports, représentation, documentation etc…). Elle voudrait y ajouter la publication des traitements et des primes des hauts fonctionnaires.
En effet, la transparence sur la rémunération de la haute fonction publique et du personnel politique est souvent opaque [1] car se présentant sous forme de grille indiciaire lettrée illisible [2]. En outre, les rémunérations sont généralement présentées hors primes ne permettent pas non plus au public se de rendre compte du montant des salaires effectivement perçus. D'ailleurs, certains grands corps aujourd'hui en profond remaniement (conservateurs des hypothèques, trésoriers payeurs généraux) ont échappé longtemps à la publication des décrets organisant leurs statuts et partant leurs revenus.
A l'opposé, David Cameron vient de publier dès son arrivée au pouvoir le 31 mai 2010 la liste des noms et rémunérations (hors primes et avec primes) des 172 fonctionnaires gagnant plus de 150 000 £/an, mais aussi les rémunérations de l'ensemble du Cabinet Office et de ses conseillers à partir de 58 200 £. Ces mesures de publicité s'inscrivent dans le cadre d'une politique générale de transparence salariale dans la fonction publique et la haute administration britannique [3]. Dans la même veine, le gouvernement espagnol s'est également engagé dans la voie de la transparence, s'engageant par ailleurs à réduire les rémunérations des membres du gouvernement de 15% mais aussi à publier les principaux salaires des fonctionnaires dans le cadre des mesures extraordinaires pour la réduction du déficit public inscrites dans le décret-loi royal n°8/2010 du 20 mai 2010 [4].
A l'heure où l'on évoque sans cesse le salaire, les primes, les retraites chapeaux et les parachutes dorés des patrons du CAC-40, ou les commissions des traders, il est nécessaire de militer pour une vraie transparence public/privé à la disposition de chaque contribuable-citoyen !
[1] Au point que même les statisticiens ont actuellement du mal à s'y retrouver. Ainsi dans le Rapport annuel sur l'Etat de la fonction publique volume 1 de 2009, on peut lire p.56 qu'il n'existe même pas de définition juridique et statistique exacte de la catégorie A+. Dans ces conditions évaluer sa masse salariale est problématique… ce qui implique une impossibilité d'en tirer une appréciation moyenne des revenus.
[2] Ce système fut inspiré au cours du XIXème siècle par l'observation de l'administration mandarinale chinoise (voir Etiemble, L'Europe chinoise, tome 1 et 2, Gallimard, 1988-1993, mais aussi Pinet dir, Histoire de la fonction publique en France, tome 3, Nouvelle Librairie de France, 1993) établie définitivement sous l'administration de la dynastie Tang (voir, Robert des Rotours, Traité des fonctionnaires et Traité de l'Armée, traduits de la Nouvelle Histoire des T'ang (chap. XLVI-L). Leyden, Brill, 1947, 2 vol ; pour un aperçu de la question, Ivan P., Kamenarovic, La Chine classique, Les Belles Lettres, 2002, p.81 et suiv.).
[3] voir http://www.cabinetoffice.gov.uk/new..., mais aussi http://www.cabinetoffice.gov.uk/new... .
[4] http://www.congreso.es/constitucion... .