Normes européennes : une charge de 20 milliards d'euros pour la France
120 milliards, voilà l’estimation annuelle du poids des normes européennes sur le pays de l’UE. C’est à partir des données 2022 de la Commission européenne et de son programme REFIT, chargé de lutter contre l’inflation normative, que la Fondation IFRAP estime les charges administratives émanant de l’Union européenne à 120 milliards d’euros environ en 2022. On parle ici de l’ensemble des coûts (ou « d’impôt papier ») dus aux obligations que la réglementation et les normes imposent aux citoyens, aux collectivités et aux entreprises.
Cette tribune a été publiée dans les pages du JDD, le 7 avril 2024. |
La France et tous les États membres de l’Union européenne sont dans une situation où se cumulent deux niveaux d’impôts papiers : un niveau national et un niveau européen.
Alors que le PIB de la France représente 17% de l’Union, on peut estimer que la part des charges administratives européennes pesant sur notre pays est de 20 milliards d’euros. Cela veut dire que sur l’impôt papier que nous subissons en France, environ 100 milliards, 80% émane de l’activité législative nationale, 20% de l’activité européenne.
Un taux qui serait constant dans le temps si l’on reprend l’analyse menée par notre Europe en 2014 estimant la part des normes d’origine européenne aux alentours de 20 % des lois pour la période 1990-2008… mais avec des taux qui monteraient à 30-40 % des lois pour les secteurs de l’agriculture, de la finance et de l’environnement et qui tomberaient en dessous de 10 % pour les secteurs de l’éducation, du logement, de la défense ou de la protection sociale.
De 2007 à 2012, la Commission européenne avait demandé à tous les États membres de baisser de -25% le poids de leur charge administrative. Si la France a toujours refusé de s’atteler à ce chantier, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas ou encore le Royaume-Uni ont conduit des politiques de réductions tellement abouties qu’aujourd’hui, 7 nations se sont réunies dans une organisation RegWatchEurope pour surveiller la politique européenne sur le sujet.
La Commission avait elle-même atteint son objectif avec une baisse de -30,5% du poids des normes en 2012. Mais, jusqu’en 2022, plus aucun objectif chiffré n’a été publié au niveau européen. Résultat : il n’existe pas de chiffre officiel sur le coût des normes européennes. Dommage car la base de données existe forcément. Néanmoins, bonne nouvelle, en 2022, la Commission annonce l’objectif de baisser le poids des normes à venir de -25%, soit 7,3 milliards d’euros sur les 10 prochaines années.
Rien cependant sur le stock qui avait pourtant été évalué en 2007. Les Allemands, leaders incontestés sur ces questions, estiment que ce sont les entreprises qui sont les plus impactées par les normes européennes. Depuis 2015, en Allemagne, 56% des coûts de « mise en conformité » pour les entreprises sont imputables à la transposition des normes européennes alors que symétriquement ces dernières n’ont bénéficié que de 20% des « économies » dégagées.
Particulièrement conscients de cet enjeu, nos voisins évaluent systématiquement les initiatives européennes (avant même qu’elles ne soient votées !) et cherchent à compenser l’impact des normes nouvelles par l’application stricte du one in, one out (une norme ajoutée, une norme supprimée) et suivent cette balance via un index annuel. Loin de cela, côté français, 1 directive européenne sur 4 fait l’objet d’au moins une mesure de surtransposition « avec un effet pénalisant ».
Or, seulement 29% des surtranspositions françaises finissent par être adoptées au niveau européen, ce qui veut dire que dans 71% des cas, nous ajoutons de la norme sur la norme. Dommage qu’il faille faire des estimations dans tous les sens sur ce sujet. L’impression que cela donne c’est que ni la Commission européenne ni les autorités françaises ne souhaitent faire vraiment la transparence sur le poids des normes qui pèsent sur nos activités, qu’elles viennent de l’Union ou de la France.