Le plan pour rééquilibrer nos finances publiques
Pendant que l'agence Moody's se donne trois mois pour dégrader ou non notre note AAA, la campagne présidentielle commence en France. Le sujet de l'équilibre de nos finances publiques et de la résolution de notre équation budgétaire est au cœur de la campagne. Sera élu président celui qui montrera qu'il aura le courage de prendre les décisions douloureuses qui permettront d'éviter à la France une situation de faillite. Pour l'instant, les diverses annonces, notamment côté PS, favorisent les augmentations de dépenses plutôt que la réduction des dépenses. Surtout, personne ne dit, ni dans un camp ni dans l'autre, quelles seront précisément les économies réalisées. Ce mois-ci, la Fondation iFRAP publie un plan précis pour sauver la note de la France. Plan qui porte à la fois sur les dépenses sociales de l'État et des collectivités, et qui permettrait d'économiser dès la première année 8 milliards d'euros de dépenses et de générer 20 milliards de recettes issues de cessions d'actifs de l'État.
Notre endettement est proche des 85% du PIB et étrangle la croissance. Une dégradation de notre note alourdirait pourtant rapidement sa charge, nous étranglerait encore plus car elle nous coûterait en charge de la dette rapidement 3 à 4 milliards d'euros de plus par an.
Déjà en 2012, la charge de la dette augmentera de 3,4 milliards d'euros par rapport à 2011 et les pensions des fonctionnaires de quasiment 2 milliards... Et que dire des dépenses sociales ?
Le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux a permis d'enrayer l'envol de la masse salariale de l'État mais pendant ce temps-là les collectivités locales ont embauché massivement. Résultat : le nombre de personnels publics a continué d'augmenter au total en France. En 2009 (selon les chiffres de la DGAFP), la France comptait 0,4% de fonctionnaires en plus par rapport à 2008 ; les dépenses sociales flirtent avec les 600 milliards d'euros par an, les collectivités locales n'ont toujours pas de périmètre d'intervention bien défini…
Si nous voulons redresser la barre de la gestion des deniers publics, le temps est venu de donner un vrai coup d'arrêt à l'augmentation galopante de nos dépenses publiques et de s'attaquer aux gros postes de dépenses que sont les retraites publiques, les hôpitaux, les prestations sociales en espèces, les effectifs des collectivités locales…
Les parlementaires cherchent un milliard d'euros d'économies supplémentaires et ont du mal à le trouver alors que plus de 7 milliards d'euros, comme le montre ce dossier : « Le plan pour sauver le AAA de la France », sont « économisables » immédiatement. À condition d'accepter de regarder en détail chaque politique publique, et de couper 500 millions d'euros ici, 800 millions là.
Poursuite du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux et application de cette règle dans les collectivités et les hôpitaux, gel des minima sociaux, fiscalisation des prestations sociales en espèces (cela permettra de mesurer le montant de prestation par foyer fiscal...), alignement des tarifs des hôpitaux publiques et des cliniques, lutte contre l'absentéisme dans la fonction publique par un alignement des conditions d'indemnisation maladie, cession de l'immobilier public détenu au-delà des besoins, contrainte des achats de l'État, contrainte de la dotation des collectivités locales avec incitation forte à la fusion des communes, et à l'application d'une révision générale des politiques publiques locales (RGPPL), cession de 20 milliards de participations à Aéroports de Paris, Air France, EDF, France Télécom... Tout est chiffré dans le plan de sauvetage de notre AAA.
Maurice Lévy, patron de Publicis, dit cette semaine dans Challenges en substance qu'il faudra faire de gros efforts sur les dépenses structurelles (masse salariale des trois fonctions publiques y compris retraites : 285 milliards d'euros par an...), reprendre le chemin des privatisations et céder des actifs pour réduire l'endettement.
Ce n'est pas facile, pas glamour, c'est besogneux. Mais ça peut marcher, alors, pourquoi attendre pour essayer ?
Le plan de la Fondation iFRAP pour sauver la note de la France
en résumé :
Volet social
[*3,2 milliards d'économies dès la première année,
1,8 milliard de recettes nouvelles dès la première année*]
- Gel des minima sociaux : 423 millions d'euros d'économies dès la première année.
- Fiscalisation des prestations sociales en espèces : 300 millions d'euros de recettes nouvelles.
- Une allocation unique (avec guichet unique et fichier unique) fusionnant RSA, PPE, APL : une économie sur la fraude sociale d'au moins 800 millions d'euros dès la première année.
- Alignement des tarifs des hôpitaux sur ceux des cliniques (convergence progressive) : 1 milliard d'économies dès la première année, jusqu'à 7 milliards par an en 2018.
- Alignement progressif du taux de cotisation employeur des retraites publiques sur les retraites privées et gel du point d'indice définitif pour les traitements des inactifs : 1 milliard la première année, 20 milliards d'euros par an à terme.
- Alignement progressif des taux de CSG actifs et retraités et suppression de l'abattement : 1,5 milliard d'euros de recettes nouvelles dès la première année.
Volet local
[*2,3 milliards d'euros d'économies dès la première année*]
- Les dotations aux collectivités locales mises sous condition d'une « RGPP locale » (non-remplacement d'un départ sur deux en retraite, clarification des rôles des différentes strates locales…) : 2 milliards d'euros d'économies potentielles.
- Non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux : 300 millions d'euros la première année, 9,8 milliards d'euros par an en 2021.
Volet central
[*3,34 milliards d'euros d'économies dès la première année*]
- Maintien de la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux et abaissement du taux de rétrocession aux administrations de 50 à 20 % : 640 millions d'euros d'économies.
- Réduction de la masse salariale des opérateurs des universités : 234 millions d'euros.
- Économies sur les dépenses de fonctionnement de 10 % sur trois ans : 166,6 millions d'économies dès la première année.
- Achats de l'État : 0,8 milliard d'euros d'économies la première année et 1,7 milliard l'année suivante.
- Immobilier de l'État, des hôpitaux, des administrations de Sécurité sociale et des opérateurs : 15 milliards d'euros d'économies en 10 ans, soit 1,5 milliard d'euros par an (trois fois l'effort actuel).
Cessions de participations cotées de l'État pour 40 milliards d'euros
- Cessions d'actifs au sein d'entreprises cotées : plus de 20 milliards d'euros de recettes la première année, 20 milliards d'euros la seconde année.
- Cession de la participation de l'État dans la Française des Jeux : 1 milliard d'euros de recettes dès la première année.