Actualité

François Hollande : où sont les outils pour la baisse des dépenses ?

1.833 milliards de dette, 98 milliards de déficit : où sont les outils pour baisser les dépenses publiques ? Alors que les télévisions de France s'éteignent suite à l'intervention télévisée du Président de la République, l'INSEE publie les chiffres choc des comptes nationaux pour 2012 :

- Le déficit public de la France s'est élevé à 4,8% du produit intérieur brut en 2012 (-98,2 milliards d'euros) contre 4,5% prévus par le gouvernement
- La dette publique s'élevait à 90,2% du PIB fin 2012, soit 1.833,8 milliards d'euros
- Les dépenses ont progressé de 2,9%, après +2,1% en 2011 et les recettes ont augmenté de 3,9%, après +5,7% en 2011
- L'an dernier, le taux des prélèvements obligatoires a augmenté de 1,2 point à 44,9% du PIB, sous l'effet de la hausse des impôts (+5,3%).

Selon la Commission européenne, si aucune nouvelle mesure n'est prise, la dette atteindra 93,4% du PIB fin 2013 et 95% fin 2014.

La situation est claire : il y a urgence.

L'urgence est de baisser les dépenses. Augmenter les impôts ne servira plus à rien, notamment sur le capital et sur le travail, nous avons déjà dépassé le maximum de la courbe de Laffer et les recettes fiscales engrangées à Bercy en ce moment même sont en baisse.

Sur les dépenses publiques, le Président n'annonce pas de réformes spectaculaires ni structurelles, et pas de diminution, seulement un effort, dont on veut bien lui faire crédit, pour ne pas les augmenter. Un milliard peut-être de moins dépensé en 2014 par rapport à 2013. Autrement dit, pas à la hauteur de l'enjeu. Au lieu de nous parler de réformes de fond de notre système public, le Président nous parle d'économiser sur… les achats ! Depuis 10 ans, tous les gouvernements annoncent des économies sur les achats. Cela ne fait pas baisser le montant global des dépenses publiques qui a augmenté en euros courants de 50% depuis 2000 (de 744 à 1119 milliards en 2011). Le Président nous parle aussi de simplification mais il ne se prononce pas sur la suppression d'au moins un échelon local tout en reconnaissant des doublons, il ne propose pas de revoir la feuille de route de chaque acteur public et de supprimer la mode des cofinancements publics qui a pour conséquence d'augmenter les coûts, le nombre de personnels etc. La simplification reste un gadget peu couteux politiquement et qui aboutit rarement à des résultats concrets.

Ce que nous attendons c'est la simplification de toute la structure publique de l'État au Local en passant par les prestations sociales. Mais de cela, point.

Pourtant, le 13 novembre 2012, lors de sa grande conférence de presse, le Président nous avait montré un visage plus déterminé :

«  La dépense publique atteint aujourd'hui 57% de la richesse nationale. Ce chiffre ne dira pas forcément grand-chose aux Français : 57% de la richesse nationale. C'était 52% il y a cinq ans : est-ce que l'on vit mieux pour autant ? Est-ce que l'État est devenu plus juste, plus efficace ? Est-ce que les prestations ont permis de réduire suffisamment les inégalités : non ! Donc il nous faut faire cette réforme : réforme de l'État, de notre organisation, de notre système social pour qu'il soit plus efficace, plus juste … »

Que s'est-il passé entre le 13 novembre 2012 et le 28 mars 2013 pour que le Chef de l'État ne nous parle même plus des 60 milliards à économiser en 5 ans ?

Il est clair que le Président attend tout du retour de la croissance, et non d'une diminution de l'hypertrophie de notre secteur public que nous surpayons par rapport à nos partenaires européens, de 60 milliards par an.

Alors que le monde entier ne prévoit pas de retour substantiel de la croissance en Europe, comment ne pas accueillir avec un total scepticisme l'annonce que ces prétendus « outils exceptionnels » que sont les contrats d'avenir, les contrats de génération, le pacte de compétitivité et le CICE la feront revenir, au moment où en parallèle la pression fiscale et parafiscale sur les entreprises augmente de façon vertigineuse ? L'inversion de la courbe du chômage pour la fin de l'année ne serait ni un vœu, ni un simple objectif, mais un véritable « engagement ». Mais que nous dit-il pour accorder foi à cette promesse, et par ailleurs en quoi une simple stabilisation du chômage à 11% résoudrait-elle les problèmes de la France ?

Sur la pression fiscale, on a bien noté qu'elle n'augmenterait pas « en 2013 » du fait de l'État. Mais on a aussi compris qu'elle augmenterait en 2014 (cf. la TVA), et surtout qu'elle pourrait augmenter à tout moment du fait des collectivités locales, qui sont « libres » de leur mouvement à ce propos, ainsi que du fait des cotisations sociales dont la détermination reste du ressort des partenaires sociaux. Autrement dit, ce ne sera pas l'État le coupable.

Sur le pouvoir d'achat enfin, le nouveau déblocage, regrettable pour les entreprises, de la participation des salariés (pour quelque utilisation que ce soit) ressemble à la fusée de détresse que lancent les navires en perdition, lorsqu'aucune manœuvre ne peut plus les sauver…

« Je n'attends pas la croissance, je la crée », nous dit François Hollande. Créer les conditions de la croissance demande de desserrer l'étau public qui entrave la création de richesse en France, la création d'entreprises et la création d'emplois marchands. Cela demande de sortir du discours sur les doublons publics et sur la mauvaise organisation de nos administrations et d'AGIR. Agir demande de convoquer en urgence tous les acteurs publics (agents, élus et syndicats de salariés et du patronat qui gèrent tous une part de la dépense nationale) pour baisser en valeur d'environ 1% par an l'ensemble de la dépense publique (autour de 10 milliards) et de reconnaitre que cela passera aussi par une réduction des effectifs et une refonte du système des retraites des agents de l'État. On est loin du discours vérité et les outils ne sont pas encore sortis de leur boite.