Cumul des mandats : le point sur la réforme adoptée
L'Assemblée a adopté les deux projets de loi relatifs au non-cumul des mandats. Le premier interdit le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député et de sénateur. Le second interdit le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen. Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls l'avait rappelé : les élus locaux ont une lourde responsabilité. Je refuse les attaques à leur encontre, comme à l'encontre du Parlement. Légiférer, contrôler le gouvernement, évaluer les politiques publiques sont des missions essentielles qui demandent un engagement à plein temps, incompatible avec une fonction exécutive locale. C'est parce que chaque parlementaire est élu pour accomplir une mission de législateur, consistant à faire voter la loi et à contrôler l'action du gouvernement, qu'il représente l'intérêt général du pays tout entier et pas seulement le territoire sur lequel il a été élu.
Ce que va concrètement changer la loi
Les principales règles en matière de cumul de mandats ont été posées par la loi organique du 5 avril 2000 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux et par la loi du 5 avril 2000 relative à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions électives et à leurs conditions d'exercice. Ces lois limitaient déjà le cumul à un seul mandat exécutif local en plus d'un mandat parlementaire. Mais elles ne prenaient pas en compte les intercommunalités. Cela permettait donc à un certains nombres de parlementaires de cumuler plusieurs mandats locaux.
La nouvelle loi sur le cumul des mandats étend les incompatibilités des mandats nationaux/ locaux. Résultats : aucun parlementaire ne pourra exercer les fonctions de maire d'arrondissement, maire délégué, ou adjoint au maire, les fonctions de Président ou vice président d'un conseil général ou régional, d'un Etablissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou d'un syndicat mixte, d'une collectivité à statut particulier ou membre d'un exécutif de cette collectivité, du conseil d'administration ou d'un établissement public local ou d'un centre de gestion de la fonction publique territoriale, du conseil d'administration ou du conseil de surveillance d'une société d'économie mixte locale, d'une société publique locale ou d'une société locale d'aménagement, du conseil d'un organisme d'habitations à loyer modéré. Toutefois, la loi ne met pas fin au cumul des mandats. En effet, un Parlementaire pourra cumuler cette fonction avec celle de conseiller municipal, conseiller régional, conseiller général ou être membre d'un EPCI.
La nouvelle loi sur le cumul des mandats ne concerne pas les incompatibilités des mandats locaux entre eux. En outre, il n'y a pas de limitation des mandats au sein des organismes de coopération entre collectivités territoriales (communautés urbaines, communautés de communes et communautés d'agglomération, syndicats mixtes ou intercommunaux). Le mandat de maire est encore compatible avec les fonctions de président d'un EPCI, d'une société d'économie mixte locale (SEM) ou d'une société publique locale (SPL). L'article 12 de la loi organique interdisant le cumul des fonctions exécutives locales avec le mandat de sénateur ou de député prévoit l'application des nouvelles dispositions à tout parlementaire à compter du premier renouvellement de l'assemblée à laquelle il appartient suivant le 31 mars 2017. L'étude d'impact du projet de loi organique ajoute que la date fixée au 31 mars 2017, permettrait que les nouvelles règles relatives au remplacement permettent de pourvoir les sièges ainsi laissés vacants dans le cas de la démission de leur titulaire. Concernant le non-cumul pour les eurodéputés, celui-ci s'appliquera à partir de 2019.
Concernant les incompatibilités vis à vis des intérêts privés, il y a eu un renforcement en 2013 d'une première incompatibilité : l'exercice du mandat parlementaire est incompatible avec la direction d'une société faisant appel au crédit public et à l'épargne.
Aux termes du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles adopté par le parlement en 2013, la métropole du Grand Paris doit regrouper les communes de Paris, des départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne et certaines communes des départements de la Grande couronne parisienne.
Le mandat du futur président de la métropole débutera le 1er Janvier 2016. Il est incompatible avec un mandat de député, mais pas avec celui de maire, jusqu'en 2020 où se dérouleront les prochaines élections municipales. Claude Bartolone, actuel président de l'Assemblée nationale a annoncé dimanche 2 février sa participation aux élections municipales au Pré-Saint-Gervais dans l'objectif de diriger le Grand Paris. Il a précisé que s'il devait occuper ce poste, il arrêterait même d'être député.
Le non-cumul des mandats : vers une augmentation du budget des collectivités ?
Il y a en France aujourd'hui 560.000 élus municipaux, dont 36.700 maires et environ 100.000 adjoints au maire. Le coût annuel des indemnités de nos élus locaux s'élève donc à 1,2 milliard. Leur nombre excède un demi-million, ce qui nous place en tête de tous les pays européens en termes d'élus locaux par habitant. 1,2 milliard se compose pour la plus large part des indemnités des maires et de leurs adjoints. Cependant, sans qu'il soit possible de précisément l'estimer, une petite part va dans la rémunération des conseillers municipaux. La rémunération des élus français est l'un des principaux obstacles à la fusion des communes qui s'avère nécessaire. Rappelons que la France est une anomalie dans le paysage européen avec 36.769 communes, soit 40% de la totalité des communes de l'Union européenne.
La loi du non-cumul aura pour conséquence la multiplication du nombre d'élus et une décentralisation de la prise de décision vers le local. Fait qui sera d'autant plus accentué avec la mise en place des métropoles qui va se traduire par un nombre important d'élus. A cet effet, avec la réforme de 2017, un élu ne pourra plus être député et maire à la fois. Il y aura donc un député d'une part et un maire d'autre part. Cependant, l'impact financier est difficile à évaluer. « Cette loi va-t-elle augmenter le budget des collectivités ? C'est très difficile à savoir. C'est même impossible à dire pour l'instant. Il faudra attendre de savoir qui occupe quel poste », explique le spécialiste de la gestion des finances locales, le député René Dosière. Lorsque la loi entrera en vigueur en 2017, les parlementaires devraient être beaucoup moins nombreux à atteindre le plafond légal. En effet, parmi les mandats locaux, ce sont les fonctions exécutives qui sont les mieux indemnisées. Par exemple, le maire d'une ville de plus de 100.000 habitants touche une indemnité de 5.512,13 euros brut. Si l'écrêtement [1] est moins fréquent, la somme reversée aux collectivités sera moins importante.
Selon l'étude d'impact de la loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur du 2 Avril 2013, en l'état actuel du droit, les dispositions n'ont pas d'impact financier : elles sont sans effet sur le montant global des indemnités que les collectivités et les EPCI devront verser, le montant théorique de l'indemnité de fonction restant inchangé ainsi que le nombre de fonctions électives à pourvoir.
La réforme de 2017 sur le cumul des mandats doit donc s'accompagner de :
- la fusion des communes de moins de 5.000 habitants dont l'objectif serait de rationaliser l'organisation territoriale, de faire baisser drastiquement le nombre d'élus et d'offrir une meilleure lisibilité aux citoyens ;
- Elever progressivement la taille "critique" minimale des intercommunalités à 10.000 habitants, avant de procéder à des "fusions" avec les communes selon des modalités à définir [2]
- l'augmentation des indemnités des maires ;
- la limitation du cumul du mandat de maire avec une société d'économie mixte locale (SEM) ou d'une société publique locale (SPL).
[1] Plafond pour le cumul des indemnités des élus à 1,5 fois l'indemnité de base des parlementaires (soit, depuis le 01/07/2010, un plafond de 8.272,02 euros brut).
[2] Dissolution des communes dans les intercommunalités (ce qui permettrait des effets d'économies plus vastes (liés à une meilleure maîtrise des conséquences de la clause de compétence générale), ou substitution de communes aux intercommunalités existantes comme le propose une récente proposition de loi déposée en "contre-feu" à la réforme gouvernementale par le député du Jura M. Jacques Pélissard Président de l'AMF visant à améliorer le dispositif "communes nouvelles" ainsi que la position de l'AdCF http://www.adcf.org/institutions-et…