Minimum vieillesse : les conditions pour le toucher, qu'on soit Français ou étranger

L’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), communément appelée « minimum vieillesse », a pour but d’assurer un niveau de vie minimum aux personnes âgées de plus de 65 ans percevant de faibles revenus. Fin 2022, 559 200 personnes touchaient l’ASPA. Pour un coût d'environ 4 milliards d'euros. Ce coût était de 2,7 milliards en 2018. Selon qu'on soit Français ou européen communautaire ou étrangers extra-communautaires ou étrangers issus d'un pays ayant signé une convention bilatérale avec la France, les critères d'éligibilités ne sont pas les mêmes. Étant donné l'augmentation importante du coût annuel du minimum vieillesse, on peut se poser légitimement la question de durcir les conditions d'éligibilité des différents ressortissants, notamment en matière de durée préalable de résidence en France qui devrait être de 10 ans, quelque soit la situation. La France est d'ailleurs plus généreuse que la plupart pays européens en la matière (voir encadré).
Les conditions pour les ressortissants des Etats communautaires
Dans le cas général, pour bénéficier de l’ASPA, il faut être âgé d’au minimum 65 ans (sauf handicap ou ancien combattant, à partir de 62 ans). L’aide est soumise à un plafond de ressources (1034,28€ bruts par mois pour une personne seule, et 1605,73€ pour un couple) qui conditionne son obtention.
Pour les étrangers, cela se complique. Les critères sont multiples et les exceptions, nombreuses. Il faut faire la distinction entre les personnes venant d’Etats communautaires (Espace économique européen et Suisse) et les autres.
La première catégorie regroupe les cas suivants :
- Les ressortissants d’un Etat de l’Espace économique européen ou de la Suisse (Etats communautaires)
- Les personnes réfugiées, apatrides ou bénéficiant de la protection subsidiaire
- Les personnes ayant combattu pour la France
- Les personnes originaires d’un des pays ayant un accord avec la France (Algérie, Andorre, Bénin, Cap-Vert, République du Congo, Gabon, Israël, Madagascar, Mali, Maroc, Monaco, Sénégal, Togo Turquie, Tunisie)
Pour les étrangers se trouvant dans l’un de ces cas, l’obligation d’avoir un titre de séjour depuis 10 ans ne s’applique pas. Ils doivent tout de même résider en France plus de 9 mois par an.
Les conditions pour les ressortissants de pays extra communautaires
Dans le cas des Etats extra-communautaires, en plus du plafond de ressources et des 65 ans, il faut résider en France de façon stable et effective pendant au moins neuf mois par an et être titulaire d’un titre de séjour en cours de validité depuis au moins 10 ans.
Les étrangers extra-communautaires en situation irrégulière ne sont pas éligibles à l’ASPA. Leur statut de migrant, couplé à l’absence de titre de séjour les empêchent de devenir bénéficiaires. Ceux qui sont en situation régulière mais résident depuis moins de 10 ans sur le sol français ne peuvent pas non plus toucher l’ASPA.
Des conditions spécifiques pour les ressortissants de pays ayant signé un accord bilatéral avec la France
Les conditions préférentielles accordées aux pays susmentionnés, à savoir l’absence d’obligation de possession d’un titre de séjour d’au moins 10 ans, sont permises « sous certaines conditions » selon Servicepublic.fr[1].

Les ressortissants exemptés de la possession d’un titre de séjour d’au moins 10 ans (voir liste ci-dessus) doivent fournir l’un des documents cités dans l’arrêté du 10 mai 2017[2] :

Cela est permis implicitement par les conventions bilatérales signées entre la France et ces pays. Pour l’Algérie par exemple, la Convention générale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire affirme le principe de l'égalité de traitement des ressortissants des deux pays[3] en matière de Sécurité sociale. Ainsi, bien qu’il ne soit pas directement évoqué dans le texte, le minimum vieillesse est accordé aux ressortissants algériens comme aux citoyens Français, en témoigne une note d’instruction réseau CNAV. En effet, les traités sont supérieurs aux lois. Même principe avec le Maroc : la Convention générale sur la Sécurité sociale sacralise une égalité de traitement.

Qu’est-ce que ça donne en chiffres ?
Les personnes étrangères représentent, en 2021, 35% des 70 000 allocataires du minimum vieillesse n’ayant jamais cotisé[4]. Ces derniers dépendent du service de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (SASPA) car ils ne sont rattachés à aucune caisse.
Le montant de l’ASPA s’élève à 1034,28 € par mois pour une personne seule et 1 605,73 € pour un couple. Il faut toutefois préciser qu’une partie des bénéficiaires ne touche pas l’entièreté de la somme. En effet, ces montants concernent une personne qui ne touche aucun revenu. Les revenus sont déduits de l’aide. Ainsi, une personne seule qui toucherait une pension de 300€, percevrait une pension de 734,28€ d’ASPA. Cela est principalement dû aux conditions de résidence antérieur à la demande variables en fonction des situations.
Des fraudes anormalement courantes
Selon le rapport de la Cour des comptes de 2021 sur la Sécurité sociale page 25, le dispositif d’attribution de l’ASPA laisse à désirer. Cela engendre immanquablement des fraudes. De plus, nombreuses sont les personnes éligibles qui ne touchent pas l’aide par manque d’information. Page 363, la Cour dénonce « des taux d’erreurs et des risques de fraude élevés ». Les fraudes de la branche Vieillesse sont imputables à 75% au minimum vieillesse. Cela est principalement dû aux conditions de résidence complexes et peu compréhensibles.
Durée de résidence minimale pour toucher le minimum vieillesse : quelques exemples en Europe

Conclusion
Il est évident que les critères d’obtention de l’ASPA devraient être simplifiés en deux catégories : les Français d'une part et les étrangers résidants avec un permis de travail depuis plus de 10 ans en France, qu'ils soient communautaires ou extra-communautaires. Avec de rare exceptions (réfugiés, apatrides, etc.). S'il n'était pas possible de modifier toutes les conventions bilatérales qui induisent le fait d'avoir les mêmes droits sociaux que les Français, il faudrait alors appliquer le minimum de 10 ans de résidence aussi pour les Français afin, par ricochet, d'aligner tous les ressortissants étrangers sur les mêmes conditions.
Et pour le RSA ?![]() * Par sa décision N° 279685 du vendredi 09 novembre 2007, le Conseil d’Etat confirme, au regard des accords bilatéraux signés entre la France et l’Algérie, qu’un algérien a « les mêmes droits que les nationaux français » en matière de sécurité sociale. Il peut toucher le RMI (ancien RSA) sans justifier de la détention d’un titre de séjour depuis 5 ans. |
Et pour l'Allocation aux adultes handicapés (AAH) ?En ce qui concerne l'AAH, en plus d'un certain taux d'incapacité, d'un âge minimum de 20 ans et d'une condition de ressources, il faut résider en France depuis plus de trois mois (sauf si l'intéressé exerce une activité professionnelle). Il faut aussi être en situation régulière. |
[1] Service public, vos droits, ASPA https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F16871/personnalisation/resultat?lang=&quest0=1&quest1=1&quest2=2&quest=
[2] Légifrance, Arrêté du 10 mai 2017 fixant la liste des titres de séjour prévu au I de l'article R. 111-3 du code de la sécurité sociale https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000034677457
[3] Cleiss, Convention de sécurité sociale entre la France et l'Algérie https://www.cleiss.fr/pdf/conv_algerie.pdf
[4] Cour des comptes, Le minimum vieillesse et l’allocation de rentrée scolaire : une contribution forte à la réduction de la pauvreté, des performances de gestion contrastées, Sécurité sociale 2021 https://www.ccomptes.fr/fr/documents/57131
[5] Mes aides financières.be, GRAPA en Belgique : conditions et montant en 2025 https://mes-aides-financieres.be/senior/grapa/#:~:text=Trois%20conditions%20sont%20requises%20pour,fix%C3%A9%20par%20votre%20situation%20familiale.