Actualité

Le gouvernement tourne la page de la compétitivité des entreprises

Acte II. Une nouvelle étape du quinquennat commence. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le second discours de politique générale du Premier ministre ne ressemble pas au premier. C'était en juillet 2017 : « Le constat est grave : 8 milliards d'euros de dépenses non financées, notre dette atteint un niveau insupportable, 2.147 milliards d'euros. » En deux ans, la situation s'est-elle améliorée ?

Qu'on en juge : notre dette en parts de PIB a augmenté, nous sommes maintenant proches des 100%. Nous aurons en 2019 un déficit public au-dessus des 3%. Quant aux comptes de la Sécu, ils repassent dans le rouge cette année et ce n'est guère mieux pour les hôpitaux ou l'assurance-chômage. Le nombre d'agents publics de l'Etat a, entre 2017 et 2018, augmenté de 12.000 et la masse salariale de l'Etat de 2 milliards… Le taux de chômage reste scotché à plus de 8,5%. Et, pour couronner le tout, la Banque de France table sur +1,3% en 2019 et +1,4% en 2020… insuffisant pour redresser durablement la situation.

Ce ne sont pas les investissements étrangers ou les créations d'emplois des derniers mois - quelque peu survendus - qui changeront rapidement la donne. Pourtant, le gouvernement semble tourner la page de la compétitivité de nos entreprises et renoncer à la baisse des dépenses publiques, passant, sans transition, à l'idée qu'il ne faut surtout plus vivre à crédit… de l'environnement. Ce changement de cap qui renonce, de facto, à l'équilibre des comptes publics d'ici à 2022 et à booster nos industries et nos territoires est très inquiétant.

La transformation attendra

En matière de réforme locale, le gouvernement s'engage à revoir le millefeuille territorial en évoquant la nébuleuse « différenciation ». La voie vers plus de simplification, moins de cofinancements et de compétences croisées ? Rien n'est moins sûr.

Côté retraite, le choix de la décote et de l'âge pivot est avant tout celui de la complexité car, selon nos chiffrages, cette mesure représentera près de 3 fois moins d'économies qu'un report de l'âge légal de départ à 64 ans… Pourquoi ne pas mettre en oeuvre un vrai report de l'âge à 65 ans comme l'ont fait les pays voisins ?

Côté chômage, pourquoi entrer dans la démagogie de la baisse du chômage des cadres sans baisser les cotisations afférentes ? Idem pour la taxation des contrats courts que les employeurs publics affectionnent… sans être taxés.

Le « revenu universel d'activité » ne serait pas plafonné alors que le cumul des aides actuelles représente 100 milliards pour quelle incitation ? Un plafond à 100% du SMIC donnerait plus de 3 milliards d'économies par an.

Côté impôts, les 5 milliards de baisse de l'impôt sur le revenu des ménages seront financés par un report de charges sur des entreprises déjà surtaxées en leur supprimant des niches parfois essentielles. Alors que nos entreprises sont déjà les plus taxées d'Europe. Jouer au bonneteau fiscal entre les ménages et les entreprises n'est pas la solution.

Par ailleurs, l'inclusion du changement climatique à l'article 1er de la Constitution risque bel et bien de nous faire revivre le « principe de précaution » débouchant sur une aggravation de la fiscalité verte alors même que notre fiscalité énergétique n'a rien à envier aux autres pays européens (2,2% de PIB quand l'Allemagne est à 1,9%).

Les ambitions de transformation du modèle économique semblent (pour l'heure) remisées alors même que rien n'a été réglé en matière de compétitivité. Encore un effort, le quinquennat n'est pas fini. L'essentiel des réformes est devant nous.

Cette tribune a été publiée dans les Echos, le lundi 17 juin 2019.