Assises de la simplification : une mesure de la Fondation iFRAP retenue
Frédéric LEFEBVRE, secrétaire d'État chargé des Petites et moyennes entreprises a présidé vendredi dernier les Assises de la simplification aux côtés de Jean-Luc WARSMANN et Jean-Michel AULAS. Le secrétaire d'État a annoncé un plan comprenant 80 mesures dont certaines seront effectives dés l'été 2011. La mesure 37 "Evaluer le temps nécessaire pour renseigner les enquêtes statistiques" reprend une proposition défendue par la Fondation iFRAP.
Evaluer le temps nécessaire pour renseigner les enquêtes statistiques
Aujourd'hui, seules 9 enquêtes de la statistique publique posent aux entreprises la question de savoir combien de temps elles ont mis pour remplir le questionnaire.
Difficulté exprimée par les entrepreneurs : Absence de quantification du temps nécessaire pour remplir un questionnaire
L'absence de mesure du temps passé à renseigner un questionnaire par les entreprises empêche toute régulation précise de la charge générée par les enquêtes publiques. Connaître le temps réel nécessaire pour remplir un questionnaire permettrait de gérer le volume des enquêtes, leur fréquence et leur complexité.
La simplification mise en œuvre : Recueillir pour chaque questionnaire des informations sur le temps nécessaire pour le remplir
A partir du 1er janvier 2012, tout questionnaire d'une enquête relevant de la statistique publique comportera une évaluation du temps prévu pour y répondre et une case où l'entreprise pourra renseigner de manière facultative le temps réellement passé. Lorsqu'une entreprise déclarera une durée anormalement élevée pour remplir des questionnaires, un enquêteur pourra sonder l'entreprise pour en déterminer les raisons. L'objectif est de réduire le temps passé par les entreprises à remplir ces questionnaires.
Le rapport annuel du Comité national d'information statistique (Cnis) rendra compte annuellement du coût estimé des enquêtes émanant d'organismes publics.
Simplification des normes : les comités d'évaluation en Europe
Dans le cadre de la simplification du droit, le rapport du sénateur Bernard Saugey [1] mettait en évidence en 2007 la croissance en 16 ans de près de 6,6% du nombre de lois et de 40% du nombre de règlements en France. Mais cette suractivité normative n'est pas l'apanage de notre pays [2] et touche en réalité l'ensemble des pays développés, chacun tentant de répondre à ce défit de complexité avec des moyens adaptés. Là où la France se distingue, c'est pour le moment par son approche institutionnelle du problème : Propositions de lois du président de la Commission des lois de l'Assemblée nationale Jean-Luc Warsmann, pour la simplification du droit, mais aussi Assises de la simplification tenues le 29 avril 2011 à l'initiative du secrétaire d'État aux PME Frédéric Lefebvre.
Ce qui distingue l'approche des autres pays Européens, c'est d'avoir mis en place des comités indépendants d'évaluation des normes, après avoir audité comme en Hollande le coût de la complexité normative pour les entreprises et les particuliers (environ 5% du PIB dans le cas Hollandais) [3]. Petite revue de détail :
L'ancêtre américain (US) : l'OIRA (Office of Information and Regulatory Affairs) a été mis en place en 1980, afin d'évaluer le coût juridique et économique des règlements produits par l'exécutif (500 à 700/an ayant un impact supérieur à 100 millions $).
Aux Pays-Bas, l'organisme indépendant ACTAL (Dutch Adisory Board on Administrative Burden) a pour mission depuis le 1er mai 2000 de faire baisser les coûts administratifs et réglementaires pour les particuliers et les entreprises. Il effectue à dessein une évaluation du stock de normes et de la production normative annuelle (y compris produite par les collectivités locales). Son but, réduire par vagues annuelles de 25% le coût des dispositifs imposés aux personnes physiques et morales. En 2009, les réductions de coûts s'élevaient pour les entreprises à 1,017 milliard d'€, l'objectif étant d'obtenir des réductions supplémentaires de 1,293 milliard.
En Allemagne, sur le modèle hollandais, la Grande coalition (CDU/SPD) a mis en place le NKR (Nationaler Normenkontrollrat) constitué en organisme indépendant (19 septembre 2006) pour une durée de 5 ans. Lui aussi vise une cible de réduction de 25% des coûts, mais peut proposer de sa propre initiative la mise en place de réformes d'allègement des coûts. Par ailleurs le NKR s'intéresse également à évaluer les coûts normatifs inter-administrations.
C'est sur ce modèle, mais avec des compétences un peu moins étendues, qu'a été constitué le 15 mai 2008, le Regelrådet (Swedish Better Regulation Council) suédois dont la particularité est de rendre ses études d'impact dans un délai de 2 semaines.
Enfin en Grande-Bretagne la question de l'amélioration ne date pas d'hier [4]. Depuis 2009, le Regulatory Policy Committee mis en place par Cameron, a procédé à des études d'impact ex-ante et noté leurs insuffisances. Le NAO se chargeant des études d'impact ex-post et du contrôle de la valeur des études d'impact rendues par le comité [5].
Samuel-Frédéric Servière
[1] Rapport n°36 déposé le 17 octobre 2007, dans le cadre de la première lecture au Sénat de la loi n°2007-1787 du 20 décembre 2007 relative à la simplification du droit. En substance : passage de 7.500 lois à 8.000 lois et de 100.000 à 140.000 décrets.
[2] Relevons que la France a adopté une première démarche concrète d'évaluation avec le Comité d'évaluation des normes, adossé au CFL (Comité des finances locales), mais son activité est uniquement concentrée sur l'impact de l'activité normative de l'État en direction des collectivités territoriales.
[3] En France, depuis le 1er septembre 2009, en vertu de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, tout projet de loi est muni d'une étude d'impact, malheureusement cette étude n'est ni contradictoire, ni indépendante, ni obligatoirement chiffrée, ni centrée sur le coût pour les services publics et les administrés. Précisons que l'approche hollandaise inclut également le coût des déclarations et obligations fiscales, ce que ne fait pas encore l'approche française. En ce sens elle vise à réduire « l'impôt papier » des particuliers comme des entreprises ».
[4] Puisqu'elle est récurrente depuis 1997 avec l'initiative de Tony Blair d'une Better Regulation Task Force, évoluant le 1er janvier 2006 en Better Regulation Commission.
[5] Exemple donné très récemment par le rapport du NAO, Assessing the Impact of Proposed New Policies, 1er juillet 2010. Celui-ci relève que sur 50 études d'impact analysées, seulement 28% parvenaient à atteindre pleinement les standards imposés (Better Regulation Executive's Guidance), 50% présentaient des défaillances, 10% sans évaluation des coûts et bénéfices, mais 86% avec une évaluation claire des coûts de la seule option retenue, et 60% avec chiffrage des bénéfices attendus.