Think tanks, l’anti-virus des dépenses publiques
Nous savons depuis longtemps qu’il n’y a aucun antidote dans les démocraties modernes contre le virus du marché politique, hors des think tanks.
Identifié par James Buchanan, prix Nobel 1986, le virus du marché politique est la possibilité donnée dans les démocraties à un petit groupe de prendre un ou deux euros dans la poche de beaucoup, ce qui à l’échelle d’un pays fait énormément d’argent, pour les mettre dans les poches de quelques-uns, en l’occurrence eux-mêmes, en s’engageant dans une campagne au nom de l’intérêt général.
Ce petit groupe est aisément repérable : il est usuellement constitué d’un politicien, d’un homme des médias et d’un fonctionnaire. Le politicien voit dans cette campagne la chance de faire parler de lui, le journaliste de promouvoir son média et lui-même, et le fonctionnaire la chance de créer une nouvelle action publique, augmentant ses services et le budget qui lui est confié.
Contre ce virus, il n’existe aucune défense naturelle des démocraties, permettant d’alerter sur la présence du virus, encore moins de le détruire.
Il y a trop d’asymétrie entre le fleuve d’argent que ce virus fait déferler sur quelques-uns et l’économie de quelques euros que peut espérer un contribuable en dénonçant la manœuvre.
Le seul remède connu est de supprimer cette asymétrie avec des think tanks ; ils cassent l’asymétrie en proposant aux victimes individuelles du virus de se regrouper, pour payer quelques- uns, les chercheurs du think tank, qui vont révéler le virus et organiser des campagnes publiques permettant de le détruire.
Une des campagnes les plus exemplaires de l’iFRAP a été ainsi de détruire le virus du CNAC, le Conseil National de l’Art Culinaire, un virus qui prélevait 10 millions de francs pour défendre l’art culinaire français.
Qu’objecter à la défense de l‘art culinaire ? Une enquête d’un an a démontré qu’un million était bien dépensé à réunir et archiver des grandes recettes de cuisine mais que les 9 millions restants étaient dépensés à payer les bureaux, chauffeur et voiture du président, et payer les gueuletons à buts politiciens des ministres qui arrosaient l’association. Mais il a fallu près d’un an de travail d’une chercheuse talentueuse pour dénoncer l’arnaque.
La plus grande partie de nos dépenses publiques tombe dans cette catégorie ; si la France se distingue par le haut niveau de ses dépenses publiques, c’est que nous souffrons d’avoir dix fois moins de think tanks que les anglo-saxons, en particulier les Britanniques. On oublie parfois que le succès de David Cameron est en grande partie dû aux think tanks qui l’ont conseillé pour la constitution de son programme avant 2010 et pendant ses 5 ans comme Premier ministre.
Une comparaison avec les Britanniques montre en effet qu’il y a environ 10 fois plus de moyens et de personnel dans les think tanks britanniques que dans les think tanks français.
C’est au nom de la protection de la sécurité, de la santé, du développement économique, de la francophonie, etc. et pas seulement de l’art culinaire, que se sont développés les myriades de fuites d’argent public qui, comme du temps des aqueducs de Rome, viennent vider les tuyaux de l’argent public avant que cette eau ne parvienne aux bons destinataires.
L’un des virus les plus pernicieux est le virus de l’égalitarisme dont le prophète est Thomas Piketty. Il tente de redonner une légitimité à toute une bureaucratie qui vit de la redistribution de l’argent public, soi-disant des plus riches aux plus pauvres, en réalité vers la bureaucratie elle-même[1].
Que Thomas Piketty soit un imposteur statistique comme nous l’avions montré dans les Echos et un certain nombre de publications postérieures, serait en soi sans grand intérêt si Thomas Piketty ne s’attaquait pas à ce qui a été le moteur de l’innovation industrielle et du progrès matériel depuis le XIXème siècle, donc de l’emploi : l’entreprenariat.
Mais préservé du chômage par son statut de professeur, n’ayant jamais intégré dans sa conception économique de la société le coût du risque entrepreneurial, il est conduit, au nom de la lutte contre les inégalités, à faire prospérer la forme suprême des inégalités, le chômage.
C’est ce virus qu’il faut dénoncer autant en montrant les impostures statistiques ou la vacuité des modèles économiques sur lesquels il s’appuie, qu’en faisant prendre conscience que 90% des riches qu’il attaque sont des individus nés pas riches ou dont les parents n’étaient pas riches, et qui le sont devenus par l’entreprenariat ; ils ont créé ainsi des dizaines de millions d’emplois qui soulèvent la toile de tous ceux qui sont pauvres en leur donnant du travail.
C’est l’objet du colloque que j’ai organisé à la Maison de la Chimie le 15 juin de 17 à 20 heures : www.weezevent.com/imposture-piketty.
Sortir de la crise qui traîne en Europe comme aux USA, c’est dénoncer les impostures de Thomas Piketty en mettant en place les politiques publiques qui intègrent que les riches ne sont pas la cause du chômage mais sa solution.
[1] Nous avions montré dans Les Profiteurs de l’Etat (Plon 2001) qu’il arrive aux pauvres français deux fois moins qu’aux pauvres américains pour un prélèvement presque double sur les riches et que la différence, soit environ 11% du PIB, est dérivée vers la fonction publique. Ceci n’aurait guère évolué d’après nos dernières enquêtes.