Comptes publics 2024 : un déficit à -5,8% du PIB et une dette à 113%

L’INSEE vient de publier en mars une première mise à jour de l’exécution des comptes publics pour 2024. Moins mauvais qu’attendu, le déficit public s’établirait à -5,8% du PIB contre -6,1% anticipé précédemment. Côté dette publique, celle-ci s’établirait à 113% du PIB soit +3,2 points en 1 an et occasionnant une charge de la dette provisoire (hors SIFIM) de 58 Md€ contre 50,6 Md€ en 2023 soit +14,6%. Si le solde public est meilleur qu’attendu la mécanique de hausse des taux d’intérêt qui se diffuse lors du refinancement de la dette française fait des dégâts, tandis que les principaux points de dérapage de dépenses sont désormais transparents : il s’agit des administrations publiques locales (+13,9 Md€ entre 2023 et 2024) et les administrations de sécurité sociale (+40,3 Md€ sur un an), loin devant les ODAC (+0,3 Md€) et l’Etat (+3,5 Md€). Cette mauvaise maîtrise des dépenses se vérifie au niveau global avec +31,8 Md€ par rapport au PLF 2024. La même chose s’observe au niveau des recettes avec -11,8 Md€ en exécution par rapport au PLF 2024, et même -40 Md€ s’agissant des prélèvements obligatoires. Bref un « effet ciseaux » s’observe par rapport aux prévisions initiales, obligeant à une grande rigueur en exécution, ce qui ne se vérifie pas aux niveaux des APUL et des ASSO (responsables de 86,3% des augmentations de dépenses publiques et de 76,7% des écarts par rapport aux prévisions).
En 2024 le déficit se creuse de 1,4 point et la dette augmente de 3,2 points de PIB par rapport à l’estimation initiale :
Le Gouvernement se félicite d’une exécution du déficit public 2024 (-5,8% du PIB) meilleure qu’attendue (-6,1% du PIB dans le PSMT 2025). Il atteindrait désormais -169,6 Milliards d’euros. Une performance qu’il faut toutefois relativiser immédiatement dans la mesure où il était anticipé initialement en PLF 2024 à -4,4% du PIB (-129 Md€), soit un écart de prévision de près de 40,6 milliards d’euros.
2023 | Var Md€/% | 2024 | Var Md€/% | Var Md€ | |||||
Md€/% PIB | PLF 2023 | INSEE mars 2024 | INSEE mars 2025 | PLF 2023-INSEE mars 2025 | PLF 2024 | PSMT 2025 | INSEE mars 2025 | PLF 2024-INSEE mars 2025 | 2023-2024 INSEE 2025 |
Niveau du PIB | 2 763 | 2803,1 | 2826,5 | 63,5 | 2 931 | 2 921 | 2925,6 | -5,4 | 99,1 |
Total des dépenses % | 57,2 | 57,3 | 56,9 | -0,3 | 55,9 | 57,4 | 57,1 | 1,2 | 0,2 |
Total des dépenses Md€ | 1580,4 | 1 607,4 | 1607,4 | 27,0 | 1638,4 | 1676,7 | 1670,2 | 31,8 | 62,8 |
Total des recettes % | 52,2 | 51,8 | 51,5 | -0,7 | 51,6 | 51,3 | 51,3 | -0,3 | -0,2 |
Total des recettes Md€ | 1442,3 | 1 453,4 | 1455,7 | 13,4 | 1512,4 | 1498,5 | 1500,6 | -11,8 | 44,9 |
Besoin de financement % | -5,0 | -5,5 | -5,4 | -0,4 | -4,4 | -6,1 | -5,8 | -1,4 | -0,4 |
Besoin de financement Md€ | -138,15 | -154,0 | -151,7 | -13,6 | -129,0 | -178,2 | -169,6 | -40,6 | -17,9 |
Dette publique % du PIB | 111,2 | 110,6 | 109,8 | -1,4 | 109,7 | 112,9 | 113 | 3,3 | 3,2 |
Dette publique en niveau | 3072,5 | 3 101,2 | 3 102,6 | 30,1 | 3215,3 | 3297,8 | 3305,3 | 90,0 | 202,7 |
Sources : RESF, PSMT, rapports de la commission des finances de l’Assemblée nationale, INSEE et calculs Fondation iFRAP mars 2025.
Cet écart de prévision a plusieurs causes qu’il faut hiérarchiser : des dépenses publiques en augmentation de +31,8 milliards d’euros par rapport au prévisionnel initial, et des recettes en baisse de -11,8 milliards d’euros également. La dérive du solde public s’explique donc aux ¾ par une mauvaise maîtrise des dépenses publiques et pour ¼ par une mauvaise anticipation des recettes. Une situation qui se répète d’ailleurs au niveau des dépenses, depuis 2 ans avec déjà une dérive un peu moins marquée de +27 milliards d’euros en 2023, tandis que les recettes elles étaient alors en augmentation par rapport à la prévision initiale de +13,4 milliards d’euros, couvrant ainsi la moitié de l’augmentation des dépenses.
S’agissant de l’évolution de la dette publique, celle-ci s’établit à 113% du PIB soit 3.305,3 Md€. C’est 3,3 points de plus que la prévision initiale et en niveau de +90 Md€. En revanche, ce qui est plus inquiétant c’est l’accroissement de la vitesse de cette hausse nominale :
Source : INSEE, mars 2025
Après la hausse liée à la crise Covid en 2020 de l’endettement publique (et donc de la variation de cet endettement), et une rapide décrue jusqu’en 2022, on constate désormais une accélération à nouveau liée non pas à un effet « boule de neige » qui serait encore contenu comme l’indique le PSMT même corrigé en exécution[1], mais à un écart encore persistant entre le solde public et son niveau stabilisant[2] soit -3,7% du PIB environ, soit 2,1 points minimum, le reste s’expliquant par des flux de créance (soit près de 1 point). Un phénomène qui devrait persister jusqu’en 2029, sauf effets inverses liées à des opérations financières (cessions d’actifs financiers etc.).
Une hausse des dépenses publiques en 2024 de +62,8 Milliards d’euros par rapport à 2023 :
Si l’on considère maintenant les dépenses publiques (y.c. crédits d’impôts), celles-ci augmentent en 2024 de +62,8 Md€ par rapport à 2023 ce qui représente un quasi-doublement par rapport à la prévision initiale (+31,8 Md€). Elles atteignent en exécution 1.670 milliards d’euros.
2023 | Var Md€ | 2024 | Var Md€ | Var Md€ | |||||
En Md€ | PLF 2023 | INSEE mars 2024 | INSEE mars 2025 | PLF 2023-INSEE mars 2025 | PLF 2024 | PSMT 2025 | INSEE mars 2025 | PLF 2024-INSEE mars 2025 | 2023-2024 INSEE 2025 |
Niveau du PIB | 2 763 | 2803,1 | 2826,5 | 63,5 | 2 931 | 2 921 | 2925,6 | -5,4 | 99,1 |
Total des dépenses Md€ | 1580,4 | 1 607,4 | 1607,4 | 27,0 | 1638,4 | 1676,7 | 1670,2 | 31,8 | 62,8 |
Rémunération des salariés | 337,1 | 346,2 | 346,3 | 9,2 | 357,6 | 362,2 | 362,1 | 4,5 | 15,8 |
Consommations intermédiaires | 140,9 | 157,5 | 159,9 | 19,0 | 149,5 | 163,6 | 163,4 | 13,9 | 3,5 |
Dépenses d'intérêts | 44,2 | 50,1 | 50,6 | 6,4 | 55,7 | 61,3 | 58,0 | 2,3 | 7,4 |
Prestations et transferts sociaux | 696,3 | 709,9 | 708,5 | 12,2 | 735,7 | 747,8 | 747,6 | 11,9 | 39,1 |
Subventions | 88,4 | 343,7 | 342,1 | -19,9 | 61,6 | 58,4 | 339,1 | -0,9 | -3,0 |
Autres - dont investissements | 273,5 | 278,4 | 283,3 |
Sources : RESF, PSMT, rapports de la commission des finances de l’Assemblée nationale, INSEE et calculs Fondation iFRAP mars 2025.
Première cause de dérive, les prestations et transferts sociaux qui augmentent de +39,1 milliards d’euros en 2024 par rapport à 2023 et de +11,9 Md€ par rapport à la prévision initiale. Comme l’indique l’INSEE : « les prestations sociales contribuent à plus de 60% à la hausse de la dépense publique (…). Cette augmentation est en grande partie portée par les revalorisations des prestations indexées sur la forte inflation de 2023 » et au premier chef les dépenses de retraites soit +24,8 Md€ par rapport à 2023[3]. Le reste des prestations augmentant de +14,3 Md€ sur un an, dont les dépenses au titre du chômage (+2 milliards d’euros), mais aussi les prestations santé (+7 Md€[4]), le reste étant porté par les revalorisations des minima sociaux intervenant le 1er avril (RSA, prestations familiale, AAH etc.) pour un montant de +5,3 Md€ par rapport à 2023.
Seconde cause de dérive, l’augmentation des rémunérations des agents publics. Celle-ci est liée aux extensions en année pleine des mesures générales et catégorielles de revalorisation intervenue le 1er juillet 2023, ainsi que l’ajout de 5 points supplémentaires par indice majoré au 1er janvier 2024. Il s’en suit une dynamique des rémunérations de +4,6% en 2024 comme en 2023, soit +15,8 Md€ dont +4,5 Md par rapport au prévisionnel. Ce dernier point s’expliquant en partie également par l’octroi de primes catégorielles et des effectifs « un peu plus dynamiques que les années précédentes. »
Troisième cause de dérive, la charge de la dette publique, exécutée en 2024 à 58 Md€, soit +7,4 milliards d’euros par rapport à 2023 et surtout par rapport à la prévision initiale +2,3 Md€.
Enfin le montant des consommations intermédiaires (achats, consomptibles etc.), clairement sous-budgétisées en PLF 2024, puisque si l’écart par rapport à 2023 en lien avec l’inflation atteint +3,5 milliards d’euros, en revanche leur utilisation par rapport au PLF 2024 est de +13,9 Md€ soit +9,3% par rapport à la prévision initiale.
Les subventions et les investissements au contraire participent au freinage de la dépense publique soit -3 Md€ par rapport à 2023, en ligne avec la programmation initiale (-0,9 Md€ par rapport au PLF 2024).
Des recettes publiques en baisses par rapport au prévisionnel, liée uniquement aux P.O. :
Les recettes publiques augmentent globalement de 44,9 Md€ entre 2023 et 2024 pour atteindre 1.500,6 Md€. Cependant par rapport au prévisionnel initial, elles sont en baisse en niveau de près de 11,8 Md€. Une mauvaise performance qui repose intégralement sur une mauvaise estimation initiale des prélèvements obligatoires[5].
2023 | Var Md€ | 2024 | Var Md€ | Var Md€ | |||||
En Md€ | PLF 2023 | INSEE mars 2024 | INSEE mars 2025 | PLF 2023-INSEE mars 2025 | PLF 2024 | PSMT 2025 | INSEE mars 2025 | PLF 2024-INSEE mars 2025 | 2023-2024 INSEE 2025 |
Niveau du PIB | 2 763 | 2803,1 | 2826,5 | 63,5 | 2 931 | 2 921 | 2925,6 | -5,4 | 99,1 |
Total des recettes % | 52,2 | 51,8 | 51,5 | -0,7 | 51,6 | 51,3 | 51,3 | -0,3 | -0,2 |
Total des recettes Md€ | 1442,3 | 1 453,4 | 1455,7 | 13,4 | 1512,4 | 1498,5 | 1500,6 | -11,8 | 44,9 |
dont prélèvements obligatoires | 44,7 | 43,5 | 43,2 | -1,5 | 44,1 | 42,8 | 42,8 | -1,3 | -0,4 |
dont prélèvements obligatoires | 1 234,2 | 1 218,4 | 1221,05 | -13,2 | 1 292 | 1 250,0 | 1252,16 | -39,8 | 31,1 |
Impôts sur la production et les importations | 469,7 | 443,5 | 446,6 | -23,1 | 466,0 | 455,7 | 453,7 | -12,3 | 7,1 |
Impôts courants sur le revenu, le patrimoine | 348,1 | 357,3 | 357,1 | 9,0 | 389,8 | 368,0 | 366,0 | -23,8 | 8,9 |
Cotisations sociales | 464,2 | 462,3 | 462,5 | -1,7 | 486,5 | 482,0 | 482,2 | -4,3 | 19,7 |
Autres recettes courantes | 124,3 | 190,3 | 189,5 | 29,2 | 134,8 | 169,4 | 198,7 | 28,7 | 9,2 |
Impôts sur le capital | 16,6 | 20,5 | 20,4 | ||||||
Autres recettes en capital | 19,3 | 14,7 | 5,8 |
Sources : RESF, PSMT, rapports de la commission des finances de l’Assemblée nationale, INSEE et calculs Fondation iFRAP mars 2025.
En effet, ceux-ci présentent un écart de -39,8 Milliards d’euros entre l’exécution 2024 et le PLF 2024. Un écart cependant 3 fois plus important que celui présenté l’année précédente (-13,2 Md€), ce qui attire l’attention sur le besoin de moderniser les modèles de prévision. Le détail par impôt des variations n’est pas encore connu, mais le gros des écarts est porté par deux catégories d’impôts, les impôts sur la production et les importations (-12,3 Md€ par rapport au prévisionnel) et surtout les impôts courants sur le revenu et le patrimoine (-23,8 Md€). Le chômage augmentant légèrement, les cotisations sociales sont également en baisse (-4,3 Md€ par rapport au prévisionnel).
Certains secteurs des administrations publiques « en roue libre » :
Si maintenant on présente les soldes des administrations publiques 2023 et 2024 en fonction des niveaux d’administrations et la contribution en recettes et dépenses à leur formation, il est plus aisé de discerner (bien que nous n’ayons pas avant mai 2025 les montants de P.O. associés) les secteurs où la dépense a été bien pilotée en exécution et ceux où ce pilotage est soit difficile (cas des départements par exemple avec les AIS (allocations individuelles de solidarité) soit quasi-inexistant (ASSO, avec notamment le pilotage de l’ONDAM par exemple).
2023 | Var Md€ | 2024 | Var Md€ | Var Md€ | |||||
Non consolidés des flux entre APU Md€ | PLF 2023 | INSEE mars 2024 | INSEE mars 2025 | PLF 2023-INSEE mars 2025 | PLF 2024 | PSMT 2025 | INSEE mars 2025 | PLF 2024-INSEE mars 2025 | 2023-2024 INSEE 2025 |
Etat - Solde | -155,8 | -155,3 | -151,9 | 3,9 | -140,3 | -151,9 | -152,3 | -12,0 | -0,4 |
Dépenses | 625,0 | 598,0 | 597,0 | -28,0 | 615,1 | 595,1 | 600,5 | -14,5 | 3,5 |
Recettes | 469,2 | 442,7 | 445,1 | -24,1 | 474,8 | 443,2 | 448,2 | -26,5 | 3,1 |
ODAC - Solde | -5 | -1,6 | -1,8 | 3,2 | -3,4 | -5 | -1,8 | 1,6 | 0,0 |
Dépenses | 107,8 | 136,9 | 138,7 | 31,0 | 117,24 | 146,1 | 139,1 | 21,8 | 0,3 |
Recettes | 102,2 | 135,3 | 136,9 | 34,7 | 113,84 | 141,1 | 137,3 | 23,4 | 0,4 |
APUL - Solde | 1,5 | -9,9 | -9,5 | -11,0 | -2,6 | -20,6 | -16,7 | -14,1 | -7,2 |
Dépenses | 303,7 | 315,4 | 315,7 | 12,0 | 320,7 | 335,0 | 329,7 | 8,9 | 13,9 |
Recettes | 305,2 | 305,5 | 306,2 | 1,0 | 318,1 | 314,4 | 312,9 | -5,2 | 6,7 |
ASSO - Solde | 21,1 | 12,9 | 11,5 | -9,6 | 17,3 | -0,6 | 1,3 | -16,0 | -10,2 |
Dépenses | 721,5 | 734,9 | 736,5 | 15,0 | 761,3 | 776,4 | 776,8 | 15,5 | 40,3 |
Recettes | 742,6 | 747,8 | 748,0 | 5,4 | 778,6 | 775,7 | 778,1 | -0,5 | 30,1 |
Solde public | -138,2 | -154,0 | -151,7 | -13,6 | -129,0 | -178,2 | -169,6 | -40,6 | -17,9 |
Sources : RESF, PSMT, rapports de la commission des finances de l’Assemblée nationale, INSEE et calculs Fondation iFRAP mars 2025.
Pour la comparaison entre les PLF 2023/2024 et l’exécution 2023 et 2024 des difficultés méthodologiques existent s’agissant des secteurs de l’Etat et des ODAC où l’on assiste à des jeux de transferts. Ces derniers sont liés au passage de la base comptable 2014 à la base 2020 en comptabilité nationale. Pour ces deux secteurs, nous regarderons plutôt les évolutions intervenues entre 2023 et 2024 en exécution (puisque les bases sont les mêmes). Pour les autres secteurs la démarche de confrontation du prévisionnel à son exécution reste pertinente.
S’agissant du solde de l’Etat celui-ci semble « bien tenu » avec une déviation minime entre 2023 et 2024 aboutissant à une détérioration de 0,4 milliard d’euros. Cela est en particulier lié à une augmentation des dépenses de 3,5 Md€ non compensée intégralement par une appréciation des recettes (+3,1 Md€) suffisante. Le budget de l’Etat « centralisant » une partie des déficits des autres niveaux d’administration, la performance n’est pas mauvaise. Elle ne permet cependant pas de participer à une meilleure consolidation budgétaire au niveau global.
Sur le champ des opérateurs, le solde n’évolue pas non plus, affichant toujours un déficit de -1,8 Md d’euros. Les opérateurs apparaissent donc comme « neutres » sur 2 ans, leurs dépenses compensant leurs recettes – en revanche, ils ne participent pas non plus activement à la réduction des déficits publics – ce que l’on peut regretter.
En revanche les collectivités territoriales (APUL au sens large avec leurs propres opérateurs) affichent une augmentation des dépenses entre 2023 et 2024 de près de 14 milliards d’euros dont +9 milliards par rapport à la prévision initiale en lois de finances. L’écart par rapport à la prévision est plus faible que l’année précédente (+12 Md€), mais très conséquent. Comme vient de le montrer le député Jean-René Cazeneuve dans un rapport préliminaire établit avec le concours de la DGFiP[6], les dépenses des collectivités ont crû de +4,5% l’an passé, soit 2,5 points de plus que l’inflation et 3,3 points de plus que la hausse des dépenses de l’Etat. Résultat (et malgré des départements aux finances dans le rouge) leur solde déficitaire se creuse de 7,2 milliards d’euros en 2024 par rapport à 2023 à -14,1 milliards d’euros. L’absence de contractualisation de type « pacte de Cahors » ou de mécanisme impactant leurs recettes ne permet pas de les faire contribuer efficacement au redressement des finances publiques. Une conférence sur le sujet sera réunie à Bercy en avril.
Enfin s’agissant des administrations de sécurité sociale, leurs dépenses augmentent de +40,3 Md€ en 1 an, représentant un écart à la prévision initiale désormais constant depuis 2 ans soit +15 Md€ environ chaque année. Comme leurs recettes publiques fléchissent également (-0,5 Md€ par rapport au prévisionnel) sous le poids de la baisse des cotisations sociales (-4,3 Md€ par rapport au prévisionnel), le solde des ASSO est désormais excédentaire de seulement +1,3 Md€, ce qui compte tenu des excédents techniques de la CADES de 16 Md€, aboutit à un déficit des ASSO hors CADES de près de -14,7 milliards d’euros en 2024 faisant suite à un déficit de -6,9 Mds€ soit un quasi-doublement.
Sans mesures de régulations supplémentaires (désindexation des retraites, mesures paramétriques d’âge et/ou de durée de cotisation, régulation tous azimut des dépenses d’assurance-maladie et de consommation de soins (hors ALD) etc.), le pilotage des dépenses des ASSO semble déjà « hors de contrôle ».
Conclusion :
Ce premier balayage de l’exécution des finances publiques 2024 par l’INSEE montre bien que la consolidation de nos finances publiques en 2024 a été très limitée et centrée essentiellement sur l’Etat et sur ses opérateurs. Pour améliorer significativement le solde budgétaire et parvenir à juguler rapidement l’augmentation de la charge de notre dette publique en atteignant le solde stabilisant puis une situation d’excédent primaire il importe que l’effort de redressement de nos finances publiques soit partagé et piloté à tous les niveaux d’administration et singulièrement en y associant les administrations publiques locales et de sécurité sociale. Sur 62,8 milliards d’euros d’augmentation des dépenses publiques entre 2023 et 2024, elles en représentent 54,2 milliards soit 86,3%. Au sein des écarts par rapport au prévisionnel initial, elles en représentent 76,7% (24,4 milliards d’euros de dérives sur un total de 31,8 Md€) en 2024. Chercher des économies sur l’Etat et les opérateurs ne suffira pas pour les compenser.
Côté recettes et en leurs sein les P.O., les écarts de prévision sont également très significatifs puisqu’ils atteignent près de 39,8 Md€ (~40 Md€), ce qui doit conduire à une mise à jour drastique des modèles de prévision. Cet effet est en tout cas heureusement atténué par le dynamique des recettes non fiscales (+28 Md€). Il nous semble important que ces estimations en recettes et en dépenses et leur crédibilité puissent faire l’objet d’un chiffrage indépendant et contradictoire par le Haut Conseil des finances publiques afin d’en limiter la survenance.
[1] PSMT 2025, p. 68. Notons qu’un effet « boule de neige » causé par le différentiel entre la croissance nominale (croissance en volume + déflateur de PIB) et la hausse des taux d’intérêts (en lien avec la politique monétaire de la BCE).
[2] Voir rapport spécial sur la dette publique annexé au PLF 2025, p. 5.
[3] Leur augmentation atteint +6,9% en 2024 par rapport à 2023, dont une revalorisation des pensions de base de +5,3% au 1er janvier 2024.
[4] Dont +5 milliards liés au remboursement de la « santé marchande » (consultations, médicaments) soit +4,3% par rapport à l’année précédente, +1,3 Md€ pour les indemnités journalières (+6,3%), et les prestations incapacité et invalidité +0,7 Md€ (+5,4%).
[5] https://www.lefigaro.fr/conjoncture/derapage-des-deficits-les-deputes-se-dechirent-sur-les-responsabilites-20250327
[6] Voir en particulier le rapport, Situation financière des collectivités territoriales, Bilan 2024, publié le 26 mars 2025. Consulter également https://x.com/jrcazeneuve/status/1904821032466215318, ainsi que https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/les-depenses-des-collectivites-locales-progressent-beaucoup-plus-vite-que-celles-de-letat-2156269 et https://www.lopinion.fr/economie/la-situation-financiere-des-collectivites-locales-nest-pas-si-noire