Plus de représentativité, moins de violence ?
Après une élection qui n'aura pas passionné les foules, on peut s'attendre à ce que les mécontentements se manifestent plus que jamais dans la rue. Une conviction transcende largement le clivage gauche/droite ou province/Paris : nous aurons des mouvements sociaux très puissants et ce, quels que soient le gouvernement et la majorité au pouvoir.
Cette tribune a été publiée dans les pages des Echos, le lundi 11 avril 2022. |
Face à l'inflation, face à l'impuissance publique, face au sentiment de ne pas participer aux décisions, il nous faut éviter que la colère l'emporte et entraîne avec elle notre économie, nos entreprises, dans une période de turbulences où se jouent la crédibilité de la France mais aussi notre démocratie. Cette colère est toujours à fleur de peau dans le pays. La raison ? L'impasse dans laquelle se trouve notre modèle social en raison du poids de l'impôt, des gaspillages, du fait que beaucoup de nos concitoyens remarquent qu'ils ne gagnent pas plus, en étant indépendants ou en travaillant plus de 35 heures par semaine, que ceux qui cumulent des aides sans charge fiscale.
L'équilibre des pouvoirs, aujourd'hui, n'est pas respecté
Il serait délétère que le prochain quinquennat reparte sur une période de fausse représentativité en multipliant les conventions citoyennes tirées au sort, comme celle sur le climat, avec, à la clé, des décisions publiques impactant notre économie, notre industrie et notre souveraineté énergétique dans la plus grande incertitude. Le tout sans que le Parlement ait son mot à dire ou puisse juger vraiment de l'impact de ces mesures, faute d'études dignes de ce nom.
Notre démocratie repose sur l'équilibre entre les pouvoirs législatif, exécutif et l'autorité judiciaire. Cet équilibre doit être respecté. Pendant le quinquennat écoulé, nous avons pu voir que l'influence du Parlement a souvent été réduite à la portion congrue, l'exécutif le court-circuitant au maximum (sur la crise sanitaire, les mesures « gilets jaunes », l'emballement de la dette, etc.), malgré la réforme de 2008 qui consacre pourtant le rôle d'évaluation des politiques publiques de nos parlementaires.
Le Printemps de l'évaluation institué par la commission des Finances de l'Assemblée nationale en 2018 puis la loi de modernisation de la gestion des finances publiques ne vont pas assez loin.
Il faut doter le Parlement d'un organe d'audit indépendant
Pour redonner son lustre au Parlement et un véritable pouvoir pour peser dans le débat public, il est temps de le doter d'un organe d'audit indépendant et interparlementaire avec le détachement de personnels de l'Insee, devenu autorité administrative indépendante. Cet organe d'audit pourrait non seulement produire des études sur les politiques publiques, mais également procéder à l'évaluation des normes pour les entreprises et les particuliers à l'instar du Conseil national d'évaluation des normes pour les collectivités territoriales. Il pourrait enfin produire pour nos représentants des analyses contradictoires des études d'impact des projets de loi et réaliser celles des propositions de loi.
A l'appui de ce Parlement renforcé, des questions par référendum devraient être posées aux Français, dans une logique de vraie démocratie participative institutionnelle. Réforme des retraites, réforme de la fonction publique, mise en place de prestations sociales « à la source », frein à l'endettement constitutionnel, réforme et adaptation du modèle éducatif et social, les Français devront être associés aux choix essentiels pour notre avenir.
Il nous faut donc, en même temps, un Parlement plus fort et plus éclairé et des concitoyens associés aux grandes décisions de la prochaine législature. C'est la condition sine qua non pour que leurs expressions ne se fassent pas dans la rue, dans la violence et le chaos.