Les pauvres ont plus besoin des riches que de l'Etat
C'est le retour du match qui va nous occuper vraisemblablement pendant des mois. Le match des riches et des pauvres. La même semaine a vu monter le sujet du million de pauvres supplémentaire et celui de l'augmentation des dividendes perçus par les ménages.
Cette tribune a été publiée dans les pages des Echos, le 12 octobre 2020. |
Les deux sujets n'ont rien à voir ? Ils ont pourtant tout pour faire un bon amalgame comme on les pratique en France : « les pauvres sont plus pauvres et les riches sont plus riches ». Et de conclure qu' « il faudrait plus de dépenses sociales » immanquablement suivi de « et taxer plus les riches ».
Un tableau catastrophique
Rappelons quelques évidences : la France dépense déjà plus que tous les pays au monde en dépenses sociales. Nous avons plus de 125 milliards d'euros d'aides sociales versées par an sous condition de ressources. Nous sommes déjà au maximum du maximum du modèle social.
La branche famille qui gère le RSA est en déficit de plus de 3 milliards d'euros… L'augmentation de 100 euros du RSA que réclament les associations coûterait 2,4 milliards. C'est infinançable. Les départements qui sont en première ligne le savent bien. Ils doivent aussi faire face aux dépenses en plus pour les Ehpad ou les mineurs isolés.
La pauvreté qui monte avec ses « nouveaux pauvres » est une catastrophe mais elle est plus grave encore en France car nous avons plus confiné, plus arrêté notre économie et plus misé sur le chômage partiel. Environ 3 points de plus de récession par rapport à l'Allemagne et un chômage qui se profile à plus de 10 % (contre 4 % outre-Rhin).
L'emploi, l'emploi, l'emploi
Il est temps de se réveiller. Plus on continuera à surréagir, à ajouter des contraintes sanitaires, à encourager le télétravail massif, plus les personnes les plus précaires risquent de tomber dans la pauvreté.
La vague du chômage qui arrive sur nous peut encore être réduite en faisant le choix de l'économie. La clé est de privilégier la continuité du travail sur site. Les bureaux, les centres-villes, les restaurants et les commerces doivent pouvoir continuer à vivre…
Le premier outil de lutte contre la pauvreté c'est l'emploi, l'emploi, l'emploi. Et pour créer des emplois, il faut des investissements dans des entreprises en France. Des entreprises qui réussissent, et donc… versent des dividendes à leurs actionnaires.
Phénomène de rattrapage
Ce qui nous amène à ces fameux riches qui « se sont enrichis » parce que les dividendes versés sont passés de 14 milliards à 23 milliards d'euros. Précisons que l'on parle de chiffres de revenus en 2018 mais pas en 2020, année pour laquelle ces dividendes ont énormément baissé et n'ont souvent pas été distribués. D'où vient l'augmentation en 2018 ?
Les dividendes avaient été bloqués mécaniquement par la réforme Hollande de la barémisation des revenus du capital. Les taux marginaux effectifs d'imposition pouvaient atteindre 100 % sur certains contribuables les plus aisés. On est donc dans un phénomène de rattrapage après l'allègement d'une fiscalité confiscatoire.
L'étude récente de France Stratégie montre d'ailleurs que les ménages qui se trouvaient dans les 0,1 % les plus riches en 2017 ne sont que 50 % à y être encore en 2018 et que, parmi eux, ceux qui sont dans les 0,01 % ont vu leurs revenus baisser d'environ 20 % ! Il y a quelque chose de malsain dans notre acharnement à regarder les 0,1 % (38.000 foyers), voire les 0,01 % (3.800 foyers) à la loupe en pensant naïvement que ce sont toujours les mêmes. Beaucoup de ménages qui entrent une année dans ces catégories en sortent rapidement…
Réjouissons-nous, ils sont un peu moins nombreux à partir de France pour des raisons de fiscalité confiscatoire, mais jusqu'à quand ? Le débat public doit gagner en qualité. Nous avons besoin d'investisseurs dans les entreprises, d'emplois et de dividendes, c'est comme cela que l'on combat la pauvreté.