Le « toujours plus d'argent public » qui arrose les quartiers prioritaires est contre-productif
En 2020, la Cour des comptes chiffrait à 10 milliards d'euros les dépenses consacrées annuellement par l'État à la politique de la ville. À cela, il faut ajouter les dépenses du programme national de rénovation urbaine : environ 600 millions d'euros par an supplémentaires. Malheureusement, il n'y a pas de chiffrage global pour l'ensemble des administrations publiques, notamment par les collectivités locales.
Cette tribune a été publiée dans les pages de la Tribune, dimanche 17 juillet 2023. |
Néanmoins, on peut considérer que, depuis le début des années 2000, ce sont plus de 150 milliards d'euros qui ont été dépensés pour la politique de la ville. La France compte 1.514 quartiers prioritaires avec 5,4 millions d'habitants (dans 859 communes) dans lesquels le taux de chômage des femmes est de 16,5 % et de 19,6 % pour les hommes (moyenne nationale à 7,1 %). 75% de ces quartiers sont constitués de logements sociaux. Et aux milliards de la politique de la ville, il faut ajouter une partie du coût des minima sociaux comme le RSA et les APL car un habitant sur cinq des quartiers prioritaires est bénéficiaire du RSA.
Est-ce que cela fonctionne ? Non, car l'essentiel a été oublié : le travail. Quoi qu'on en dise une école, ce n'est pas gratuit, une médiathèque ne se finance pas toute seule, pas plus que les aides sociales. Derrière tous les services publics et la générosité de notre système de protection sociale, il y a des ménages et des entreprises qui paient des impôts, des taxes et des cotisations sociales.
Dans le nord de l'Europe, la place centrale du travail n'a pas été oubliée et un nombre important de nos voisins européens subordonnent aides sociales et indemnités chômage à la recherche active d'un emploi. Nous en sommes loin et, à force d'oublier que le mot droit va avec le mot devoir, nous avons laissé se développer l'idée que tout est dû gratuitement et qu'on peut cumuler aides et travail non déclaré en toute impunité.
Le « toujours plus d'argent public » des politiques de la ville et de la politique sociale qui arrosent les quartiers prioritaires de la ville est largement contre-productif. Les émeutes récurrentes, de plus en plus violentes, avec pillages, vols, attaques ciblées sur les forces de l'ordre en sont la preuve tangible. Les chiffres de ces derniers jours ? 2.508 bâtiments incendiés, 105 mairies incendiées ou dégradées, 168 écoles objets d'attaques et plus de 12 000 véhicules incendiés. Pour le pays qui dépense proportionnellement à sa richesse nationale, le plus en dépenses et logements sociaux, ça fait mal.
Au lieu d'arroser de milliards, il serait urgent de doper la responsabilité sociale : cela impliquerait de priver en partie de RSA, d'allocations logements ou d'allocations sociales en général les pillards et leurs familles s'ils sont mineurs, à hauteur de 50%. Au Royaume-Uni, les membres d'une famille au comportement antisocial grave peuvent perdre leurs allocations. Les économies faites grâce à ce mécanisme « pilleurs-payeurs » permettraient d'alimenter des caisses de réparations. S'il faut rebâtir les écoles, les mairies et les transports rapidement, les installations culturelles et sportives détruites devraient l'être sur option en fonction des fonds récupérés sur les aides sociales non versées aux familles des casseurs.
La loi française de 2010 (supprimée ensuite par le gouvernement de François Hollande) qui supprimait les allocations familiales en cas d'absentéisme scolaire avait été validée par le Conseil constitutionnel. Aucune raison qu'une loi supprimant tout ou partie des aides sociales, voire les logements sociaux aux familles de casseurs mineurs et majeurs, dont les méfaits vont coûter aux assureurs au moins 650 millions d'euros pour les dégâts sur les entreprises et les biens des particuliers, et des centaines de millions aussi en bâtiments et transports publics non assurés, soit retoquée. Cela ferait réaliser à ces derniers la valeur réelle des choses et surtout que l'argent public ne tombe pas du ciel. Que c'est notre argent.