Imposition à 75% des riches : Hollande en mode confiscatoire
Après la note de la semaine dernière comparant le projet fiscal de François Hollande avec la législation actuelle, nous poursuivons en examinant les conséquences de l'introduction d'une tranche supplémentaire d'IR à 75% pour des revenus imposables supérieurs à un million d'euros, selon la proposition du candidat socialiste. Le projet est intenable.
La semaine dernière, nous avons publié le tableau de l'imposition des revenus des capitaux mobiliers en comparant la fiscalité existante avec celle que le candidat socialiste nous promettait. Depuis, ce même candidat annonce une tranche supplémentaire d'IR à 75% pour la part des revenus imposables dépassant un million d'euros. Par ailleurs, nous nous rappelons que le même programme annonçait aussi la volonté de soumettre dans tous les cas les revenus du capital au barème de l'IR au même taux que les revenus du travail.
Nous avons donc procédé à une nouvelle simulation sur la base d'une tranche marginale à 75%, toutes choses restant égales par ailleurs excepté que notre contribuable dispose par hypothèse d'un revenu du travail taxable de 1 million, auquel s'ajoute un revenu provenant d'une participation rapportant 53.333 euros de dividendes après prise en compte de l'IS à un taux de 33 1/3 %, ou d'intérêts déductibles des résultats de la société de 80.000 euros.
Cas typique de l'individu talentueux récemment promu à un poste de direction fortement rémunéré : rémunération supérieure à 1 million d'euros, mais patrimoine (2 millions) produisant des revenus relativement faibles ; à l'opposé du profil de l'héritier : forts revenus mais capital important.
Nous considérons ces revenus du capital comme marginaux et donc taxés à 75%.
Voici les nouveaux calculs de l'imposition promise par François Hollande.
Nous ne nous trouvons plus cette fois en face d'une fiscalité très élevée, mais en face d'une fiscalité à ce point absurde qu'elle se nie elle-même. En ce qui concerne les valeurs à revenu fixe, la spoliation totale est acquise avant même de considérer la perte sur le capital. Quant aux dividendes, la fiscalité atteint exactement 100%. Dans tous les cas de figure, il est évident que tous les épargnants fortunés feront une croix sur les investissements dans les entreprises. Ce sera tant pis pour l'économie française, et tant pis pour l'État aussi, car ce dernier ne récoltera aucun impôt provenant de revenus destinés à être purement et simplement confisqués : les patrimoines iront s'investir ailleurs, ou leur détenteur ira s'établir ailleurs. La seule certitude est que cette réforme confortera davantage les fraudeurs dans leur démarche. Triste résultat d'une politique dont la seule motivation est la suppression des riches.
On peut évidemment penser qu'une politique aussi absurde ne verra pas le jour. L'annonce a d'ailleurs déstabilisé la gauche, à en croire le bafouillage incrédule que nous a réservé Jérôme Cahuzac, président socialiste de la Commission des Finances à l'annonce de cette nouveauté imprévue et si évidemment électoraliste de son candidat. Mais de telles annonces aggravent d'ores et déjà les dégâts en précipitant les mesures que prennent les plus fortunés pour échapper à la spoliation. Et si d'aventure la menace se réalisait, on peut seulement espérer que le retour à une politique moins catastrophique s'imposerait bien plus vite encore que sous le premier septennat de François Mitterrand, car aucun moderne Pierre Mauroy n'aurait, cette fois, même le temps de penser que « les indicateurs sont au vert ».
[*Dernière minute*]
Il semblerait qu'une fois de plus la doctrine du candidat socialiste évolue. Cette fois, c'est l'imposition à 75% des revenus qui paraît devenir la doxa. En contrepartie, et puisque les revenus du capital devraient être taxés comme ceux du travail, les prélèvements sociaux seraient abaissés de 13,5% à 8%. D'autre part, il n'aurait selon Michel Sapin « jamais été question » de supprimer l'abattement de 40% sur les dividendes. Les économistes qui ont tous fait leurs calculs sur l'hypothèse de la suppression de cet abattement, à partir de la prétention de faire rentrer 4,5 milliards de plus d'impôts dans les caisses de l'Etat, se seraient donc tous trompés… !
Le problème de l'imposition des dividendes, c'est celui d'une triple imposition : celle de l'IS, compensée par l'abattement de 40% (ex avoir fiscal), les prélèvements sociaux, qui sont non déductibles, sauf pour 5,1%, de l'assiette de l'IR (il y a donc impôt sur impôt), et l'IR lui-même. Mais si la tranche marginale de l'IR passe à 75%, et même en admettant que l'abattement de 40% subsiste, les dividendes supporteront de toutes façons une imposition totale de 75% plus 8% (ou 2,9% si l'on suppose que l'on maintienne une déductibilité de la CSG à hauteur de 5,1%). Autrement dit ce sera 83% ou 77,9%. Un peu moins confiscatoire que 100%, mais guère. Et tout aussi mauvais pour l'économie et pour les finances de l'Etat, la volaille contribuable n'acceptant pas davantage de se faire plumer.
Tout ceci a encore le temps d'évoluer de nombreuses fois, mais que d'impréparation au gré des brillantes idées du candidat socialiste ! Le tout dans le plus parfait mépris du contribuable que ces volte-face continuelles empêchent de faire le moindre pronostic sérieux sur la gestion de ses ressources.