Finances publiques : l’année 2023 s’annonce périlleuse
Avec une croissance atone et des taux qui montent sur la dette, l’année 2023 est l’année de tous les dangers. L’Agence Standard & Poor’s a mis la note de la France sous surveillance négative et anticipe une croissance de seulement 0,2 %. Soit… beaucoup moins que ce qui est prévu dans le budget 2023 par le gouvernement qui a chiffré toutes ses prévisions budgétaires avec une croissance 2023 à… 1 %.
Cette tribune a été publiée sur l'Express, mercredi 11 janvier. A voir, en cliquant ici. |
Loin de ces préoccupations, l’exécutif a fait voter au Parlement des dépenses en augmentation de 49 milliards d’euros par rapport à 2022. Résultat : le déficit public se creuse en 2023 de 5,7 milliards par rapport à 2022… et la dette publique augmente encore de 124 milliards pour atteindre 3072 milliards. Ces chiffres – déjà très mauvais - sont malheureusement meilleurs que ce qui va se passer réellement puisque le FMI et l’Agence S & P anticipent, tous les deux, un déficit public supérieur à 5 % du PIB en 2023 pour la France… et une dette qui dépasserait les 112 % dès 2024. Toute la trajectoire de désendettement serait alors anéantie.
Le risque d’une croissance nulle, voire d’une légère récession, est grand : dans ce cas de figure, le déficit public prévu pour 2023 ne serait plus de 138 milliards… mais d’environ 153 milliards en cas d’une croissance nulle, voire 160 milliards avec une récession de -0,5 %… Ce manque d’anticipation de notre exécutif aurait aussi bien évidemment un impact sur l’emploi avec un taux de chômage à 7,7 % (si croissance nulle), voire 8 % dans le cas d’une récession à -0,5 %… loin des 7,2 % prévus par le gouvernement.
De son côté, la charge budgétaire de la dette de l’Etat est déjà passée de 35 milliards en 2020 à 51 milliards en 2022 et pourrait bientôt tutoyer les 70 milliards d’euros par an, soit 16 milliards de plus que le budget de l’Education nationale. Avec de l’inflation mais pas de croissance, ces sommes vont devenir très difficiles à financer. Un véritable iceberg budgétaire. L’année 2023 est d’autant plus l’année de tous les dangers que nous avons toujours un besoin de financement total des administrations publiques d’environ 330 milliards d’euros cette année. Une somme gigantesque que nous risquons d’avoir de plus en plus de mal à financer à taux bas eu égard au fait que les Allemands et les Italiens vont émettre aussi beaucoup de dette cette année.
Est-il déjà trop tard ?
Il faut le dire clairement ici : au-dessus de taux d’intérêt à 3 %, la réforme des retraites devient critique pour éviter les dépréciations de la note de la France en cascade. A 4 %, les hausses d’impôts en urgence seraient la seule option pour réduire le déficit. Et ce alors même que nous n’avons jamais autant payé de taxes et impôts (45,2 % du PIB en 2022), que nos entreprises souffrent - surtout dans l’industrie et l’artisanat - comme jamais de la hausse des prix de l’énergie et ne savent pas comment elles vont rembourser leurs prêts garantis par l’Etat accordés durant la pandémie.
Depuis le Covid, aucune marge de manœuvre n’a été préservée, toutes les latitudes financières ont été consommées par la politique du "quoi qu’il en coûte". Et nous n’avons plus de trajectoire budgétaire faute de majorité au Parlement. La France avance donc dans un épais brouillard financier.
"Le moment est venu d’engager à nouveau le rétablissement de nos finances publiques", vient de dire le ministre de l’Economie Bruno Le Maire tout en annonçant le lancement d’une "revue des dépenses publiques" dès le mois de janvier. Les prochains mois nous diront s’il n’était pas déjà trop tard. Espérons qu’avec une vraie réforme des retraites et un plan de redressement de nos finances publiques, nous éviterons l’iceberg.