Dette publique : 2 798 milliards en 2021
Le projet de loi de finances 2021 estime le montant de la dette publique française en 2021 à 2.798 milliards d’euros. Il s’agit bien entendu d’une première hypothèse qui sera révisée en cours de gestion à mesure du développement de la crise. Elle représenterait désormais 116,2% du PIB en 2021 après un pic en 2020 de 117,5% soit 2.612 milliards d’euros.
Une explosion de la dette publique en 2020 suivie d’une contraction en 2021
| 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 |
---|---|---|---|---|---|
Dette publique (% du PIB) | 98,3 | 98,7 | 98,1 | 117,5 | 116,2 |
Dette publique en valeur | 2258,1 | 2330,0 | 2379,6 | 2612,0 | 2797,9 |
Sources : PLF 2021, INSEE, calculs Fondation iFRAP septembre 2020.
Cette évolution tient tant de l’augmentation inédite des déficits publics que de l’effet « volume » lié à l’effondrement du PIB. Concrètement, l’endettement aura crû de 232,4 milliards d’euros en 2020 et croîtrait de 185,8 milliards supplémentaires en 2021.
Sources : INSEE, PLF 2021
Si l’on cherche à répartir les effets sur le niveau de la dette publique de l’effondrement du PIB en 2020 (-10% en volume et -8,4% en valeur) puis à son rebond en 2021 (+8% en volume et +8,3% en valeur), ainsi qu’à la variation autonome de l’endettement (lié au financement du déficit public et à l’effet stock/flux), la répartition serait la suivante :
En pts de PIB et en milliards d'euros | 2020 | 2021 | ||
---|---|---|---|---|
Variation de l’endettement (N-N-1) | 19,4 | 470,6 | -1,3 | -31,3 |
Variation de l’encours nominal | 9,6 | 232,4 | 8,4 | 185,8 |
Effet "PIB" | 9,8 | 238,2 | -9,7 | -217,1 |
Sources : INSEE, PLF 2021, calculs Fondation iFRAP septembre 2020
Que l’on soit en 2020 ou en 2021, l’effet « PIB » dépasserait la simple augmentation de l’endettement (+9,8% contre +9,6% et -9,7% contre +8,4%). En clair d’un côté, en 2020 l’effondrement du PIB est plus rapide que le creusement des déficits publics (liés à la contraction des recettes publiques et à l’augmentation des dépenses pour faire face à la crise) ; de l’autre, en 2021 le rebond « technique » de 8,3% de la croissance du PIB en valeur, permettrait de faire baisser la dette de -9,7 points de PIB, tandis que l’augmentation des encours de dette publique ne représenterait que 8,4% du PIB, d’où une baisse de la dette dans le PIB 2021 de -1,3%[1].
Le financement de l’Etat
Le déficit budgétaire de l’Etat s’établirait à -152,8 milliards d’euros (en comptabilité budgétaire) en 2021 après un solde estimé pour 2020 à -195,2 milliards d’euros[2]. Celui-ci différerait de celui présenté dans le tableau de financement à la suite de retraitements en 2020 (et non en 2021) effectués pour passer du déficit budgétaire au déficit à financer (qui comporte des opérations de trésorerie supplémentaires[3] non explicitées).
| 2019 | 2020 LFI | 2020 PLF 2021 | 2021 | Variation 2019-2020 | Variation 2020-2021 |
---|---|---|---|---|---|---|
Amortissement de la dette à moyen et long terme | 130,2 | 136,4 | 136,1 | 128,1 | 5,9 | -8 |
dont amortissement de la dette à moyen et long terme (nominal) | 128,9 | 130,5 | 130,5 | 127,3 | 1,6 | -3,2 |
dont supplément d'indexation versé à l'échéance (titres indexés) | 1,3 | 5,9 | 5,6 | 0,8 | 4,3 | -4,8 |
Amortissements des autres dettes | 0 | 0,5 | 0,5 | 0 | 0,5 | -0,5 |
SNCF Réseau - amortissements |
| 1,8 | 1,7 | 1,3 | 1,7 | -0,4 |
Déficit à financer | 92,7 | 93,1 | 206 | 152,8 | 113,3 | -53,2 |
Autres besoins de trésorerie | -2,4 | -1,3 | 0,4 | 0,1 | 2,8 | -0,3 |
Besoin de financement Total | 220,5 | 230,5 | 344,7 | 282,3 | 124,2 | -62,4 |
Emission de dette à moyen et long termes nette des rachats | 200 | 205 | 260 | 260 | 60 | 0 |
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement | 0 | 2 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Variation nette de l'encours des titres d'Etat à court terme | -6 | 10 | 42,8 | 18,8 | 48,8 | -24 |
Variation des dépots des correspondants | 11,5 | 6,4 | 10,9 | 0 | -0,6 | -10,9 |
Variation des disponibilités du Trésor | -5,7 | 3,6 | 11 | 0 | 16,7 | -11 |
Autres ressources de trésorerie | 20,6 | 3,5 | 20 | 3,5 | -0,6 | -16,5 |
Ressources de financement Total | 220,5 | 230,5 | 344,7 | 282,3 | 124,2 | -62,4 |
Sources : PLF 2021, Présentation AFT[4].
A l’heure actuelle le plafond d’endettement n’est pas encore connu s’agissant de la dette négociable de l’Etat. Toutefois, la dette négociable de l’Etat s’établissant pour 2019 à 1.823 milliards d’euros[5], le plafond de la variation nette de dette négociable de l’Etat d’une durée supérieure à un an devrait s’établir en 2020 à +129,5 milliards d’euros[6] et à +132,7 milliards pour 2021, ce qui pourrait porter l’encours de dette négociable à près de 2.085,2 milliards d’euros (hors variation de BTF (inférieurs à un an) non encore connue).
L’augmentation ponctuelle de l’encours de BTF (bons du trésor de maturité inférieure à 1 an) devrait baisser significativement en 2021 et passer de 42,8 milliards en 2020 à 18,8 milliards.
Par contre on observe la présentation d’une ligne du tableau de financement « ressources affectées à la caisse de la dette publique », ce qui pourrait laisser penser à un premier effort de cantonnement de l’endettement public avec la mise en place de recettes spécifiquement fléchées pour amortir la dette publique.
Malgré un besoin de financement toujours important, la charge de la dette de l’Etat devrait légèrement remonter en 2021. En effet, la charge de la dette s’établirait à 36,4 milliards pour le budget de l’Etat en comptabilité budgétaire, et 37,1 milliards en réintégrant le refinancement de la dette SNCF réseau reprise par l’Etat. Une montée en puissance par rapport à 2020 où elle s’établirait à 36,6 milliards d’euros. En comptabilité nationale toutefois le coût de la dette tangenterait en 2020 les 26 milliards d’euros, et serait quasiment stabilisée en 2021, malgré l’intégration de la remontée modérée des taux pour cause d’augmentation du volume d’émissions simultanées internationales sur le marché obligataire (Commission européenne, Allemagne, Hollande, etc.)
Conclusion
En l’absence des annexes budgétaires, les données relatives à la dette publique sont encore assez minces. Le niveau de la dette publique baisserait en % du PIB à cause de l’effet croissance attendu à 8,3% en valeur. S'il était plus faible que prévu, le poids de la dette dans le PIB ne pourrait être contenu. Par ailleurs la politique des taux de la BCE, couplée à l’effet primes nettes des décotes, devrait permettre de contenir la charge de la dette sur le plan budgétaire et de la maintenir sous les 27 milliards en comptabilité nationale. La présentation réalisée par le Trésor devant les investisseurs du tableau de financement de l’Etat laisse apparaître une ligne relative à la caisse de l’amortissement de la dette publique, ce qui pourrait conduire à la mise en place d’un amortissement spécifique et d’un cantonnement de la « dette publique Covid », ce qui n’est pas pour autant abordé dans le texte du PLF 2021. Enfin, l'endettement est limité parce que le solde public est "amélioré" grâce aux financements européens accordés en subvention à la France (soit près de 40 milliards dans le cadre de son plan de relance de 740 milliards) dont près de 17 milliards d'euros pour 2021. Ces financements amoindrissent significativement la dégradation du solde public lié au plan de relance national de 100 milliards. Cette limitation joue mécaniquement à rebours sur le besoin de financement et donc sur le niveau général d'endettement.
| 2020 | 2021 | Total |
---|---|---|---|
Coût des mesures de relance en comptabilité nationale | 0,2 | 1,6 | 1,8 |
Financement de l'UE en droits constatés |
| 0,7 | 0,7 |
Effet net sur le solde public de la France | -0,2 | -0,8 | -1 |
Source : AFT, PLF 2021
[1] Cette analyse est symétrique et complémentaire à celle permettant d’identifier que le solde effectif à -6,7% du PIB en 2021 serait au-dessus du solde stabilisant de la dette de 2,3 points de PIB (soit -9%) permettant un désendettement théorique de -2,3% du PIB mais contrebalancé par un flux de créance de sens contraire (effet stock/flux) augmentant la dette de 1% du PIB).
[2] PLF 2021, dossier de Presse, p. 13, https://www.economie.gouv.fr/projet-loi-de-finances-2021#
[3] Premiers éléments d’explicitation, voir Cour des comptes, NEB Gestion de dette et trésorerie de l’Etat exécution des comptes 2019, juin 2020, p.12 https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-04/NEB-2019-Gestion-dette-et-tresorerie-Etat.pdf#page=12
[4] https://www.aft.gouv.fr/files/medias-aft/2_Cadre%20budgetaire/1.Budget/1.1_PLF/Pr%C3%A9sentation%20PLF%202021%20_%20FR.PDF#page=32
[5] Voir le rapport Saint Martin relatif à la dette publique, juin 2020, p.43 http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_fin/l15b3124_rapport-information.pdf#page=43
[6] Loi de finances rectificative n°2020-935 du 30 juillet 2020 (3), voir https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000042176557/2020-09-04/. Le PLF 2021 n’apporte pas d’actualisation plus récente puisque les annexes budgétaires relatives à la Gestion de la dette et de la trésorerie de l’Etat et aux Engagements financiers de l’Etat, ne sont pas encore publiées.