Tribune

Déjà 92 milliards de déficit pour l’État en 2024, vers la crise de la dette ?

92 milliards de déficit public pour 2024 à fin avril… Et l’année est loin d’être finie. Même s’il y a un souci avec le logiciel de gestion de l’État (Chorus) dont la maintenance vient d’aboutir à sous-estimer la recette de TVA et des dépenses (notamment de personnel) dans une proportion encore difficile à mesurer. À combien allons-nous atterrir en fin d’année en termes de déficit ? Vraisemblablement entre 150 et 170 milliards d’euros si rien n’est fait pour baisser les dépenses. Avec la dissolution de l’Assemblée, nous rentrons dans une période particulièrement incertaine pour nos finances publiques. Les marchés ne s’y sont pas trompés et les taux sur les emprunts à 10 ans de la France commencent à grimper.

Cette tribune a été publiée dans les pages du JDD, le 13 juin 2024.

Nous sommes dans une année de tous les dangers pour nos budgets publics et 2025 ne sera pas meilleure. Cette année, il faut faire 20 milliards d’économies et, l’an prochain, 30 milliards. Et les élections législatives vont tomber pile au milieu de la période d’arbitrages sur le budget de l’an prochain. Dissoudre alors que, à l’Assemblée nationale, les parlementaires avaient lancé une commission d’enquête sur la dette et que plusieurs réformes étaient projetées : assurance chômage, fonction publique, audiovisuel public.

Bref, dissoudre alors que Matignon et Bercy cherchent à faire des économies ou à restaurer l’ordre républicain outre-mer. La crédibilité de la France sur les marchés va, quoi qu’il arrive, en pâtir et d’alourdir la charge de la dette. Si nous n’actons pas des économies, nous risquons des augmentations d’impôts ou des rabotages de niches fiscales ce qui revient au même – on entend déjà qu’il faut supprimer des aides aux entreprises alors que cela voudrait dire augmenter leurs impôts et charges.

30 milliards d’économies en 2025 c’est possible sur les dépenses d’arrêt maladie du privé mais aussi du public, sur la masse salariale, sur les aides sociales, sur les transports sanitaires ou sur les jours enfants malades des agents publics. Et, à l’horizon 2027, il faudra même trouver environ 70 milliards d’économies et là, ce ne seront plus des économies budgétaires sur le gel des dépenses mais des économies de réorganisation pour que nos services publics nous coûtent moins cher à produire : éducation, hôpitaux, collectivités, tout le monde devra participer avec des objectifs de bonne gestion, en clair ce que nous aurions dû déjà faire depuis longtemps et qu’aucun gouvernement en France n’a fait.

Nul ne sait quelle équipe gouvernementale, avec quelle majorité, va se retrouver aux commandes de la France après les élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet prochains mais ce gouvernement aura une tâche immense devant lui. Cela nécessitera en premier lieu un audit sérieux de l’ensemble des administrations publiques. Pour ensuite redresser les comptes sous peine de partir sur des terres inconnues pour la France en matière de finances publiques : retour à la procédure pour déficit excessif de la part de la Commission européenne et, au pire, aide du FMI…

Espérons que tous ceux qui souhaitent conserver ou arriver au pouvoir en juillet prochain ont bien compris la situation abyssale qui les attend. La crise de la dette risque bel et bien d’être devant nous.