Coût du 3ème confinement et du couvre-feu : 9 milliards par mois
A la suite des annonces du Premier ministre, Jean Castex, le jeudi 18 mars 2020, un nouveau confinement 7 jours/7 est décidé dans 16 départements recoupant les territoires de 4 anciennes régions d’avant la réforme de 2014 (Haute-Normandie, Picardie, Nord-Pas-de- Calais, Ile-de-France), ainsi que les Alpes Maritimes, soit 41,4% du PIB français. A ce 3ème confinement territorialisé s’ajoute un allègement du couvre-feu existant qui passe de 18h00 à 19h00 sur l’ensemble du territoire. Le gouvernement table indique-t-il sur une baisse du PIB annualisé de 0,2 point de PIB à la suite de ces mesures tout en affirmant maintenir sa prévision de croissance à 6% en 2021.
Une curieuse équation : couvre-feu n°2 = couvre-feu n°3 + confinement n°3
Le chiffrage des mesures annoncées par Bercy apparaît de la façon suivante d’après l’AFP : « l’impact des nouvelles restrictions sanitaires sur l’économie française est de 0,2 point de PIB annuel. Les mesures de soutien coûteront 1,2 milliard d’euros en plus par mois, soit 7,2 milliards d’euros en tout par mois. » Il faut donc comprendre que le confinement dans 16 départements (dont l’Ile-de-France) devrait coûter 1,2 milliard d’euros par mois, auquel s’ajouterait le coût du 3ème couvre-feu réhaussé de 18h à 19h, pour 6 milliards d’euros de mesures de soutien[1]/mois.
En clair, alors que le coût des mesures de soutien était évalué par Bercy en mars lors du couvre-feu n°2 (à 18h00) à 7,2 milliards d’euros dont 4 milliards en fonds de solidarité, 2,2 milliards en activité partielle et 1 milliard en exonérations, le nouveau couvre-feu n’en coûterait plus que 6 pour les finances publiques. Il y aura bien sûr la prise en compte du relèvement du plafond horaire du couvre-feu dans la baisse du coût et l’impact des mesures de confinement pour les 16 départements concernés représentant tout de même près de 42% du PIB national. Mais il y a surtout la sous-consommation de l’enveloppe mensuelle prévue notamment en matière d’activité partielle (1,5 milliard d’euros au lieu de 2 milliards/mois), ce qui autoriserait des redéploiements pour financer le confinement territorial…
Bercy chiffre donc le coût du confinement à 1,2 milliard d’euros supplémentaire pour les finances publiques en sus des 6 milliards d’euros préexistant en régime de croisière au titre du couvre-feu. Il y a donc redéploiement au sein de la même enveloppe de 7,2 milliards d’euros, au grand dam de certains commerçants. [2] Ces 1,2 milliard se répartissant en 600 millions destinés à compenser une partie de la perte d’activité imposée aux indépendants et aux petites entreprises, auxquels s’ajouteraient le coût spécifique du chômage partiel (+400 millions d’euros) et des exonérations de charges (+200 millions d’euros).
Mais ce n’est pas tout le coût du second confinement national pour les finances publiques qui était estimé à 10 milliards d’euros entre les 6 milliards de mesures de soutien et les 3 à 4 milliards de pertes de recettes fiscales et sociales[3], par mois. Ces pertes de recettes dont Bercy ne dit mot doivent néanmoins rester intégrées dans l’équation ce qui porterait le coût total entre 10 et 11 milliards d’euros pour les finances publiques.
Un impact de 0,2% du PIB ou de 0,4% ?
On peut estimer que la perte d’activité engendrée par le couvre-feu qui a perduré depuis le 16 janvier jusqu’au 19 mars 2021 a représenté une perte d’activité de 4%/mois. S’y ajoute une perte d’activité liée au 3ème confinement partiel qui doit représenter d’après nos calculs 0,14% du PIB/an (1,7% du PIB mensuel) avec un PIB des 16 territoires concernés représentant environ 41,37% du PIB national.
Coût total sur la durée\mois | Confinement 3 | Couvre-feu 3 | Total |
PIB en milliards | -3,3 | -5,9 | -9,2 |
Pertes emplois | -23 262 | -41 567 | -64 829 |
Pertes de recettes fiscales et sociales (Mds) | -1,20 | -2,60 | -3,80 |
Coût du chômage partiel (Mds) | 0,40 | 0,78 | 1,18 |
Source : Fondation iFRAP mars 2021
Les pertes de production s’établissent comme suit, -3,3 milliards pour cause de 3ème confinement localisé (soit 0,14% du PIB annuel) auxquelles s’ajoutent les -5,9 milliards de pertes de richesses liées au 3ème couvre-feu (0,24% du PIB annuel) en tenant compte de la neutralisation de son effet dans les zones confinées, soit un total de 9,2 milliards de pertes/mois. Cela représente donc environ -0,4 points de PIB annuel/mois (ou 11% de PIB mensuel/mois[4]).
[1] Voir l’article de J. Grandin de l’Eprevier et R. Legendre, Magie de Bercy, le nouveau confinement ne coûtera rien !, L’opinion, 19/03/2021, https://www.lopinion.fr/edition/economie/magie-bercy-nouveau-confinement-ne-coutera-rien-239586, , mais aussi, https://www.wansquare.com/012-31979-France-le-cout-du-troisieme-confinement.html?uid=da6743b2f4d915926b5524edd6c8dfaf
[2] Comme l’évoque le quotidien Libération, https://www.liberation.fr/economie/confinement-les-commercants-reclament-des-aides-supplementaires-20210319_O3XYT42EXJC3RNGMGKFCFEXULU/
[3] https://www.challenges.fr/france/le-vrai-cout-du-couvre-feu_748849
[4] Les montants affichés peuvent apparaître plus faibles que ceux que nous avions calculés dans la note d'octobre 2020 https://www.ifrap.org/etat-et-collectivites/cout-du-confinement-de-4-16-milliards-deurossemaine, mais celle-ci se basait sur un tendanciel 2020 sans crise. Désormais, les pertes d’activité doivent être intégrées en 2021 par rapport à un scénario 2020 déjà très fortement impacté (et en y intégrant nos propres hypothèses s’agissant du T4 2020 en attendant la publication des comptes trimestriels complets à partir du 26 mars 2021 par l’INSEE). Le montant de 0,4 point de PIB annuel/mois de perte est confirmé visiblement par Bercy, même si le ministère veut faire encore mieux en comptant sur l'adaptation progressive des acteurs économiques comme le montre Les Echos, https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/covid-le-cout-du-nouveau-confinement-sera-bien-moindre-quen-novembre-1299723