Tribune

Choc fiscal : la France replonge dans la facilité

Le gouvernement de Michel Barnier est dans une seringue. Pris en tenaille entre les agences de notation, la procédure pour déficit excessif de Bruxelles et le calendrier du vote du budget, déjà compliqué. A partir du 9 octobre, il ne restera que 83 jours pour qu'un budget soit adopté dans les conditions ultra-périlleuses que l'on connaît. Est-ce autant un blanc-seing pour se réfugier dans la facilité des hausses d'impôts ? La réponse est non. Au pays le plus taxé et le plus dépensier, il est tout à fait possible d'assurer 100 % du redressement des comptes en 2025 par des baisses de dépenses. La règle de deux tiers de baisses de dépenses et un tiers de hausses d'impôts est un piège qui risque de nous emmener vers de fausses économies et de vraies hausses d'impôts !

Cette tribune a été publiée dans les pages des Echos, le mercredi 2 octobre 2024.

Entrepreneurs découragés

Dans son discours de politique générale ce mardi, le Premier ministre Michel Barnier a annoncé un choc fiscal sur les hauts revenus et les entreprises sans, dit-il, remettre en cause leur compétitivité. Qu'il nous soit permis d'en douter : ces taxes risquent de n'avoir d'exceptionnel que le nom et d'impacter doublement la compétitivité. De fait, les hauts revenus sont aussi les entrepreneurs de ce pays que l'on risque de décourager avec une hausse de la contribution déjà « exceptionnelle » votée… il y a treize ans.

Qui peut imager qu'un choc fiscal à 18 milliards d'euros ne va pas impacter fortement l'économie de notre pays ? Ajouter une surtaxe de 8 milliards d'euros à l'impôt sur les sociétés (IS) ne pèsera pas que sur les grandes entreprises mais aussi sur les grosses PME exportatrices que sont nos ETI. Rogner de vraisemblablement 4 milliards d'euros les baisses de charges employeur augmentera le coût du travail. De quoi alourdir un peu plus le fardeau de celles qui assument déjà 157 milliards d'euros de plus de prélèvements obligatoires, par rapport à la moyenne de la zone euro.

Modèle social plaqué or

Combien de nos entreprises vont rentrer dans une grève larvée des embauches et des investissements ? Combien de nos hauts revenus vont réduire leurs activités pour ne pas se faire encore surtaxer ? Combien, découragés, vont partir de France, leurs activités économiques avec eux ? Combien de points de croissance vont nous coûter ces décisions qui vont à l'encontre de notre prospérité et de la création de valeur ajoutée ? Quand nous rendrons nous compte que ce n'est pas en augmentant toujours plus les impôts que l'ont fait rentrer des milliards dans nos caisses publiques pour financer notre modèle social plaqué or , dont autant la générosité que la mauvaise gestion sont de notoriété internationale ?

Nous avons aujourd'hui une occasion unique d'expliquer à nos concitoyens qu'il faut économiser sur les dépenses pour éviter que la France décroche encore plus. Peu de détails sur les économies dans le discours du Premier ministre. Où sont passées les propositions d'économies ? Fusion des opérateurs, nouveau pacte avec les collectivités locales et recentrage de l'apprentissage sont les rares pistes évoquées. Tout reste flou alors que les responsables publics de notre pays devraient être en train de rivaliser de propositions en la matière.

Geler les aides sociales

30 milliards d'économies d'urgence ? C'est possible d'y arriver pour 2025. En gelant les aides sociales, en décalant l'indexation des pensions en fin d'année, en gelant les rémunérations des agents publics, en baissant les dépenses d'aide au développement des pays étrangers, en baissant les dépenses sur les arrêts maladie dans le public et dans le privé… Attention, les décisions actuelles sont décisives pour notre avenir commun. Replonger dans l'addiction aux impôts et aux taxes, faire le choix du choc fiscal après les crises déjà encaissées, c'est prendre le risque de faire plonger la France encore plus bas.