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Audit des finances publiques : les premiers chiffres de la Fondation IFRAP

A l'approche du 2nd tour des élections législatives 2024, dans l'attente de la formation du prochain gouvernement, alors que la dette de la France dépasse les 3 000 milliards d'euros, que le déficit 2023 a dérapé à 5,5% du PIB et que la Commission européenne vient d'ouvrir la voie à une procédure pour déficit public excessif contre la France, la Fondation IFRAP a réalisé un audit de notre situation budgétaire dont les premiers éléments ont été publiés dans le numéro du Point du 3 juillet 2024

Pourquoi réaliser un audit des finances publiques ?

Avec cet audit, la Fondation propose une mise au point doublée d’une mise en garde au prochain gouvernement. Les chiffres montrent que l’on court tout droit vers une crise de la dette si l’on ne change pas de trajectoire. Avant même la dissolution du 9 juin, le danger était proche puisque 2023 a été une année de dérapage budgétaire massif : le déficit prévu à 4,4 % du PIB a été relevé, à la surprise générale, à 5,5 %, ce qui a conduit à l’annonce d'un plan d’économies par le gouvernement de G. Attal, mis en suspens avec la dissolution. La Commission européenne l'a bien compris, qui a ouvert, le 19 juin dernier, une procédure pour déficit public excessif contre la France qui peut conduire à des sanctions financières, notamment une amende de 3 à 5 milliards d’euros. 

Six autres pays sont visés par une procédure équivalente mais la France est devenue la lanterne rouge de l’Europe : en 2024, les prévisions de déficit public des pays de la zone le montrent très clairement. Si l’on ne réalise pas les 30 milliards d’euros d’économies qui étaient prévus pour 2025, notre déficit pourrait se situer autour de 5,6 % du PIB l’an prochain. 

Espérer redresser nos finances publiques en augmentant la fiscalité est une illusion : la France est déjà le pays qui taxe, et de très loin, le plus. En 2023, notre taux de prélèvements obligatoires s’établissait à 44,8 % du PIB contre 39,2 % dans le reste de la zone euro. Cet écart de taux de prélèvements obligatoires représente 158 milliards d'euros, principalement composé des impôts sur la production et les importations (124 milliards €) et des cotisations sociales effectives (39 milliards €).

La France ne doit pas miser sur l'Europe pour à l'avenir, encore une fois, sauver notre dette : en effet, pour se rassurer, certains estiment que les taux n’ont pas tellement augmenté depuis l’annonce de la dissolution mais c’est en partie grâce à la BCE, qui continue de racheter de la dette française sur le marché secondaire. La Banque centrale ne pourra pas le faire éternellement, dans des proportions de plus en plus importantes. La France pourrait mettre toute la zone euro dans une situation délicate, et une crise de la dette sur la France est un risque systémique : cela pourrait faire exploser la zone euro.

La Fondation IFRAP a alerté depuis la crise du Covid sur le cocktail explosif - inflation, remontée des taux, gestion laxiste des finances publiques à base de « quoi qu’il en coûte » – qui pourrait bien provoquer une augmentation brutale de la charge d'intérêts sur la dette publique, qui rendrait impossible le financement de nos services publics. Le risque ? Une intervention du FMI qui serait une humiliation pour notre pays. Ceux qui proposent de continuer à dépenser sans compter, livrent volontiers un discours anti-marchés. Mais l’accumulation de déficits publics et le gonflement de notre dette mettent justement la France dans les mains des marchés qu’ils font mine de honnir. Notre dépendance aux marchés et aux investisseurs étrangers (ils possèdent plus de 52 % de notre dette négociable) nous met dans une situation de dépendance terrible.

L'évolution des finances publiques depuis 2017

Sur le déficit public. En 2017, il représente 3,4 % du PIB, ce qui n'est pas très loin des exigences du traité de Maastricht. En 2023, on clôture l’année à 5,5 %. Très en dessous de nos partenaires européens. 

Sur la dette. En 2017, elle est de 98,5 % du PIB ; six ans plus tard, elle culmine autour de 111 % du PIB. Si l’on compare ces chiffres à ceux des autres pays de l’Union européenne, cette trajectoire fait de la France le pire élève de la classe. Notre dette a augmenté de près de 12 points en six ans, aucun pays n’a creusé la dette aussi rapidement que nous. 

Et les crises successives n'expliquent pas l'envolée de notre endettement. Les Pays-Bas ont vécu la crise du Covid comme nous, et leur niveau d’endettement s’est amélioré de 10 points depuis 2017. La France avait une dette de 2 262 milliards en 2017 ; six ans plus tard, elle culmine à 3 101 milliards. Soit 839 milliards de dette supplémentaire en six ans, dont seulement un tiers est lié aux crises (Covid, énergie, inflation). C’est la dépense sociale au sens large (Sécurité sociale, Unedic, etc.) qui fait largement déraper la dette. Elle représente, si l’on traite les données correctement, presque la moitié de son augmentation. Il faut s’atteler en priorité à faire baisser les dépenses sociales entre 2024 et 2027. 

Sur les dépenses publiques. Ces dernières restent à un niveau stratosphérique, bien loin du niveau des autres pays européens. Personne n’ose couper dans les dépenses. L’an dernier, elles représentaient 57 % du PIB, contre 49,4 % en moyenne dans l’Union européenne ! On est redescendus depuis le record de plus de 60 % atteint en 2020 en raison de la crise du Covid, mais pas assez… Et le problème qui est apparu en 2023, c’est que, l’inflation ralentissant, les recettes, notamment non fiscales, n’ont pas été aussi bonnes en volume qu’en 2022, tandis que les dépenses ont largement dérapé par rapport au vote initial, d’où le creusement du déficit public.