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Fabien Choné (Direct Énergie) et la fixation du prix de l'électricité

Fabien Choné est Directeur général délégué de Direct Énergie. Il répond aux questions de la Fondation iFRAP sur le développement de la concurrence sur le marché de l'électricité en Farnce. Le rapport qui avait été demandé à un expert reconnu, Paul Champsaur, a été remis au Gouvernement. Mais la décison fixant le prix auquel EDF devra vendre une partie de la production des centrales nucléaires françaises à ses concurrents a été suspendue pendant des mois. Elle vient seulement d'être prise en avril 2011. Le prix sera de 42 euros par Mwh.

Fondation iFRAP : Le Président d'EDF estime que le prix de revient de son entreprise est de 42 euros par Mwh. Certains de ses concurrents demandent 35 euros par Mwh. Quelle est la position de votre entreprise Direct Énergie ?

Fabien Choné, Direct Énergie : Le fait est que les tarifs réglementés actuels comprennent une part nucléaire représentant environ 35 €/MWh, sur un total d'une centaine d'euros facturée au consommateur en tenant compte des autres coûts : autres productions, acheminement, commercialisation, contribution au service public de l'électricité (CSPE). Mais il faut dire que cette valeur n'intègre pas le coût de la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires (ni bien sûr les éventuels surcoûts liés aux exigences accrues en matière de sûreté nucléaire depuis la catastrophe japonaise). Le Gouvernement a considéré qu'une tarification de l'électricité nucléaire à 42 €/MWh était nécessaire pour financer ces investissements (pour rappel, c'est déjà le prix payé par de nombreux industriels). Direct Énergie n'a pas de données sur ces coûts permettant de déterminer le bon prix à prendre en compte dans les tarifs pour assurer la prolongation, par ailleurs très souhaitable car très rentable, de la durée de vie des centrales (et pour augmenter éventuellement la sûreté). Ce prix nous paraît acceptable à condition que ce choix fasse l'objet d'une traduction le plus vite possible dans l'ensemble des tarifs réglementés, de façon à ce que la concurrence puisse s'exercer loyalement d'une part, mais aussi pour que tous les consommateurs participent à cet effort de réinvestissement d'autre part. Et durant la phase de transition, le produit nucléaire vendu et les conditions de mise en œuvre du dispositif doivent permettre aux concurrents d'EDF d'exister, ce à quoi le Gouvernement s'est engagé.

Fondation iFRAP : Il semble qu'un prix de 42 euros entraînerait automatiquement une augmentation des prix de 20 à 30% sur 5 ans pour le consommateur final. Cela vous semble-t-il exact ? L'électricité a-t-elle été maintenue à des niveaux insuffisants en France depuis des décennies ?

Fabien Choné, Direct Énergie : Il existe une très forte confusion sur la question de l'évolution des tarifs de l'électricité dans l'avenir. Si la part du nucléaire, aujourd'hui à 35 €/MWh rattrapait en 5 ans la valeur de 42 €/MWh, cela équivaudrait (toutes choses étant égales par ailleurs) à une augmentation de 7 €/MWh sur une facture d'une centaine d'euros, soit + 7% en 5 ans. Une telle augmentation, qui permettrait aux Français de bénéficier de l'avantage compétitif du parc nucléaire, qui représente aujourd'hui environ 30% à 40% par rapport à nos voisins allemands par exemple (et peut-être bien plus demain si le prix des énergies fossiles continuait à grimper) pendant 10 ans de plus, paraît tout à fait acceptable. Malheureusement, les autres composantes de la facture, et notamment, le coût d'utilisation des réseaux électriques qui nécessitent de lourds investissements, comme les charges liées à la politique française en faveur des énergies renouvelables, vont probablement augmenter également, ce qui pourrait en effet porter la hausse totale de la facture à plus de 20% sur les 5 prochaines années. Mais il est rigoureusement faux de dire que c'est strictement lié à ce choix de 42 €/MWh, qui au contraire doit permettre de maintenir sur le long terme la compétitivité du prix de l'électricité en France. Il est encore plus faux de dire que c'est lié à l'ouverture à la concurrence, qui elle, reste bien sûr source de productivité des opérateurs, et donc de modération tarifaire malgré le contexte structurellement haussier, mais aussi source d'innovations, et donc de potentiels de maîtrise de la facture des Français, non pas par le prix, mais aussi par les volumes consommés ou la puissance et l'offre tarifaire choisies !

Ceux qui entretiennent, avec malheureusement beaucoup de succès, cette confusion dans les médias, ont probablement des objectifs bien peu louables au regard de l'intérêt réel des consommateurs.

Fondation iFRAP : La fixation politique des prix de détails, et maintenant de prix de gros, de l'électricité a montré ses limites. Quels mécanismes proposez-vous pour l'avenir à moyen terme ? Et pour l'avenir à court terme pendant la phase de sortie du monopole ?

Fabien Choné, Direct Énergie : La politisation des tarifs n'est en effet pas une bonne solution. La loi NOME qui prévoit à moyen terme de confier à la Commission de régulation de l'énergie, autorité indépendante, le soin de calculer les tarifs réglementés, de gros comme de détail, constitue indéniablement un progrès. Il est impératif que cette transition se fasse sans entrave et le plus rapidement possible.

[(Fabien CHONÉ est Directeur général délégué à Direct Énergie. Diplômé de l'École Polytechnique et de l'École Nationale des Ponts & Chaussées, Fabien CHONE a exercé différentes fonctions durant 7 ans chez EDF au sein de la direction de la stratégie et de la direction aux régulations groupe. Il est également le président de l'Association nationale des opérateurs détaillants en Électricité. En 2003, il a fondé Direct Énergie avec Xavier CAÏTUCOLI et Thierry ROUSSEL.)]