2012 : le temps de reprendre le pouvoir sur l'Administration
On se souviendra du quinquennat 2007-2012 pour plusieurs réformes : le service minimum, l'autonomie des universités, la fin de la carte scolaire, une timide réforme de l'ISF, l'auto-entrepreneur, la réduction des effectifs publics de l'État, la transformation de la Poste en Société Anonyme, la création de Pôle emploi et du RSA, la transparence des comptes des syndicats et, peut-être, l'ouverture des données publiques…
On retiendra aussi quatre réformes majeures restées au milieu du gué :
Celle des collectivités qui ne règle rien de la question des doublons entre régions, départements et communes,
La réforme constitutionnelle censée redonner du pouvoir au Parlement en matière d'évaluation des politiques,
La "RGPP" ou révision générale des politiques publiques qui peine à réaliser des économies et occulte la question du périmètre de l'action publique,
Celle des retraites qui, en 2013, devra être remise sur la table pour enfin aborder la question de la convergence des systèmes public et privé.
On retiendra aussi une crise financière énorme et assez bien gérée suivie de la crise de la dette en Europe. Avec, en illustration, la très grande difficulté du gouvernement à parler aux Français de la situation budgétaire de la France. Pourquoi ne jamais prononcer le mot rigueur, pourquoi avoir peur du mot faillite ?
On retiendra d'abord de ce quinquennat l'espoir fou de vraies et rapides réformes et, très vite après, la reprise de pouvoir par l'Administration. Une administration qui répond à ses ministres, par exemple, qu'elle ne veut pas chiffrer leurs mesures politiques car elle est "contre"… C'est dès juillet 2007 que le président Nicolas Sarkozy expliquait : "Toutes les administrations d'État, tous les spécialistes, tous ceux qui ont perdu l'habitude au fond de se remettre en question pensent qu'il n'est pas possible de faire différemment et je dois développer avec le Premier ministre une force énorme pour dire aux ministres : attention, ne retombez pas dans les habitudes du passé, nous n'avons pas été élus pour gérer au fil de l'eau, nous avons été élus pour réformer la France."
Derrière l'envie de réformes, la France se singularise toujours par la peur d'aller jusqu'au bout comme dans la réforme des retraites. Toujours dans l'incapacité de remettre en question les prébendes des uns et des autres. La France reste le pays des sureffectifs publics non résorbés, des dépenses publiques disproportionnées, d'un code du travail trop rigide et nuisible aux nouvelles embauches et à l'emploi, d'un statut public obsolète, des grèves, de l'absentéisme, du manque de confiance en l'avenir. Un cocktail détonant qui nous a tous transformés en pessimistes drogués de la dépense publique.
Il est d'ailleurs miraculeux que seule l'agence de notation chinoise Dagong ait dégradé la note de notre dette. L'OCDE et la Commission européenne tirent toutefois toutes deux la sonnette d'alarme et soulignent que la France manque de lignes budgétaires clairement définies quant à la soutenabilité de son plan de réduction des déficits.
Deux questions majeures se posent pour le prochain quinquennat :
Comment réduire le rôle de la fonction publique, donner plus de place à la société civile et à l'initiative privée dans les politiques publiques ?
Comment redynamiser l'emploi dans le secteur privé ?
Pour répondre à ces questions qui nous concernent tous, il faudra penser en dehors de la boîte.
Le risque majeur des 5 prochaines années est que notre pays se recroqueville à nouveau sur son hémisphère publique alors que la chance de la France serait d'assouplir son Code du travail, de faire de la France un pays d'entrepreneurs, un pays où les start-up fleuriraient et seraient le fer de lance de l'innovation. La France qui bouge, c'est possible, à condition de ne pas écouter toujours les mêmes conseillers, ceux qui veulent que rien ne bouge pour leur propre intérêt. Il est temps que le politique reprenne le pouvoir sur l'administration.
Cette tribune a été publiée sur le site Linternaute.