Mise en place d’un pass culture : pour quoi faire ?
C’était une promesse du candidat Emmanel Macron lors de l'élection présidentielle de 2017 : la création d’un Pass culture de 500 euros pour chaque Français l’année de ses 18 ans. Coût attendu de la mesure, 400 millions d'euros dont le financement reste incertain. Après des expérimentations, Françoise Nyssen, ministre de la Culture, a détaillé fin juin la forme que prendrait ce dispositif.
Un Pass pour tous...
Le Pass culture est actuellement expérimenté dans 5 départements pilotes pour 400 volontaires et ce, jusqu’en septembre : le Finistère, le Bas Rhin, la Guyane, l’Hérault et la Seine-Saint-Denis.
Le Pass se présente sous la forme d’une application mobile, accessible à tous et qui recense toute l’offre culturelle autour de l'utilisateur en n'excluant « aucun acteur culturel public ou privé, physique ou numérique ». Géolocalisé, le Pass indiquera en temps réel l’offre culturelle disponible à proximité. L’application doit faciliter les sorties culturelles (réserver un billet pour aller à un concert ou au théâtre par exemple), permettre de s’inscrire à des cours de pratique artistique, d’acheter des « biens culturels » (livre, disque, jeux vidéo…), de souscrire à des abonnements à la presse numérique ainsi qu’à des plates-formes de musique ou de vidéos en ligne ou encore de faire du tourisme culturel (une semaine d’archéologie, par exemple). Une image intrigante pour « susciter le désir », un tarif et une distance seront les trois éléments qui apparaîtront sur l’écran du Pass pour chaque offre proposée.
L’application développée par le Ministère de la culture via une start up d’Etat doit être généralisée pour le premier trimestre 2019 « dans l’idéal ». Di'ci là, 10.000 personnes expérimenteront le dispositif pendant 6 mois avec un crédit de 250 euros. Le but de cette nouvelle expérimentation est de permettre d'améliorer l'algorithme et d’observer les choix des jeunes... pour les inciter à se diversifier.
L’algorithme géolocalisé du Pass mettra en avant des offres du secteur public et des petits acteurs indépendants (librairies, associations…) pour ne pas trop favoriser les géants du web. « Il est hors de question que le Pass soit une autoroute pour les GAFA. » déclare ainsi la ministre de la Culture. Cette dernière souhaite aussi définir des plafonds de dépenses pour certaines catégories, afin que les 500 euros ne soient pas intégralement dépensés en jeux vidéo ou abonnements Netflix. Le montant du plafonnement reste toutefois à définir. En revanche il n’y aura pas de plafond pour la pratique culturelle.
...Crédité de 500 euros pour les jeunes, sur le modèle italien
La spécificité qui répond à la promesse électorale d'Emmanuel Macron est que 500 euros y seront crédité pour chaque Français, l’année de ses 18 ans. Un crédit que chaque jeune sera libre de dépenser comme il le souhaite via l'application.
Un fonctionnement inspiré du modèle italien et de son « bonus cultura » initié par l’ex-Premier ministre Matteo Renzi en 2016. Problème, le bilan de l’expérience italienne est très mitigé bien que le Pass soit reconduit jusqu'en 2019. En Italie aussi, le chèque culture est destiné aux jeunes de 18 ans et il est aussi d’un montant de 500 euros. Il a cependant eu du mal à séduire son public : seuls 60% des 570.000 jeunes majeurs concernés ont fait la démarche de s’inscrire pour bénéficier de cette offre d’après le ministère de la Culture. Autre fait, 78% des achats réalisés ont été consacrés aux livres (la plupart des manuels scolaires) alors que le dispositif concernait l’ensemble de l’offre culturelle (livres, cinéma, concerts...).
Mais le véritable problème a été, qu'en parallèle, s’est développé un marché noir du « bonus cultura » puisque de nombreux jeunes en ont détourné l’usage avec la complicité des commerçants. Ces derniers ont ainsi encaissé, sur le Pass, l’achat de tablettes numériques tout en facturant des livres. D’autres ont monnayé ce Pass, qui peut être racheté pour environ 250 euros (non virtuels cette fois pour le vendeur) sur Internet.
En Italie, le coût a été de 300 millions d’euros financés par l’Etat italien en intégralité.
La question du financement reste aussi l'une des zones d'ombres du Pass Culture à la française. Le coût du Pass peut être estimé à 400 millions d’euros par an pour 805.000 jeunes de 18 ans chaque année en France mais le financement reste encore flou. La volonté du gouvernement est de répartir le coût du Pass entre l’Etat, les différentes institutions culturelles (musées, cinémas, théâtre...) et les GAFA avec l'espoir d'atteindre les 80% de financement par le secteur privé et 20% de dépenses publiques. Comment ? Le gouvernement espère que le financement par le secteur privé soit effectué via des rabais ou des gratuités des partenaires culturels et un partenariat en cours d’élaboration avec des banques. Cela, semble-t-il, en plus des tarifs jeunes et des entrées gratuites (notamment dans les musées) pré-existantes. Une association a été créé pour soutenir le Pass Culture et notamment pour négocier avec les acteurs du secteur les contenus et les budgets.
Pour l'instant, le scepticisme demeure.