L'OCDE se trompe sur le salaire des enseignants
Contrairement aux conclusions du rapport OCDE, les professeurs du second degré public ne seraient pas plus mal payés à l'heure que la moyenne OCDE, si on réintègre les primes et les heures supplémentaires. Un fait que la Fondation iFRAP établit à partir des documents budgétaires. Le taux horaire ne serait pas de 53,7 euros contre 59,6, mais de 59,29 contre 59,6. Une différence qui change tout.
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NotaCertains nous reprochent d'avoir utilisé pour le calcul avec et sans heures supplémentaires le chiffre de 644 heures donné par l'OCDE. Nous avons utilisé ce chiffre car nous avons constaté une nette [*augmentation du nombre d'heures moyen dans les données OCDE qui laissent penser que les heures supplémentaires sont bien comptabilisées*] [1].
En voici la preuve :
Voici comment cette moyenne de 644 heures a été calculée à partir du tableau 9.11 du RERS 2009 (Repères et références statistiques publiés par le Ministère de l'Éducation nationale) :
18,1 heures de service hebdomadaire total (heures supplémentaires comprises) moins 0,2 « heures de pondération » = 17,9 heures
17, 9 multiplié par 36 semaines de cours = 644 heures en moyenne.
Cela implique donc qu'il faut retrancher les heures supplémentaires indument comptabilisées si l'on veut obtenir le vrai taux horaire statutaire : soit 612 heures annuelles hors heures supplémentaires en moyenne.
Soit un taux horaire (hors heures supplémentaires) de 56 euros.
Tandis que, comme le montre notre évaluation, les professeurs du second degré gagnent en réalité en moyenne 59,29 euros de l'heure face à 59,6 de moyenne OCDE, lorsque l'on réintègre les heures supplémentaires dans leur rémunération.
[*L'erreur de l'OCDE est donc de comparer un temps de travail heures supplémentaires comprises avec un traitement statutaire qui ne comprend pas les heures supplémentaires*]. En effet, le nombre annuel statutaire d'heures d'enseignement mis en avant par l'OCDE compare, pour certains pays, les obligations statutaires, avec pour d'autres pays (dont la France) le temps réel d'enseignement. Mais est-ce bien l'OCDE qui a commis l'erreur ? )]
Selon le dernier rapport OCDE sur l'éducation en France en 2011, nos professeurs du second degré seraient plus mal payés en France que dans la moyenne OCDE. Ils seraient même parmi les enseignants les plus mal payés. En effet, les chiffres affichés sont les suivants : les professeurs de collège donneraient en France 644 heures de cours pour 34.316 euros par an en moyenne [2] quand les mêmes professeurs de collège dans l'OCDE donneraient 703 heures de cours pour 41.927 euros en moyenne [3]. Vu comme cela, il semble clair que nos professeurs gagnent 53,7 euros de l'heure quand leurs homologues de l'OCDE gagnent 59,6 euros de l'heure.
Cependant, les chiffres pris en compte pour la France par l'OCDE ne considèrent que les salaires statutaires, et non pas les heures supplémentaires ni les primes qui, à elles seules, représentent environ 10% des salaires des professeurs français.
Nous avons tenté de reconstituer l'ordre de grandeur du salaire moyen d'un enseignant du second degré public grâce aux chiffres donnés dans l'annexe au projet de loi de finances 2011 (« justification au premier euro »).
Sur 451.706 personnels [4] du second degré public, les dépenses de rémunérations, selon ces informations budgétaires, se décomposent comme suit :
14,9 milliards d'euros de traitements indiciaires soit statutaires
1,24 milliard de primes
1,07 milliard d'heures supplémentaires
Soit 17,25 milliards.
En moyenne, les personnels du second degré public ont donc une rémunération réelle -en comptant les primes et les heures supplémentaires- de 38.188 euros par an.
Finalement, ce n'est pas si éloigné de la moyenne OCDE :
38.188 euros pour 644 [5] heures en moyenne au collège -soit 59,29 euros de l'heure- face à 41.900 euros de moyenne OCDE par an en collège, soit 59,6 euros de l'heure.
En prenant en compte les primes et les heures supplémentaires, [*l'écart réel de la rémunération serait de l'ordre de 31 centimes d'euros de l'heure*].
Ce chiffrage n'est pas parfait puisqu'il aurait fallu pouvoir isoler les traitements statutaires, primes et heures supplémentaires des seuls professeurs de collège en France, comme le fait l'OCDE, mais il permet néanmoins de relativiser l'idée que nos professeurs du second degré seraient si mal traités en termes de salaires par rapport aux pays comparables à la France. Il permet, en outre, de conforter l'idée que, si nos professeurs du second degré veulent gagner plus, il faudrait avant tout qu'ils enseignent plus d'heures.
Sur ce sujet, lire aussi sur le site des Echos : "Salaire des profs : un proviseur parle" et donne les vrais salaires de ses enseignants (de moins de 2.000 à 9.400€ nets par mois).
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Le coût des primes et des indemnités des enseignants en FranceIndemnités : 1.238,6 M€ se répartissant principalement ainsi :
indemnité de suivi et d'orientation des élèves : 645 M€,
prime de fonctions et de résultats, indemnité d'administration et de technicité, indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires et indemnité de gestion allouée aux gestionnaires d'EPLE : 105 M€,
indemnité d'éloignement COM et primes d'installation outre-mer : 79 M€,
indemnités allouées aux chefs d'établissement : 62 M€,
indemnité de sujétions spéciales « Zone d'éducation prioritaire » : 46 M€,
indemnité de congé formation : 31 M€,
indemnité pour l'accueil et l'accompagnement des étudiants se destinant aux métiers de l'enseignement créée à la rentrée 2010 : 30 M€,
prime spéciale pour les enseignants assurant au moins trois HSA : 23 M€,
indemnité de sujétions spéciales de remplacement : 22 M€,
indemnité de garantie individuelle du pouvoir d'achat : 20,5 M€,
indemnité de charges administratives aux vice-recteurs et aux personnels d'inspection : 16 M€,
prime d'entrée dans le métier : 12 M€,
indemnité pour fonctions d'intérêt collectif créée à la rentrée 2010 : 11 M€,
indemnité de caisse et de responsabilité allouées aux comptables d'EPLE : 11 M€,
indemnisation du contrôle en cours de formation pour le baccalauréat professionnel créée à la rentrée 2010 : 5 M€.
1,25 Md€ a été versé au titre de l'ensemble des heures supplémentaires en 2010, contre 1,18 Md€ en 2009 et 1 Md€ en 2008, soit une hausse de 9,3 % entre 2008 et 2009 puis une nouvelle hausse de 5,1 % entre 2009 et 2010. Total des montants versés au titre des heures supplémentaires TEPA dans l'année et nombre de bénéficiaires d'au moins un dispositif d'heures supplémentaires dans l'année :
Total indemnités | Évolution annuelle | Effectifs bénéficiaires | Évolution annuelle | |
---|---|---|---|---|
2007 | 978.686.600 | -0,80% | 507.064 | -0,48% |
2008 | 1.074.410.466 | 9,78% | 549.893 | 8,45% |
2009 | 1.208.257.323 | 12,46% | 552.718 | 0,51% |
2010 | 1.271.092.350 | 5,20% | 557.870 | 0,93% |
Champ : champ DGFiP (personnels civils des ministères, hors militaires et COM). Source : Direction du Budget.
La répartition par ministère est la suivante :
Les montants versés pour le seul ministère de l'éducation nationale (hors enseignement supérieur) sont par conséquent de 902,5 M€ au titre de 2010. )]
[1] Cf. p. 459 "Quel est le temps de travail des enseignants ?" : http://www.oecd.org/dataoecd/38/17/...
[2] Au bout de 15 ans de carrière
[3] Au bout de 15 ans de carrière
[4] Les « personnels » comprennent 451.706 personnes dont 389.787 enseignants. Les personnels non enseignants sont notamment des personnels d'encadrement, d'accompagnement des élèves et des personnels administratifs dont les grilles indiciaires ne sont a priori pas susceptibles de faire augmenter la moyenne des traitements des professeurs.
[5] Il faudrait, pour avoir une estimation tout à fait exacte, disposer du nombre d'heures de cours par professeur y compris les heures supplémentaires.