Fonction publique : les effectifs vont-ils vraiment baisser en 2019 ?
Tous les mercredis, avant le Conseil des ministres, Le Macronomètre, l'observatoire des réformes du gouvernement lancé par la Fondation iFRAP, attribue une note aux réformes d'Emmanuel Macron. La note de la semaine du Macronomètre est présentée dans le Figaro. Cette semaine : 2/10 sur la programmation de "baisse" des effectifs publics.
Officiellement, le gouvernement prévoit une baisse des effectifs de l'État en 2019, avec la suppression de 4.164 postes (en équivalents temps plein)… Mais « en même temps », si on regarde dans le détail les plafonds d'emplois des ministères et des opérateurs, une augmentation du nombre d'agents publics entre 2018 et 2019 apparaît, de près de 1.322 postes. Comment cela se fait-il ?
Rappelons que les plafonds d'emplois sont la limite maximale de personnels pouvant être employés par chaque ministère au cours d'une année civile, et qu'ils sont révisés tous les ans. Ainsi, tant que ces plafonds ne baisseront pas, le nombre d'agents publics ne baissera pas non plus. Souvenez-vous : la promesse électorale d'Emmanuel Macron consistait en une baisse de 120.000 effectifs dans la fonction publique, dont 50.000 au niveau de l'État. Si le gouvernement veut tenir sa promesse, le rythme moyen de baisse doit être de 10.000 postes supprimés par an au niveau de l'État.
La question se pose alors : en 2019, avons-nous 4.164 suppressions de postes, ou au contraire, des postes en plus ? La réponse n'est pas évidente car il faut prendre en considération non seulement les effectifs de l'État mais encore ceux des opérateurs.
Où est la vérité ?
La somme des suppressions s'élève en 2019 à -8.396 postes à temps plein, portée par la baisse des effectifs à Bercy (-2.283), à l'Éducation nationale (-1.813), au ministère du Travail (-1.618) et à celui de l'Écologie (-1.078). De l'autre, sont assumées des créations de postes aux ministères de l'Intérieur (+2.278), de la Justice (+1.300) et enfin des Armées (+450).
Mais, pour évaluer l'effort réel, il faut prendre en compte, non pas les équivalents temps plein (qui sont jugés à un instant « t ») mais les équivalents temps plein dit «travaillé», c'est-à-dire sur une année pleine. L'important, ce sont donc les plafonds d'emplois des ministères et des opérateurs. Et voilà ce que l'on constate quand on compare ces plafonds entre le budget 2018 et le budget 2019 :
- Au niveau de l'État, l'écart entre l'affichage des effectifs supprimés et la réalité en équivalent temps plein travaillé est lié à l'intégration des contrats aidés dans la masse salariale du ministère de l'Éducation nationale. Cela fait apparaître un solde de +6.310 équivalents temps plein travaillé, avec en face -2.434 équivalents temps plein travaillé... Bilan au niveau du plafond d'emploi de l'État : une création nette de +4.326 postes ;
- Au niveau des opérateurs de l'État, les mesures de périmètre et les transferts permettent de faire baisser le plafond une première fois de 3.000 équivalents temps plein travaillé.
Pour l'État, l'augmentation du nombre de postes s'explique par le fait que des contrats aidés et de vacataires de l'Éducation nationale deviennent des emplois pérennes, et pour les opérateurs, la baisse s'explique par le fait que des opérateurs de l'État deviennent des EPIC (Établissements publics industriels et commerciaux) comme par exemple les filiales de l'AFPA, ou que certains sortent tout bonnement du champ des opérateurs. Il en va ainsi du domaine national de Chambord qui n'est plus un opérateur de l'État à partir de 2019 et dont les 138 postes subsistent mais ne sont plus comptés… Pourtant l'État ne l'a pas vendu.
Globalement, force est de constater que le bilan est à l'augmentation des effectifs de l'État puisque, sur le champ de l'État et de ses opérateurs, le solde des plafonds d'emplois est en croissance de 1.322 équivalents temps plein travaillé.
Masse salariale en augmentation
En conséquence, on observe que la masse salariale de l'État sera une nouvelle fois en augmentation en 2019. Celle-ci atteindra 88,3 milliards d'euros, soit une augmentation de +1,6% par rapport à 2018 (supérieure à l'inflation prévue en 2019, à +1,4%).
Cela représente une augmentation de la dépense de 1,3 milliard d'euros en 2019, que la direction du Budget explique comme ceci :
- Impact des mesures catégorielles : +600 millions d'euros ;
- Progression des carrières (le glissement vieillissement technicité): +300 millions d'euros ;
- Effet des créations d'emplois en 2018 sur l'exercice 2019: +100 millions d'euros ;
- Reste à expliquer l'augmentation résiduelle des +350 millions restants.
Comment atteindra-t-on les 50.000 suppressions de postes annoncés pour l'État si l'on continue d'augmenter les plafonds d'emplois ? Espérons que ces autorisations soient sous-exécutées par les ministères.