La France dépense plus que l'Allemagne par enseignant
Alors que la question éducative risque d'être au coeur des débats en 2022, il semble opportun de dresser une comparaison France-Allemagne :
Selon les données d’Eurydice, en euros, les enseignants français gagnent de 36 à 41 % de moins que leurs collègues allemands. Si l’on considère les données nationales, le salaire moyen d’un enseignant allemand est de 4 522 € bruts par mois contre 3 048 € bruts pour un enseignant français (public et privé), soit un salaire de 33 % inférieur. Et concernant les retraites, en 2018, les enseignants allemands partaient, en moyenne, à la retraite à 63,5 ans pour une pension moyenne de 3 200 € bruts quand un enseignant français partait, en moyenne, à 59,4 ans dans le 1er degré et à 62,4 ans dans le 2nd degré, pour une pension moyenne de 2 500 € bruts. Néanmoins, les enseignants français ont l’une des marges de progression salariale les plus élevées d’Europe : +72,7 % pour atteindre la rémunération sommitale, au bout de 29 ans… contre +31,2 % pour leurs homologues d’outre-Rhin.
Plus de rémunération mais pour quelle charge de travail en face ? Déjà, on l’a vu, les enseignants allemands partent à la retraite plus tard, en moyenne, que les Français et ils travaillent également un mois de plus par année scolaire (40 semaines contre 36 en France). Ensuite, au niveau du temps d’enseignement, les enseignants allemands du 1er degré assurent un service annuel plus important de 10,7 %, et ceux du 2nd degré un service annuel supérieur de 12 à 29 % mais qui équivaut à 29 à 37 % de classes assurées en plus. Cela à cause d'un temps de classe plus court : 45 minutes contre 55 à 60 min en France. Mais la différence de service doit également se comparer sur les missions annexes. Les Allemands sont ainsi obligés d’assurer jusqu’à 3 heures de remplacement par semaine et couvrent des heures de surveillance : en tout, leur service peut être modulé de 2 heures par semaine sans consentement préalable (dans la limite de 2 semaines) et, peut être modulé jusqu’à 6 heures pour des raisons d’organisation et ce, à la demande du chef d’établissement. Concernant les heures assurées, en plus ou en moins (remplacements, examens, sorties scolaires, stages), elles sont à compenser sur le reste de l’année scolaire. Et, point important, les enseignants fonctionnaires n’ont pas le droit de grève en Allemagne.
Si l’on considère les rémunérations des enseignants du régime général public, ce qui exclut, en France comme en Allemagne les enseignants (les moins rémunérés) qui exercent dans les établissements privés, mais aussi l’ensemble de l’enseignement professionnel, les données suivantes permettent d’identifier des marges de manoeuvre :
Les élèves en « régime général public » sont moins nombreux en France qu’en Allemagne (-9 %). Cependant, le nombre d’enseignants est plus important dans le cas français (+3,5 %). À cette première constatation, s’ajoute la question du « nombre d’établissements publics » qui est plus important de près de 20 000 chez nous et de taille plus réduite. De plus, on s’aperçoit que du point de vue de l’employeur public (l’État en France, les länder en Allemagne) les contributions aux pensions en France sont deux fois plus élevées qu’en Allemagne (9,29 milliards € contre 18,76 milliards en France). Cette différence se traduit par un écart de près de 11 257 € par enseignant et par an. Cet écart est en Allemagne réinvesti dans des régimes indemnitaires plus généreux : en Bavière par exemple, au traitement de base s’ajoute 135 €/mois pour les fonctionnaires mariés, ainsi que 120 €/mois/enfant. Ils disposent d’un 13e mois (prime de Noël) représentant 1/3 du salaire mensuel.
Ainsi, si l’on densifiait les structures éducatives et si on alignait le nombre d’enseignants sur l’Allemagne (ratio élèves/professeurs), la masse salariale fléchirait de 54,7 milliards (y.c. pensions) à 48,2 milliards, soit une économie de 6,57 milliards €. Les effectifs enseignants du public ne seraient plus de 697 464 ETP, mais de 613 712 ETP. Un espace budgétaire serait alors disponible pour des revalorisations indemnitaires sur le modèle allemand, mais toujours contraint par le poids du financement des pensions. En parallèle, l’alignement des dépenses locales de fonctionnement doit permettre une économie supplémentaire de 2,4 milliards € et la suppression d’environ 35 000 agents des fonctions supports.