Si les péripéties autour de la loi "immigration" représentent un échec pour le Gouvernement, elles auront donné l’opportunité à l'opposition de renforcer le texte. Des ajustements insuffisants selon la Fondation IFRAP qui a analysé les dernières données disponibles et a comparé les caractéristiques de notre population immigrante à celles de nos voisins européens. Plusieurs tendances émergent :

  1. La population étrangère présente sur le territoire français a augmenté de près de 1,1 million d’individus depuis 2015 et 36 % de ces arrivées concernent une présence illégale sur le territoire. Cette surreprésentation de l’immigration illégale est anormale dans un État de droit comme la France et empêche de mettre en place une politique d’immigration ambitieuse et… fondée sur le travail. 

  2. La population immigrée en France, quand on la compare à celles installées ailleurs en Europe, est particulièrement éloignée de l’emploi, que cela soit par son taux de chômage, son âge et ses raisons d’arrivées. C’est le deuxième enseignement de notre enquête.

Il faut constater que la loi "immigration" qui vient d'être votée en fin d'année 2023 répond très peu à ces spécificités et ce, même après son passage en Commission paritaire mixte.

Pour la Fondation IFRAP, l’urgence et ce qui doit devenir la colonne vertébrale de tout projet de loi relatif à ces sujets, c’est de renouer un lien entre immigration et travail. Pour y parvenir, on peut s'inspirer des principes qui fonctionnent à l'étranger.

  • Conditionner la délivrance d’un permis de séjour à la réalité d’un emploi stable et bien rémunéré est d’ailleurs une stratégie mise en place dans de nombreux pays (Danemark, Portugal, Canada, etc.). L’exemple canadien démontre aussi que cette "priorité aux travailleurs" permet d'améliorer les conditions de vie des immigrés : dans le pays, entre 2005 et 2020, 60 % des arrivées avaient un motif de travail et 26 % concernaient l’accompagnement d’un travailleur. En parallèle, l’écart de taux d’emplois entre les natifs et les non-natifs s’est réduit de 6 points entre 2010 et 2021 tandis que le revenu annuel de la première année d’immigration augmentait de 39 %. 

  • Restreindre l'accès au système de protection sociale. Dans une approche semblable, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique, faire une demande d’aides sociales peut remettre en cause le permis de résidence ou son renouvellement, et ce, jusqu’à 5 ans après sa délivrance aux Pays-Bas.

Autant de pistes à suivre alors qu’en France, les prestations «nationales» versées aux étrangers réguliers représentent entre 6 et 7 milliards €.

I. Immigration légale : Une population éloignée de l’emploi

L'immigration légale en chiffres :

4,5 millions d’immigrés avec un titre de séjour valide (700 000 nouvelles arrivées depuis 2015) dont :

  • 4 millions avec des titres de séjours : temporaire, pluriannuelle, résident (10 ans, longue durée, permanent), « vie privée et familiale », « salarié », « travailleur temporaire », « étudiants », « passeport talent », « visiteur », « retraité », « recherche d’emploi », « création d’entreprise », « stagiaire », « jeune au pair » membres de famille d’un citoyen UE/EEE/Suisse.

  • 550 000 statut de réfugiés.

  • 100 000 Ukrainiens placés sous « protection temporaire ».

Les étrangers installés en France affichent un taux de chômage plus élevé de 5 points

En 2021 en France, la population d’origine étrangère affichait un taux de chômage plus élevé que le reste de la population nationale : 12,3 % contre 7,9 %. Cette différence existe dans presque tous les pays, à l’exception de la Hongrie, du Portugal ou de la Nouvelle-Zélande où la population immigrée affiche un taux de travail plus important que la population nationale. Néanmoins, dans ces 3 cas particuliers, la différence ne dépasse pas 1,1 point. 

S’il apparaît normal que la population étrangère affiche un taux de chômage plus important que les nationaux, la situation française se démarque par un delta de 5 points entre ces deux populations, bien au-dessus de la moyenne européenne (3,5 points) et de nos voisins les plus proches (1,1 point pour le Royaume-Uni notamment). Notons qu’au Royaume-Uni, un système à points a été mis en place à la suite du Brexit pour organiser l’immigration de ceux qui veulent venir travailler et vivre dans l’une des nations du Royaume. Ainsi plus une personne est qualifiée, plus ses chances d’obtenir le droit de résider au Royaume-Uni augmentent. Facilité par un système social où la mobilité des travailleurs est beaucoup plus importante, le Royaume-Uni a un taux de chômage des personnes étrangères assez bas en comparaison avec d'autres pays européens.

Comparaison des taux de chômage des natifs et des non-natifs, en Europe et dans le monde (2021)

 

Hommes

Femmes

Total

Écart   
en points 
de %

 

Nés à l’étranger

Nés dans 
le pays

Nés à l’étranger

Nés dans 
le pays

Nés à l’étranger

Nés dans 
le pays

 

 

Union européenne

Hongrie

3,5

3,9

3,4

4,3

3,4

4,1

-0,7

Portugal

3,7

6,7

..

6,6

7

7,1

-0,1

Pologne

..

3,4

6,3

3,4

5,1

4,1

1

Irlande

7,3

6,1

7,6

5,7

7,5

5,9

1,6

Luxembourg

5,3

4,5

6,7

3,8

5,9

4,2

1,7

Danemark

7,3

4,7

5,6

4,7

7,3

4,7

2,6

Allemagne

7,1

3,2

5,6

2,7

6,5

3

3,5

Pays-Bas

6,7

3,5

9,2

3,7

7,9

4,1

3,8

Italie

10,8

8,5

16

9,8

13,1

9,1

4

France

11,6

7,5

13,1

7,1

12,3

7,3

5

Belgique

10,5

5,8

11,8

4,5

11

5,2

5,8

Grèce

16,6

11,1

29,5

18,2

23

16,5

6,5

Finlande

11,9

8

15,9

6,2

13,7

7,1

6,6

Autriche

11

4,8

11,6

4,5

11,3

4,7

6,6

Espagne

18,6

11,9

24,6

14,8

21,6

13,2

8,4

Suède

17,4

5,8

21,6

5,2

19,4

6,8

12,6

 

Écart moyen UE

3,5

 

Hommes

Femmes

Total

Écart   
en points 
de %

 

Nés à l’étranger

Nés dans 
le pays

Nés à l’étranger

Nés dans 
le pays

Nés à l’étranger

Nés dans 
le pays

 

 

Hors Union européenne

États-Unis

5,1

5,8

6,2

5,2

5,6

5,5

0,1

Royaume-Uni

4,4

3,6

4,5

2,9

4,4

3,3

1,1

Canada

8

7,6

9

6,4

8,5

7

1,5

Suisse

7,3

3,9

9,1

3,6

8,1

3,8

4,3

 

Écart moyen hors UE

1,8

Source : Données extraites le 25 Sept. 2023 10:14 UTC (GMT), de OECD.Stat.

En 2018, la population active en France comptait 29,8 millions de personnes, dont 10,6 % d’immigrés légaux, soit 3,1 millions de personnes. Ces derniers affichent un taux de chômage 5 supérieur à la population native : ramener le taux de chômage des non-natifs installés en France dans la moyenne européenne reviendrait à ce qu’environ 50 000 d’entre eux renouent avec l’emploi, 120 000 dans le cas d’un alignement sur le taux britannique.

En 2018, l’Insee soulignait que 42 % des immigrés d’âges actifs étaient peu ou pas diplômés bien que cette proportion ait tendance à baisser depuis 30 ans : « 33 % de ceux qui sont arrivés après 1998 ont un diplôme de l’enseignement supérieur, contre 21 % de ceux qui étaient arrivés avant cette date ». En 20213, 24 % des nouveaux arrivés n’avaient aucun diplôme, 51 % un diplôme du supérieur, 33 % étaient en emploi et 47 % étaient au chômage ou inactifs (hors étudiants). Cette surreprésentation du chômage dans les populations immigrées est un problème, car l’exercice d’une activité professionnelle permet de faciliter l’intégration au niveau social et est la garantie d’un meilleur épanouissement par l’accès à de plus grandes ressources économiques. Il permet également de légitimer la présence au sein de la société française puisque les travailleurs participent à l’effort économique et contribuent, aux mêmes titres que les citoyens nationaux, aux finances publiques. 

Le cas canadien : Une immigration quasi exclusivement liée au travail

Entre 2012 et 2022, la population immigrée a doublé au Canada, passant de 259 000 à 473 000 et la tendance se poursuit puisque 900 000 visas temporaires sont actifs et le pays vise à accueillir près de 500 000 résidents permanents, par an, entre 2023 et 2025. L’objectif est de lutter contre le vieillissement de la population, de recruter des travailleurs et d’augmenter la population canadienne avec des profils qualifiés. Les critères de sélection et de validation des titres de séjour répondent donc à cette stratégie avec un système de points qui récompensent les compétences linguistiques (niveau avancé en anglais attendu), le niveau d’éducation et les qualifications professionnelles du demandeur. Le fait d’avoir déjà travaillé au Canada apporte un bonus, tout comme la maîtrise de la langue française, d’avoir fait ses études au Canada ou d’avoir obtenu un emploi « rare » sponsorisé par une province locale. L’âge est également un critère important : le maximum de point était réservé aux 20 à 29 ans, le nombre de points accordé diminuant ensuite jusqu’à zéro point à partir de 45 ans ou plus. 

Depuis 2015, la délivrance des permis de séjour a également été accélérée et entièrement numérisée (« Express entry ») pour les plus qualifiés répondants à des professions qui ont du mal à recruter au Canada (notamment le personnel de santé). 

Entre 2005 et 2020, 59 % des arrivées étaient liées à un motif de travail (26,5 %) ou en tant que membre accompagnant de la famille du travailleur (32,4 %). Ces deux groupes, constituant la catégorie « migrants économiques », comptaient 100 000 arrivées en 1990, environ 180 000 en 2010 et 250 000 en 2021. On notera que la France (comme la majorité des pays européens) ne suit pas les raisons du regroupement familial qui constitue une catégorie unique. L’exemple canadien montre qu’il est intéressant de distinguer le regroupement familial lié à l’immigrationd’un travailleur (32,4 %), du regroupement familial pour d’autres raisons (26,3 %), comme un lien familial avec un citoyen, national ou naturalisé. 

Cette politique migratoire a permis de réduire l’écart de taux d’emploi entre les natifs et les non-natifs de 6 points entre 2010 et 2021 tandis que le revenu annuel de la première année d’immigration a augmenté de 39 % entre les cohortes d’entrées de 2010 et de 20184.

41 % des arrivées en France depuis 2005 avaient un motif familial, seulement 10 % un motif de travail

Il semble que cet éloignement de l’emploi trouve, en partie, sa source dès l’arrivée sur le territoire. En juin 2023, l’OCDE a présenté un rapport qui compare notamment les raisons d’entrée sur le territoire de la population ayant migré de 2005 à 2020. On constate ainsi qu’au Portugal, 30 % des migrations sur la période ont concerné un motif de travail, 22 % en Italie, 20 % en Espagne, 18 % au Royaume-Uni pour une moyenne européenne à 13,6 %. Ce motif n’a, pourtant, concerné que 10,5 % des arrivées en France. Dans ces statistiques, les migrations de citoyens européens sont catégorisées à part dans une section « libre circulation ». Pour cette catégorie de personnes, c’est le Luxembourg qui arrive en tête (81 % de l’immigration de 2005 à 2020), suivi de l’Irlande et de la Suisse. Si on ôte ces trois pays, caractérisés par un PIB par tête (et donc des salaires) très important ou un régime fiscal très attractif pour les entreprises mondiales, c’est l’Autriche qui arrive en tête avec 63,5 % d’immigration liée à la « libre circulation ». D’ailleurs, pour l’Autriche, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas et le Danemark, plus de 50 % de la population arrivée sur le territoire de 2005 à 2020 était liée à la « libre circulation » et donc constituée de déplacements intra-européens. Cette catégorie constitue 32 % des arrivées en France, soit 12 points sous la moyenne européenne.

C’est sur les raisons liées à la « famille » (regroupement familial) que la France se place en 1re position : ce motif a justifié 41 % des entrées sur le territoire de 2005 à 2020, 13 points au-dessus de la moyenne européenne. En 2018, l’Insee5 indiquait que 56 % des immigrés non diplômés ou ayant un brevet des collèges au plus, arrivés en France à l’âge de 15 ans ou plus, déclaraient être venus en France pour des raisons familiales. Enfin, les raisons « humanitaires » (asile) ont représenté 7,4 % des arrivées en France, une position proche de la moyenne européenne : dans cette catégorie, c’est la Suède qui arrive en 1re position avec 24 % des arrivées.

Catégories d’entrée (raison) de la population migrante de 2005 à 2020

 

Travail

Familles 
accompagnant les travailleurs

Famille

Humanitaire

Autre

Libre 
circulation

Portugal

29,72

0,00

35,78

0,39

4,01

30,11

Italie

22,11

0,67

36,83

5,67

1,60

33,13

Espagne

19,96

0,00

28,60

0,67

5,36

45,41

Royaume-Uni

17,88

8,87

16,10

5,30

9,21

42,64

Danemark

15,53

7,20

11,85

6,96

8,24

50,22

Total UE (13)

13,69

0,39

28,07

9,09

4,16

44,59

Irlande

12,90

1,39

6,28

1,22

0,00

78,21

Pays-Bas

12,12

0,00

22,58

9,53

0,00

55,76

France

10,52

0,00

41,24

7,49

8,30

32,46

Suède

9,43

0,97

37,03

23,76

0,00

28,81

Finlande

7,52

0,00

38,17

16,36

1,93

36,02

Allemagne

6,73

0,00

14,64

17,17

1,54

59,92

Luxembourg

6,52

0,00

8,00

3,15

0,73

81,59

Autriche

4,76

1,19

15,73

14,36

0,46

63,50

Belgique

4,09

0,00

27,69

7,23

3,16

57,83

Suisse

1,76

0,00

16,36

4,85

2,15

74,88

Source : OCDE, Les indicateurs de l’intégration des immigrés 2023, juin 2023.

Une population étrangère de + de 65 ans : 25 % en France contre 15 % en Europe

Une immigration familiale et des résidents étrangers plus éloignés de l’emploi… La France se caractérise également par une population non native plus âgée, à la fois par rapport à la moyenne européenne en proportion, mais également par rapport à la population nationale. Ainsi :

  • En 2020, 25 % de la population née à l’étranger avaient plus de 65 ans, en France, contre une moyenne à 15 % en Europe. 

  • À titre de comparaison, ce taux est de 17 % en Allemagne, de 9 % au Portugal, de 12 % aux Pays-Bas, de 10 % au Danemark, de 7 % en Italie et de 11 % au Royaume-Uni. 

  • La tendance est la même pour la part de population non native de plus de 75 ans : 10,4 % en France contre une moyenne européenne à 6,3 %.

Mais également :

  • En 2020, 25 % de la population née à l’étranger avaient plus de 65 ans, en France, contre 19,4% pour la population nationale. 

  • Pour les plus de 75 ans, le ratio est plus proche avec 10,4 % de la population non native et 8,6 % de la population nationale. 

  • En moyenne en Europe, cette proportion est inversée puisque si 15 % de la population non native à plus de 65 ans, ce taux monte à 21,1 % pour la population européenne. Même chose pour les plus de 75 ans : 6,3 % pour les non-natifs contre 9,8 % pour les Européens. Finalement, seuls 8 pays affichent un ratio inversé : la Hongrie, la France, la Slovaquie, la Croatie, la Pologne, la Lituanie, l’Estonie et la Lettonie. 

On observe également la part de la population étrangère de plus de 65 ans continue d’augmenter en France alors qu’elle diminue en Europe : entre 2010 et 2020, +5,3 % pour les plus de 65 ans en France et +2,5 % pour les plus de 75 ans contre, respectivement, -0,9 % et -0,3 % en moyenne dans l’Union européenne ou encore une tendance respectivement à -9,6% et -3,6 % en Allemagne… pays où aucun minimum vieillesse n’était en place jusqu’en 2021 (et qui reste conditionné à une durée de cotisation d’au moins 33 ans). 

II. Accès au modèle social : Faut-il des règles spécifiques ? 

De manière générale, l’accès au modèle social pour les migrants légaux est le même partout en Europe : un titre de séjour valide ouvre l’accès au modèle social et les différences de traitement, de pays en pays, dépend donc de la générosité de base de chaque modèle social. Néanmoins, on observe que de plus en plus de pays conditionnent la validité du permis de résidence (titre de séjour) à un travail ou à la capacité à subvenir à ses besoins. Au Portugal, par exemple, le permis de résidence doit être lié à un contrat de travail tandis qu’aux Pays-Bas et en Belgique, faire une demande d’aides sociales (et donc l’incapacité à subvenir à ses besoins via des revenus indépendants) peut remettre en cause le permis de résidence et son renouvellement (et ce, jusqu’à 5 ans après sa délivrance aux Pays-Bas). 

De telles règles n’existent actuellement pas en France qui se caractérise, en plus, par un modèle social particulièrement généreux. Ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que les étrangers extra-européens représentent 1,6 milliard € par an pour les dépenses de prestations familiales (dont 400 millions pour l’allocation de rentrée scolaire et de 0,9 à 1 milliard pour la PAJE). Tandis que sur l’ensemble des prestations de la CNAF (Caisse nationale d’allocations familiales) qui versent notamment le RSA et les APL, les étrangers européens et les extra-européens représentent 13 % des versements, soit environ 5,3 milliards €. Du côté du minimum vieillesse, la Cour des comptes estime que les étrangers perçoivent 28 % des versements, soit environ 1 milliard €. On peut donc estimer que les prestations « nationales » versées aux étrangers réguliers entre 6 et 7 milliards €.

Comparaison de l’accès modèle social pour les migrants légaux, en France et en Europe 

  • RSA  : En comparant l’accès au RSA (ou revenu minimum équivalent), on constate que si la France est l’un des pays qui impose la durée de résidence sur le territoire la plus longue avant l’ouverture des droits (5 ans), mais qu’une fois ce délai passé, le versement est très peu conditionné à une recherche d’emploi effective, à des contrôles et à des sanctions, ni encore à un renouvellement de la demande. 

 

France

Allemagne

Portugal

Pays-Bas

Danemark

Montant 
de l’allocation, mensuel (adulte seul)

551 € 
(plus de 25 ans)

451 €

209 €

1 216 € 
(plus de 21 ans)

851 €

300 € 
(de 18 à 21 ans)

Durée 
de résidence 
avant ouverture des droits

5 ans

 

1 an et versement conditionné à la signature d’un contrat d’intégration.

3 mois et obligation d’avoir un permis 
de résidence, mais…

Preuve de 7 ans 
de résidence sur 
le territoire sur 8 ans et pas de séjour 
de plus de 2 mois/an hors du territoire.

Impact 
sur l’obtention 
d’un titre de séjour

Perception 
d’un minima social peut impacter négativement une demande 
de naturalisation.

Perception 
d’un minima social peut impacter négativement 
la validation d’un titre 
de résidence.

En théorie, non, mais en pratique, l’obtention d’un visa de résidence est conditionnée à la preuve d’un contrat de travail.

… toute demande de versement de l’assistance publique lors de ses 5 premières années de résidence peut annuler le permis 
de résidence.

Perception 
d’un minima social peut impacter négativement 
la validation 
d’un titre 
de résidence.

Suspension de l’aide

 

Oui si séjour 
à l’étranger 
de plus de 
4 semaines.

Demande 
à renouveler 
tous les 12 mois.

 

Oui, si refus de participer à une «activation measure» (rendez-vous d’accompagnement, suivi, formation) ou refus d’offre d’emploi raisonnable.

=> Aux Pays-Bas, l’ouverture des droits est encore plus rapide (3 mois), mais toute demande de versement de l’assistance publique lors de ses 5 premières années de résidence peut annuler le permis de résidence.

=> L’Allemagne, elle, se caractérise par une suspension de l’allocation en cas de séjour à l’étranger de plus de 4 semaines.

=> Le Danemark, enfin, est le pays qui impose les conditions de résidence les plus strictes (7 ans et pas de séjour de plus de 2 mois/an hors du territoire). 

=> Le Portugal, lui, fait le choix d’un accès plus "rapide" (1 an), mais conditionné à un permis de résidence lui-même conditionné à un contrat de travail. De plus, la demande est à renouveler tous les ans.

  • APL : L'Allemagne et la France présentent des conditions d'accès aux aides au logement relativement similaires... la générosité de l'accès est donc directement corrélée à la politique d'aides mise en place. Ainsi, en Allemagne, on compte 4,5 millions de bénéficiaires (pour 2 millions de foyers) pour une aide moyenne de 370 €/mois (180 €/mois avant la réforme de 2023) alors qu'en France, on compte 13,5 millions de bénéficiaires (pour 6,6 millions de foyers) et une aide moyenne de 225 €/mois. L'un des rares pays européens à avoir fermé l'accès aux aides au logement pour les immigrants légaux en Europe est la Croatie et ce, depuis 1991 (non rétroactif pour les arrivées légales avant cette date).

  • Minimum vieillesse : En France, en 2016, 35 %des 70 000 bénéficiaires de l’ASPA (allocation de solidarité aux personnes âgées) étaient des étrangers non communautaires, une proportion en baisse depuis 2011 et l’ajout d’une obligation de justifier de 10 ans de présence sur le territoire avec un permis de séjour les autorisant à travailler avant d’avoir accès à la prestation. Néanmoins de nombreuses exceptions existent notamment sur les personnes handicapées à plus de 50% et âgées de moins de 65 ans, les réfugiés et apatrides qui bénéficient de la protection subsidiaire et enfin, dans le cas d’étrangers "qui ne peuvent justifier de la régularité de leur séjour [ils] peuvent fournir un relevé de carrière professionnelle pour les périodes manquantes. Le relevé de carrière doit indiquer au moins un trimestre ayant donné lieu à cotisation ou un trimestre acquis en contrepartie d'un revenu de remplacement (période de chômage, de maternité, d'invalidité, etc.) pour être retenu".6

Qu’en est-il chez nos voisins européens ?

=> Une prestation équivalente n’a été créée en Allemagne qu'en 2020 et ce minima reste conditionnée à une durée de 33 ans de cotisations. 

=> En Lituanie, le minimum vieillesse est accessible à ceux qui ne touchent pas une pension, nationale ou étrangère, et qui ont un permis de résidence... Or, pour obtenir ce dernier, il est obligatoire de justifier d'une source de revenus ou d’une indépendance financière. De facto, « le tourisme social des plus âgés n’est pas possible »7 dans le pays. 

=> Une restriction similaire s’applique au Portugal où l’accès au "supplément pour dépendance" et le "supplément de solidarité pour les plus âgés" ne sont accessibles qu’en justifiant d’un permis de résidence… conditionnée à la preuve d’un contrat de travail. 

=> À Chypre, le délai de résidence à justifier avant de pouvoir avoir accès à une "pension sociale" est de 20 ans après l'âge de 40 ans ou de 35 ans après l'âge de 18, et ce, sur le territoire chypre ou en Suisse ou dans l’Union européenne.

Les retraites versées aux non-natifs

En 2022, la CNAV précisait verser une retraite à 3 millions de retraités nés à l’étranger, soit 20 % de l’ensemble des retraités du régime général. Cette proportion descend à 17 % et environ 2,5 millions de retraités en excluant les pensionnés nés dans un territoire français (colonies, protectorats) avant leur indépendance. Ces derniers touchent 19,8 milliards de prestations, soit 15 % de l’ensemble des prestations versées par le régime.
 

En 2017, la Cour des comptes appelait à un meilleur suivi de ces données notamment à cause de l’emballement des prestations versées à des résidents à l’étranger entre 2006 et 2015 (attention, on parle bien ici des pensionnés percevant une retraite à l’étranger, qu’ils soient nés en France ou à l’étranger) : +35 % sur le montant total versé, soit 6,5 milliards d’euros tous régimes confondus (régime général, MSA, RSI, AGIRC-ARRCO) dont la moitié était versée dans l’espace européen (50,3 %). Néanmoins et « à eux seuls, cinq pays représentent 70 % des versements de prestations de retraite à l’étranger : l’Algérie (26 %), le Portugal (17 %), l’Espagne (15 %), le Maroc (7 %) et l’Italie (5 %) ». 

La Cour pointait la faiblesse des contrôles notamment sur place. Aucune de ces données ne nous renseigne sur la part des retraités nés à l’étranger qui perçoivent l’une des 4 millions de pensions publiques (FPH, FPT et
FPE civils). À l’heure actuelle, il semble que cette donnée ne soit pas publiée.

  • Regroupement familial  : L’OCDE note que la France et les États-Unis se caractérisent par des immigrations particulièrement liées au regroupement familial et à la famille plus qu’à une immigration de travail. Avec 41,2 % des arrivées pour raison familiale depuis 2005, la France est le pays européen qui accepte le plus de regroupements familiaux. Au titre de comparaison, les Pays-Bas et le Danemark affichent des taux bien inférieurs, respectivement 22,5 % et 11,8 % et cela, en raison de conditions de regroupement particulièrement strictes. 

On remarque ainsi que les deux pays :

=> Limitent fortement les regroupements des couples jeunes, de moins de 21 ans ou moins de 24 ans.

=> Conditionnent le regroupement à une capacité à subvenir aux besoins du foyer plus forte qu’en France, soit en imposant un niveau de revenus plus élevé (2 fois supérieur au taux de prestations sociales) ou en demandant une preuve d’éducation (1 an dans l’enseignement supérieur) cumulée à une preuve de travail à temps plein sur plusieurs années (3 ans).

=> Aux Pays-Bas, une formule simplifiée du regroupement familial est proposée aux immigrés "talents", si la demande provient de l’employeur de ces derniers.

=> Au Danemark, la capacité du foyer à subvenir à ses besoins sur le long terme est particulièrement challengée puisque le foyer doit prouver qu’il dispose d’un logement durable et spacieux et que le conjoint "regroupé" doit verser une garantie financière de 14 000 € à la municipalité où il s'installe afin de compenser les potentielles demandes d’assistances sociales à venir. Cette somme est réduite de 6 000 € via la validation de 2 tests de langues danoises obligatoires (3 000 € réduits en plus dans le cas de la validation d’un 3e test dans le cadre d’une formation professionnelle). Cette garantie n’est rendue qu’au bout de 10 ans de résidence. 

Comparaison des conditions à remplir pour bénéficier du regroupement familial

 

France

Pays-Bas

Danemark

Membres concernés

Conjoint marié majeur, enfants mineurs.

Conjoint (de plus de 21 ans si mariage alors que demandeur déjà aux Pays-Bas), enfants mineurs sans casiers judiciaires.

Conjoint marié et âgé de plus de 24 ans 
(sauf si naturalisation du conjoint depuis plus 
de 28 ans), enfants mineurs.

Conditions 
pour ouvrir 
la demande pour le 
membre sur place

Résider en France depuis 18 mois (12 mois pour un ressortissant algérien), avoir un titre de séjour d’un an au moins (sauf « passeport talent », retraité, saisonnier).

Avoir un permis de résidence (sauf pour les échanges d’étudiants, les au pair, les apprentis et les saisonniers).

Obligation de justifier de revenus deux fois supérieurs au taux de prestations sociales.

Le couple doit valider plusieurs « compétences » dispatchées entre les deux membres : niveau B1 en anglais (intermédiaire TOIEC), avoir travaillé à temps plein 3 ans (30h/semaine) sur les 5 dernières années, preuve d’une année de formation dans l’enseignement supérieur.

Conditions à remplir

Justifier d’un logement (locataire, propriétaire ou à titre gratuit) d’une surface déterminée selon la zone géographique : par ex, en Île-de-France (zone A), 22 m2 pour 2 pers, 72 m2 pour 7 pers.

Avoir un revenu suffisant, fiscalisé et durable (environ 2000 € bruts, niveau actualisé 
2 fois par an).

Le conjoint ne doit être avoir été condamné pour des faits de violence domestique. Le conjoint doit : avoir déjà visité le Danemark, doit justifier d’un logement indépendant de 20m2/pers (hors sdb, entrée, cuisine), même si propriétaire (les m2 loués sont exclus du calcul) et si bail, ce dernier doit durer 1 an et demi minimum le bailleur ne peut pas être un membre de la famille et il faut prouver le versement d’un loyer équivalent aux prix pratiqués dans la zone géographique).

Le conjoint doit être indépendant financièrement et déposer 14 000 € de «garantie financière» à la municipalité (afin de compenser pour les finances publiques, les demandes d’assistance sociale), cette garantie est réduite de 3 000 € à chaque validation de test de langue danoise (les 2 premiers à valider dans les 9 premiers mois de résidence), cette garantie est rendue dans le cadre de l’obtention d’un permis de résidence permanent ou après 10 ans de résidence. Dans le cas où le permis de résidence est révoqué, où le conjoint a quitté le pays, toutes les sommes versées par l’assistance publique doivent être remboursées.

Ressources suffisantes : 1 SMIC brut pour une famille de 2 à 3 personnes, les revenus issus des prestations familiales, de l’allocation équivalent retraite, du RSA, de l’ASPA et de l’ASS sont exclus du calcul.

Les immigrés 
« highly skilled » peuvent faire une demande de permis 
de résidence pour 
leur partenaire 
à travers leur 
employeur.

Délai de validité du regroupement

 

Permis de résidence des membres de la famille expire en même temps que celui du demandeur principal et valable au maximum 5 ans

Dans les 9 premiers mois de résidence, 
le membre rapproché doit valider 2 tests 
de langue danoise (niveau A1 et A2 - 
débutant TOIEC).

 

Une demande pour toucher des aides sociales peut annuler 
le permis de résidence de la famille

 

Obligation de notifier l’administration si un membre quitte le foyer associé au permis de résidence ou si un membre qui le territoire danois pour une durée longue, peut causer l’annulation du permis.

D’autres pays accueillent presque autant que la France pour des motifs de famille, notamment la Suède (37% des motifs depuis 2005) et le Portugal (35,7%). L’immigration en Suède a concerné, des années 1970 à 2016, principalement deux types de profils : les réfugiés (24% des arrivées de 2005 à 2020) et le regroupement familial (37%). Le pays est alors confronté à un très fort taux de chômage des non natifs : 19,4%, soit 12,6 points au-dessus du taux de la population native. En 2016, la Suède, jusqu’alors caractérisée par une politique migratoire très généreuse a fortement limité sa politique d’accueil. L’âge des époux pouvant faire une demande de regroupement a, ainsi, été relevé à 21 ans, la justification des ressources du foyer a été renforcée et son niveau est déterminé par la composition du foyer. Enfin, les titres de séjour ne peuvent plus être délivrés aux personnes dépendantes des aides sociales, locales ou nationales. L’objectif des restrictions est de garantir l’autonomie financière du foyer regroupé. En 2023, le gouvernement suédois a annoncé son intention de restreindre de nouveau cette politique (projet de limitation du regroupement familial pour les réfugiés, demande d’asile à formuler obligatoirement en dehors du territoire suédois, permis de travail uniquement pour les emplois rémunérés à hauteur de 2 fois le salaire minimum, etc.). 

Le Portugal se caractérise par une situation exceptionnelle en Europe avec des arrivées pour motif familial très nombreuses (35,7% des arrivées depuis 2005)… et un taux de chômage des non natifs inférieurs à celui de la population native : respectivement, 7% et 7,1%. Évidemment, cette situation est le résultat du fait que le Portugal est en 1re place des migrations ayant concerné un motif de travail en Europe, mais il convient de souligner que dans le cas d’une demande de regroupement, cette dernière est conditionnée au permis de résidence du demandeur… lui-même conditionné à un contrat de travail.

III. Point sur l'accès aux prestations sociales et à l’emploi des demandeurs d'asile

L'immigration « en attente de réponse » et illégale en chiffres :

Entre 750 000 et 1 million de personnes dont :

  • 156 500 demandes d’asiles en attente de traitement ;
  • entre 600 000 et 700 000 clandestins (estimation 2021, ministère de l’Intérieur) ;
  • ou entre 780 000 et 900 000 individus (estimation 2022 Fondation IFRAP).

Dans le cas d’une demande d’asile, le dossier doit être déposé à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) : en 2019, le délai moyen de traitement d’une demande était de 325 jours, soit 18 jours de plus qu’en 2018. Avec une procédure qui dépasse les 11 mois en moyenne (et des cas particuliers où le traitement dépasse les 13 mois), la réalité est loin de la promesse présidentielle de réduire le délai à 6 mois. 

Concernant l’emploi

Il faut rappeler qu’un demandeur d’asile ne peut pas travailler en France pendant le traitement de sa demande, toutefois si le délai initial (hors recours) de 6 mois de traitement du dossier est dépassé, le demandeur peut effectuer une demande d’autorisation de travail, qui est étudiée par l’administration. Si dans ce laps de temps il reçoit une réponse négative de l’OFPRA, il peut avoir recours à la CNDA. Dans ce cas de figure, et même si son dossier est rejeté l’OFPRA, sa demande d’autorisation de travail est malgré tout étudiée.

Concernant les aides sociales

Pendant le temps d’attente et avant de connaître la décision prise par les autorités concernant une autorisation ou non d’un séjour en France, les demandeurs d’asile bénéficient d’un ensemble d’aides aux conditions d’ouverture des droits très variables.

  • Santé : À partir de 3 mois de résidence, accès à la protection universelle maladie ('puma") qui prend en charge les frais médicaux et, sous condition de ressources, à la complémentaire santé solidaire (CSS).

  • Logement : Le demandeur d’asile qui justifie d’un titre de séjour provisoire, mais dont la demande d’asile est toujours en cours d’instruction peut être logé dans un centre d’accueil des demandeurs d’asile (Cada). Ces centres apportent un accompagnement social, médical et administratif notamment pour informer les demandeurs sur leurs droits et les dispositifs de droits communs auxquels ils peuvent prétendre, notamment les aides au retour volontaire, car ils ont également comme mission de préparer la sortie du centre des demandeurs et ce, quelle que soit l’issue de la procédure de demande d’asile.

  • Aide au retour : Après 6 mois consécutifs de présence sur le territoire français, un demandeur d'asile qui change d'avis et souhaite retourner dans son pays d'origine est éligible à une aide au retour. Cette aide est double puisque l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) prend en charge les frais de voyage et à cette prise en charge s’ajoute une allocation dont le montant varie en fonction du pays d’origine et du nombre de membres du foyer déplacé : entre 300 et 1 850 €. En 2023, 7 100 étrangers ont bénéficié du dispositif. 

  • Gratuité : Les collectivités peuvent mettre en place des aides locales et droits connexes à destination des demandeurs d'asile : la plupart d'entre elles sont sous condition de ressources et concernent souvent la réduction des tarifs des transports en commun ou la gratuité de la cantine dans certains établissements scolaires. En effet, les enfants de demandeurs d’asile ont le droit d’effectuer leur scolarité en France pendant l’attente de la réponse.

  • Allocation des demandeurs d'asile : On note que le montant de l’allocation est directement corrélé à la politique de logement, avec parfois des placements obligatoires, du pays. Deux pays se distinguent par une allocation liée à une politique d’insertion plus intensive : le Danemark où un bonus sur l’aide financière de base est proposé aux demandeurs d’asile qui s’engagent, via la signature d’un contrat, au processus d’intégration et l’Espagne qui présente plusieurs phases avec l’évolution de l’aide pour créer une dynamique d’insertion sociale et professionnelle.

L’allocation des demandeurs d’asile : comparaison européenne

 

Conditions et montants pour percevoir l’allocation des demandeurs d’asile (ou équivalent)

France

L’allocation de demandeur d’asile (ADA) représente 6,80 € par jour pour une personne seule plus 7,40 € supplémentaires par jour si le demandeur d’asile a fait une demande d’hébergement et n’a reçu aucune place. Soit un montant total de 204 € sur 30 jours pour les demandeurs avec un logement et 426 € 
par mois pour ceux qui n’ont pas de logement.

Allemagne

Le montant est de 410 € pour les demandeurs d’asile sans logement et 369 € pour ceux avec logement.

Italie

Les autorités versent 75 € par mois (2,5 € par jour) aux demandeurs d’asile qui sont logés dans 
des habitations gérées par l’État italien. Les demandeurs d’asile qui ne sont pas dans ces centres 
d’accueil ne peuvent pas percevoir les aides financières.

Suède

Les demandeurs d’asile bénéficient de SEK 24/€ 2.15 par jour par personne pour ceux qui ont 
un logement dans un centre d’accueil avec la nourriture comprise ou alors SEK 71/€ 6.36 pour les autres. 
Cela représente respectivement 64,5 € pour 30 jours et 190,8 € pour 30 jours.

Espagne

Pendant une période initiale de six mois, les demandeurs d’asile sont logés dans des habitations 
partagées. Ils reçoivent de la nourriture et 50 € par mois. Les dépenses essentielles sont également 
couvertes (médecin, cours de langue, transports…). Les six mois suivants, les demandeurs d’asile vont 
dans des logements privés avec un loyer couvert par le gouvernement espagnol. Dans la dernière 
phase de six mois, ils peuvent travailler et les aides ne sont versées que dans les situations d’urgence.

Royaume-Uni

Les demandeurs d’asile reçoivent £ 177.01 par mois calendaire. Ils sont logés, mais sont dans l’obligation 
d’aller dans le logement qui leur est attribué.

Danemark

L’allocation de demandeur d’asile est de DKK 56.59 par adulte par jour ce qui représente 7,59 € par jour 
ou 227,7 € pour 30 jours, ou alors si la personne vit avec son partenaire dans un centre d’accueil 
 montant passe à DKK 44.81 par adulte et par jour ce qui représente 6,01 € ou 180,3 € pour 30 jours. 
Les adultes qui acceptent de signer un contrat pour participer à plusieurs activités d’intégration au sein 
du centre d’accueil peuvent recevoir DKK 9.44 (1,27 € en plus par jour). Enfin pour les demandeurs d’asile 
qui voient leur demande être traitée au Danemark, ils reçoivent DKK 33.02 (4,43 €) en plus par jour.

Un point sur les mineurs non accompagnés

Le nombre de mineurs isolés non accompagnés (MNA) reconnus et pris en charge a explosé : de 1 747 en 2023 à 28 000 en 2018. À Paris, premier département d'accueils des MNA, ils sont passés de 700 fin 2008 à 1 900. Face à cet accroissement, les départements sont financièrement asphyxiés : les MNA représentent plus de 20 % de la protection à l’enfance : 1,9 milliard en 2017 sur une dépense totale de 8,3 milliards et en hausse de 21 % depuis 2010 et de 57 % depuis 2000. En 2021, Arnaud Bazin, sénateur LR, pointait que les dépenses liées du département du Val-d’Oise étaient passées de 3 à plus de 40 millions en 10 ans. La prise en charge matérielle par MNA s’élève à plus de 50 000 € par an pour les pouvoirs publics.

Une procédure trop accélérée et trop favorable… En mars 2019, le Conseil constitutionnel confirmait que l’évaluation « administrative » (par un agent) de l’âge du demandeur devait l’emporter sur les examens densitométriques (tests osseux) et que le « doute » devait profiter à l’intéressé). Cette évaluation doit se tenir dans un délai de 5 jours où le demandeur est mis à l’abri : un délai beaucoup trop court qui aboutit à des coûts de nuitées hôtelières exorbitants selon la Cour des comptes.

… qui mène à une multiplication des demandes abusives. En 2018, on relevait 35 793 demandes rejetées. 60 % des demandes sont rejetées à cause d’une fraude sur l’âge du demandeur (majeur) mais de nombreux élus départementaux reconnaissent qu’une large partie des 40 % de demandes acceptées peuvent concerner des personnes majeures. La seconde raison de fraude, c’est celle sur l’isolement avec des MNA dont les parents se font connaître à leur majorité et une fois que leur enfant est régularisé (selon les propos de l’ancien préfet de l’Essonne, Michel Aubouin). En face, les contrôles sont très faibles : fin 2019, seulement 77 départements avaient adhéré à l’AEM, une application d’appui à l’évaluation permettant de recouper les données biométriques des demandeurs et de repérer les multiples tentatives.

Par ailleurs, la faible qualité des états civils d'origine des publics destinataires empêche à beaucoup de MNA devenus majeurs l'attribution d'un titre de séjour leur permettant de se maintenir sur le territoire français. Cela explique bien que depuis 2014, 90 % des demandeurs d'ASE soient âgés de 15 ans au plus, on obtienne un différentiel important entre 33 985 mineurs orientés entre 2014 et 2017 contre 16 918 demandes de séjour entre 2016 et 2019. Le différentiel rentrant dans la clandestinité.

Le vrai problème, c’est la délinquance. S’il n’existe aucun recensement à l’échelle nationale des actes commis par les MNA délinquants, on sait qu’ils représentent 76 % des mineurs déférés au Parquet de Paris (une part en augmentation de 27 % depuis 2006) et 20 % des mineurs incarcérés en 2018. D’ailleurs, sur un échantillon de 154 MNA formellement identifiés par le Parquet de Paris, il a été déterminé que 91 % d’entre eux étaient majeurs. D’anciens dirigeants de la police de l’agglomération parisienne estiment « qu’a minima, la moitié des MNA qui se prétendent [âgés de 16 ou 17 ans] dans l’agglomération parisienne, sont en réalité âgés d’au moins 18 ans et mentent sur leur âge, comme ils le font à propos de leur identité, pour bénéficier de la clémence de la justice des mineurs ».

Enfin des réseaux criminels (trafic d'êtres humains, recels, etc.) sont en outre suspectés mais rarement identifiés. En cause ? La surreprésentation de certaines nationalités car les effectifs de MNA délinquants sont essentiellement constitués de mineurs en provenance du Maghreb (et non d'Afrique subsaharienne ou des pays de l'Est), si bien qu'en « 2019, les mineurs non accompagnés algériens, marocains et tunisiens représentent plus de 75 % des MNA déférés et, à eux seuls, les mineurs se déclarant algériens représentaient en 2019 quasiment 50 % des mineurs déférés » d'après le Parquet de Paris.

Au final, ces problématiques soulèvent celle de la détermination de l'âge des MNA déférés qui est centrale pour l'aiguillage du suivi du MNA, sa mise sous protection, son orientation et son placement ou au contraire sa bascule dans les dispositifs de sanction et de réinsertion des jeunes adultes de droit commun.

 

IV. La problématique du stock de clandestins et des travailleurs illégaux 

Régularisation des travailleurs illégaux : Une expérimentation faible en comparaison du modèle allemand

En 2021, selon l’étude d’impact du projet de loi immigration, sur 55 607 titres de séjour qui ont été délivrés (ou renouvelés) sur un fondement professionnel, 17% (soit 9 496 décisions) concernant la régularisation exceptionnelle d’un ressortissant étranger avec un contrat de travail ou une promesse d’embauche effective. Un an plus tôt, en décembre 2022, le dossier de presse du ministère de l’Intérieur estimait que « dans le cadre de la circulaire «Valls» du 28 novembre 2012, 30 000 étrangers en situation irrégulière sont régularisés par an (23 000 pour des motifs familiaux et 7 000 pour des motifs de travail) ». Les conditions à remplir varient selon les situations et surtout selon la période de présence sur le territoire (5 ans, justification de 8 mois d'activités sur 2 dernières années ; 3 ans, justification de 24 mois d'activités dont 8 mois sur l'année passée ; 7 ans ou plus, justification de 12 mois d'activités sur les 36 derniers mois). Il convient de noter que les périodes d'activités peuvent être consécutives ou non et que des conditions particulières s'appliquent pour les activités dans le secteur de l'économie solidaire, l'intérim et le cumul de CDD.

Néanmoins, le document clef ici, et nécessaire pour toutes les demandes, c’est le formulaire CERFA à remplir par l’employeur. Dans le système actuel, l’étude d’impact souligne le risque de "favoriser les situations de trappe à pauvreté, voire d’exploitation". En effet, dans ces situations, les employeurs peuvent utiliser une main-d’œuvre étrangère bon marché et flexible en s’exonérant des dispositions protectrices de la législation du travail vis-à-vis des salariés. Le projet de loi actuel cherche à supprimer cette dépendance entre l'employeur et le salarié pour le lancement d'un dossier de régularisation en proposant un nouveau titre de séjour.

L'article 3 de la loi adoptée par la Commission mixte paritaire en décembre 2023 met en place, sur ce sujet et jusqu'en 2026, l'expérimentation d'une nouvelle carte de séjour "travail dans les métiers en tension" à destination des travailleurs sans-papiers. Il s'agit d'un titre de séjour d'un an, délivré au cas par cas par les préfets, à condition d'avoir résidé en France pendant au moins 3 ans et exercé une activité salariée durant au moins 12 mois sur les 24 derniers (consécutive ou non).

L'expérimentation présente plusieurs faiblesses à commencer par une absence de connaissances des enjeux aux préalables. En effet, outre estimer que la création d’un titre de séjour temporaire mention "travail dans les métiers en tension" permettra de résoudre, en partie, les difficultés de recrutement et devrait augmenter le nombre d'employeurs s'acquittant de la taxe employeur, l'étude d'impact associée ne propose aucun chiffrage, ni d'évaluation du public concerné. Interrogé sur le sujet, le ministère de l'Intérieur estime que la mesure initiale aurait concerné 7 000 à 8 000 régularisations annuelles... ce qui est déjà le rythme de régularisation actuel. Enfin, un véritable flou encadre la liste des métiers "en tension" , ni sur quels critères cette dernière sera réactualisée. Les métiers les plus cités par le gouvernement sont la restauration, la construction, l’agriculture et les services ménagers. 

En face, l’Allemagne qui a adopté une mesure équivalente en décembre 2022 évaluait le public concerné à 136 000 personnes, soit 60% de ses immigrés en "résidence tolérée" (dont l'expulsion a été suspendue) et en parallèle des 50 000 étrangers sans permis de séjour et encore soumis à une obligation de quitter le territoire (OQTF) qui, eux, sont exclus du périmètre.

Enfin, les conditions annexes avant l’accès au titre de séjour "métier en tension" apparaissent assez limitées (durée de résidence et preuve d’activité professionnelle même non consécutive). Sur ce point, le projet français devrait s’inspirer de la réforme allemande, notamment en intégrant la nécessité de prouver une période de travail ininterrompu, l’obligation de présenter des diplômes reconnus, le fait de ne pas percevoir de minima sociaux, la maîtrise de la langue française, la preuve d’un logement décent et surtout le fait de ne pas être soumis à une obligation de quitter le territoire active.

Le problème originel : La non-exécution des OQTF et le sous-investissement dans la politique d’éloignement…

Les statistiques sur le stock d’illégaux ne sont même pas tenues par le ministère de l’Intérieur (ou ne sont pas rendues publiques !) contrairement à ce qui se pratique au Royaume-Uni et en Allemagne.

Au Royaume-Uni, l’évaluation du stock d’immigration illégale a lieu périodiquement et selon des méthodes diverses. C’est en particulier ce que fournit le Migration Observatory, dont les dernières estimations datent de 2020. Le stock d’illégaux représenterait au Royaume-Uni entre 594.000 et 745.000 ESI, avec une évaluation centrale de 674.000. La France pèche par l’absence de toute évaluation robuste de l’immigration illégale.

En 2017, le ministère de l’Intérieur estimait le nombre de clandestins en France entre 300 000 à 400 000, 5 ans plus tard, entre 600 000 et 700 000 personnes. L’opposition de droite parle, elle, de 700 000 à 1 million de personnes. La Fondation IFRAP, en menant une analyse en "flux cinétiques" des ESI et des données de l'AME estime le stock d’immigration illégale en France, compris entre 780 000 et 900 000 personnes dont un accroissement net d’environ 400.000 sur la période 2015-2022, soit un quasi-doublement. Cet emballement est cohérent avec l’augmentation du nombre de demandes d’asiles depuis 10 ans (61 000 en 2012, 130 000 en 2022) cumulé au fait qu’une demande sur 3 seulement est validée en moyenne et à une sous-exécution chronique des sorties de territoires.

En 2017, alors que la France faisait respecter 26 000 OQTF (obligation de quitter le territoire français), l’Allemagne en avait exécuté 300 000 en deux ans, soit une moyenne respective de 350 sorties du territoire par jour contre 71. Depuis plus de 10 ans, la Fondation IFRAP alerte sur le fait que les OQTF ne sont pas respectées. Sur les dix dernières années, leur taux d’exécution des OQTF a toujours été en dessous de 20 % (meilleure performance atteinte en 2012 avec 22,3 %), mais on observe une baisse constante de ce taux depuis 2013 et un véritablement effondrement depuis la crise du Covid en 2020, 6,8 % en 2022, 6,9 % au 3e trimestre 2023. 

Ainsi, en 2023, 67 000 personnes se sont maintenues sur le territoire national en dépit de la mesure d’éloignement prononcée à leur encontre, en 2022, 125 000, en 2021, 116 000, en 2020, 100 000 et en 2019, 108 000.

Pour assurer cette politique d’éloignement, les crédits dédiés aux frais d’éloignement des migrants en situation irrégulière étaient de 44 millions en 2023. Le budget 2024 les augmente de 20 millions, passant à 64 millions, de quoi faire respecter entre 20 000 et 30 000 OQTF, mais c’est encore loin des 180 millions € qui seraient a minima nécessaires (un budget théorique qui ne prend en compte que les frais de déplacement, sans inclure les frais de personnel assurant ces missions).

À ce sous-investissement, d’autres raisons structurelles expliquent cette moindre performance de la France, notamment :

  • La durée de rétention administrative des demandeurs d’asile notamment : en Allemagne, elle va jusqu’à 18 mois et elle est illimitée en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas contre 3 mois maximum en France. À cela s’ajoute comme difficulté que, depuis 2016, la justice annule un placement en rétention sur cinq, car la police n’a plus que 48 heures pour étayer ses dossiers de reconduite, au lieu de cinq jours auparavant. 

  • Le fait qu’il n’existe pas de liste de pays sûrs au niveau français comme au niveau européen, ce qui permettrait de rejeter systématiquement les demandes d’asile émanant de leurs ressortissants.

  • Et la sur-représentation des subventions aux associations…

… au profit d’un sur-investissement dans la politique associative

Mais alors où vont, en majorité, les 2,01 milliards € accordés par l’État à la mission « Immigration, asile et intégration » ? Pour plus de 900 millions €, ils sont versés en subventions aux 1 350 associations qui assurent des missions d'accueil, d'accompagnement et d'assistance juridiques (notamment pour des recours contre les OQTF) auprès des immigrés.

On assiste à une situation incongrue où, en France, il est quasiment impossible de déléguer au privé, l’entretien des espaces verts ou la cantine ou le nettoyage des écoles, collèges et lycées (systématiquement, l’administration et les syndicats assurent que ces missions doivent absolument être effectuées par des personnels publics avec un statut à vie) alors qu’en face, des missions hyper-régaliennes, comme l’accueil et l’accompagnement des migrants peuvent être déléguées, sans problème, à des associations et ce, quasiment sans contrôle.

Au final, sur la dernière décennie, ces subventions aux associations d’aides aux migrants ont été multipliées par 3 (de 42 millions en 2012 à 981 millions en 2022) quand le nombre de reconduites à la frontière a été divisé par 3 (de 22,3 % en 2012 à 7 % en 2022).

Les propositions de la Fondation

La version finale de la loi "immigration" adoptée à la suite de son passage en Commission paritaire mixte (et qui devra être validée, partiellement ou dans son intégralité, par le Conseil constitutionnel courant janvier 2024) aura été profondément renforcée par son passage au Sénat et l’opposition de droite.

On constate une volonté de l'opposition de droite de passer d'une immigration actuellement marquée par des motifs familiaux à une immigration plus liée au travail. Pour cela, l'opposition de droite prévoit notamment de restreindre l'accès au système de protection sociale, notamment pour ceux qui ne travaillent pas, de renforcer l’employabilité (notamment en renforçant le niveau de maîtrise du français à justifier pour certains titres de séjour) et l’obligation de justifier de revenus suffisants dans le cadre des regroupements familiaux.

Les principales mesures actuellement adoptées qui vont dans le sens d’une immigration  de « travail »

Durcissement des conditions d'accès à certaines prestations sociales :

  • Allocations familiales, droit au logement opposable et allocation personnalisée d’autonomie : accès après 2 ans et demi de résidence pour les étrangers non européens en situation régulière qui travaillent, 5 ans pour les autres… sauf étudiants étrangers, réfugiés et titulaires d’une carte de résident – 10 ans - délivrable après déjà 5 ans de présence sur le territoire.

  • APL : accès après 3 mois de résidence pour les étrangers non européens en situation régulière qui travaillent, 5 ans pour les autres… sauf étudiants étrangers, réfugiés et titulaires d’une carte de résident – 10 ans - délivrable après déjà 5 ans de présence sur le territoire.

  • Radiation auprès des organismes de Sécurité sociale et de Pôle emploi, des étrangers ayant été notifiés d’une décision de refus de séjour, de retrait de titre ou document de séjour ou d’expulsion.

Renforcement des revenus à justifier dans le cadre du regroupement familial :

  • Obligation de justifier des ressources « régulière » en plus des conditions préexistantes « stables et suffisantes » et sortir les APL du calcul des ressources. Notons que les revenus issus des prestations familiales, de l’allocation équivalent retraite, du RSA, de l’ASPA et de l’ASS étaient déjà exclus du calcul.

Régularisation des travailleurs illégaux :

  • Expérimentation adoptée, jusqu’en 2026, par la loi « immigration » avec la création d'un titre de séjour « métiers en tension » à destination des travailleurs clandestins et valable un  an, délivré au cas par cas par les préfets, à condition d’avoir résidé en France pendant au moins 3 ans et exercé une activité salariée durant au moins 12 mois sur les 24 derniers (consécutive ou non).

Pour la Fondation IFRAP, l’objectif d’une immigration de travail est cohérent avec les politiques mises en place à l’étranger (visa « travail » à points au Canada, depuis 2012, et au Royaume-Uni depuis le Brexit, titre de séjour conditionné à la validité d’un contrat de travail au Portugal).

On constate une tendance similaire sur le renforcement de l’accessibilité aux systèmes d’assistance publique nationaux (remise en question ou « malus » sur le permis de résidence en cas de demande de versement d’aides sociales en Allemagne, en Belgique, au Danemark et aux Pays-Bas et ce, jusqu’à 5 ans après sa délivrance pour ce dernier).

Néanmoins, la loi qui vient d’être votée ne répond que très peu à ces objectifs qui auraient pourtant dû être la colonne vertébrale de la réforme. Pour y remédier, la Fondation propose de s’inspirer des méthodes qui fonctionnent à l’étranger.

Pour donner la priorité à une immigration de travail…

Mettre en place un permis de séjour à point et prioritaire pour les travailleurs et leurs familles :

  • Ce dernier devra récompenser les compétences linguistiques (niveau avancé en français, voire en anglais), le niveau d’éducation, le fait d’avoir fait ses études en France et les qualifications professionnelles du demandeur et prendre aussi en compte l’âge du demandeur (modèle canadien).

Sur le modèle canadien, suivre séparément la proportion de regroupement familial attaché à un travailleur.

Sur le modèle portugais, renouveler régulièrement ce permis de séjour afin d’évaluer la situation du demandeur et son statut d’emploi (tous les 12 mois dans le cas du Portugal).

Dans le cas d’une validation par le Conseil constitutionnel de la fixation de quotas, hors demandeurs d’asile et pour 3 ans, de l’ensemble des titres de séjour délivrés, la proportion de permis à points « travail » et de regroupements familiaux rattachés à un travailleur à délivrer pourra être déterminée par un débat parlementaire tous les 3 ans.

Renforcer les conditions de régularisation des travailleurs illégaux dans les métiers en tension :

  • Intégrer à la délivrance de ce titre la nécessité de prouver une période de travail ininterrompu, l’obligation de présenter des diplômes reconnus, le fait de ne pas percevoir de minima sociaux, la maîtrise de la langue française, la preuve d’un logement décent et surtout le fait de ne pas être soumis à une obligation active de quitter le territoire (modèle allemand).

  • Réviser et publier annuellement la liste des métiers dits sous tension et intégrer la proportion de titres de séjour liés, délivrable dans les quotas fixés tous les 3 ans par le Parlement.

  • Développer une procédure simplifiée pour des entreprises accréditées des métiers « en tension » et qui pourraient sélectionner leurs candidats et parrainer leur admission.

… il faut durcir les conditions des autres arrivées (regroupement familial) et l’accès au système de protection sociale

Garantir les revenus suffisants du foyer dans le cadre des regroupements familiaux :

  • Déterminer annuellement un revenu minimum à justifier au moment des demandes, en fonction de l’âge et du nombre de membres regroupés, pour garantir l’indépendance financière du foyer. Exclure tous les revenus sociaux de ce calcul.

  • Renforcer la condition de justification d’un logement décent, indépendant et assez spacieux pour tous les membres du foyer.

Sur le modèle danois : justifier d’un logement indépendant de 20 m2/pers (hors sdb, entrée, cuisine), même si propriétaire (les m2 loués sont exclus du calcul) et si bail, ce dernier doit durer 1 an et demi minimum. Le bailleur ne peut pas être un membre de la famille et il faut prouver le versement d’un loyer équivalent aux prix pratiqués dans la zone géographique).

Mais également :

  • Remise à plat de tous les accords bilatéraux relatifs aux regroupements familiaux.

  • Obligation de présenter un casier vierge ou absence de condamnation pour tous les membres de la famille regroupée.

  • Renforcer le niveau de maîtrise de la langue française à justifier (niveau A1 minimum, soit le premier niveau « élémentaire et introductif » du CECRL).

Modèle danois : Dans les 9 premiers mois de résidence, le conjoint rapproché doit valider deux tests de langue danoise (niveau A1 et A2 - débutant TOIEC). À la validation de chaque test, le conjoint récupère 3 000 € de la « garantie financière » de 14 000 € qu’il a dû déposer à la municipalité (afin de compenser pour les finances publiques, les hypothétiques demandes d’assistance sociale à venir). Cette garantie est rendue dans le cadre de l’obtention d’un permis de résidence permanente ou après 10 ans de résidence.

Restreindre l’accès au système de protection sociale :

  • Établir le principe que la perception des revenus sociaux impacte négativement la validité du permis de séjour, et ce, jusqu’à 5 ans après sa délivrance (modèle hollandais).

  • Durcir les droits d’accès à toutes les prestations non contributives et déterminer un « seuil » de durée de résidence :

=> Condition de 5 ans de résidence pour les personnes en situation régulière qui travaillent (modèle britannique qui restreint l’accès aux prestations du « fonds public » pendant les 5 premières années, même pour les membres d’une famille regroupée et notamment pour les aides au logement).

=> Condition de 7 ans de résidence (partiellement inspiré du modèle danois) pour les personnes en situation régulière qui ne travaillent pas.

Cas spécifique :

RSAAvant le versement, critère de résidence continue caduque si plus de 2 mois/an hors du territoire (modèle danois) et ensuite, suspension des versements si séjour à l’étranger du bénéficiaire de plus de 4 semaines (modèle allemand).
APA (allocation d’autonomie)En cas de refus d’application des mesures de durcissement par des départements (principe de faveur), l’État devra retirer sa garantie financière pour cette prestation, ainsi que retirer le financement 
de ces surdépenses à l’éligibilité à tout mécanisme de péréquation.
Minimum vieillesseAugmenter la condition de résidence continue à justifier (10 ans actuellement) et fixer un seuil d’âge (20 ans de résidence après l’âge de 40 ans – modèle chypre).
AME (ou sa version réformée à venir)Conditionner le droit d’accès au service de santé à un critère de résidence via l’inscription à un registre communal, soit à une adresse (modèle danois du Folkeregistret). Ainsi, les personnes non enregistrées 
ont un accès limité aux services de santé publique reposant sur une évaluation médicale du patient menée par les services de santé. Arrêt de la prise en charge médicale des individus frappés d’une OQTF.
  • Concevoir une attribution progressive des droits sociaux : pour ne pas fausser le marché du travail, l’employeur payerait les prélèvements de droit commun (chômage, vieillesse, maladie, etc.). Le salarié bénéficierait de l’Assurance maladie-invalidité pendant son séjour en France. Il ne toucherait en revanche ni indemnités de chômage ni pension de retraite. Les cotisations correspondantes employeur et salarié seraient capitalisées sur un compte individuel et remises au salarié à son départ de France en forme de pécule. Si en revanche l’étranger change de statut et bénéficie d’un séjour définitif en France, pour quelque raison que ce soit, son pécule est transféré aux Urssaf et il intègre le droit commun de la protection sociale.

Il convient cependant de souligner que l’accès aux non-nationaux au système de protection sociale français n’est pas spécifiquement plus ouvert qu’ailleurs en Europe mais que notre pays se caractérise par un système social plus généreux et ce, de façon générale et une immigration plus éloignée de l’emploi. Dans les pays où le système de protection sociale couvre moins de situations et où l’installation légale des étrangers est fortement corrélée à un travail ou à des revenus suffisants, il n’y a pas de restriction particulière à mettre en place. Ainsi, dans le cadre du RSA, la durée de résidence avant l’ouverture des droits est déjà de 5 ans en France contre 1 an au Portugal ou 3 mois aux Pays-Bas.

Pour la Fondation IFRAP, l’allongement des durées de résidence et le durcissement des conditions d’ouverture avant l’accès à certaines prestations n’offrent qu’une réponse partielle à cette problématique spécifique du modèle français. Pour la résoudre complètement, il conviendrait de mener un véritable audit de notre système de protection sociale, la centaine de prestations qu’il propose afin d’en recalibrer les contours.

Enfin, gérer les situations d’urgences

Viser le respect de toutes les OQTF et gérer le stock de clandestins présent sur le territoire :

  • Retour progressif au pouvoir discrétionnaire du ministre de l’Intérieur en matière de police des étrangers. Cela signifie que les décisions concernant l’entrée et le séjour ne seraient plus ab initio soumises au contrôle du juge. Elles seraient immédiatement applicables. Et en cas de recours, celui-ci ne serait pas suspensif, comme avant 1971 (arrêt Croissant du Conseil d’État).

  • Faire un audit des plus de 1 350 associations bénéficiant des 900 millions de crédits de la mission « immigration, asile et intégration » avec deux objectifs : déplacer ces missions à des organismes publics dans le cadre des missions régaliennes de l’État et/ou instaurer un contrôle de leurs actions régulier et en plus, rééquilibrer la répartition des crédits « immigration, asile et intégration » de l’État qui ne peuvent plus être accordés, à près de 50%, aux associations.

  • Viser a minima un budget de 400 millions d’euros pour notre politique d’éloignement, et ce, dès 2024 avec l’objectif de faire respecter 150 000 OQTF annuellement (rythme allemand).

  • Tenir des statistiques sur le stock d’illégaux, selon des méthodes diverses et par plusieurs organismes indépendants et les publier tous les ans (modèle britannique).

Renforcer la politique en faveur de mineurs étrangers isolés :

  • Rendre obligatoire la prise d’empreinte des mineurs par les services de sécurité intérieure. Sanctionner les refus en créant une « peine plancher » pour refus d’obtempérer afin de lier en la matière la compétence du JLD.

  • Partager les fichiers « police/gendarmerie » avec l’administration pénitentiaire dans les deux sens (ce qui raccourcira les saisies de données).

  • Stabiliser la situation des MNA incarcérés et les inscrire dans un parcours de réinsertion et/ou développer en coopération des capacités carcérales ad hoc dans les pays d’origine où ils pourront purger leurs peines, sous contrôle français.

  • Créer un permis de travail pour les mineurs non accompagnés de plus de 16 ans et faciliter le renouvellement de leurs permis de résidences à la majorité (modèle espagnol).

  • Renforcer les effets de levier des sanctions envers les départements refusant le déploiement du dispositif AEM d’évaluation de minorité.

  • Consolider les remontées statistiques entre les départements, le ministère des Solidarités et de la Santé et celui de la Justice afin d’avoir une vision fiabilisée et consolidée du phénomène des MNA.


  1. OCDE, les indicateurs de l'intégration des immigrés 2023, juin 2023.
  2. Sources : Insee / La croix pour l’Ukraine.
  3. Insee, L'essentiel sur... les immigrés et les étrangers. Juillet 2023.
  4. Statistique Canada. De la recherche aux connaissances : l'immigration comme source de main-d'oeuvre. Juin 2022.
  5. Insee. L'insertion des immigrés, de l'arrivée en France au premier emploi. Novembre 2018.
  6. mes-allocs.fr
  7. Imiscoe Research Series. Migration and Social Protection in Europe and Beyond (Volume 1). Jean-Michel Lafleur, Dniala Vintila. 2020.