Les évolutions politico-stratégiques de la décennie 2010 à nos jours doivent impérieusement nous faire reconsidérer la place et surtout les moyens que nous accordons à notre outil militaire. Depuis 2014-2015 et les débuts d’un conflit en Ukraine, de nombreux spécialistes ont alerté sur la faiblesse structurelle de nos armées au regard des enjeux sécuritaires auxquels la Nation pourrait avoir à faire face
Au-delà de l’engagement des armées pour la protection du territoire national, des déploiements de souveraineté, des opérations de maintien de la paix ou encore de l’assistance aux populations en cas de crise climatique ou sanitaire, le fait le plus marquant est certainement le retour de la possibilité de conflits interétatiques d’ampleur dans lesquels nous pourrions être impliqués. Même si cette probabilité demeure ténue pour le moment, les conséquences directes ou indirectes sur nos intérêts vitaux pourraient être tels que ce scénario ne saurait plus être ignoré.
Notre outil militaire est aujourd’hui à la croisée des chemins. Après une période de contraction nette des budgets, du format des forces et des équipements, celui-ci regagne progressivement en capacité depuis que les moyens financiers alloués dans la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 respectèrent une tendance généralement haussière. Demeurant dimensionnées pour des interventions extérieures tout en conservant une véritable capacité de sanctuarisation du territoire national grâce à la dissuasion nucléaire, nos forces disposent cependant de capacités parcellaires. Nous manquons largement de muscles pour peser durablement dans un conflit par volonté politique propre.
Avec l’invasion de l’Ukraine débutée en février 2022, ce débat sur nos capacités militaires est plus que jamais d’actualité. Cette crise montre, s’il en était encore besoin, que des paroles diplomatiques énergiques ne pèsent pas grand-chose si des capacités militaires solides ne sont pas là pour les soutenir et les crédibiliser. Elle montre aussi qu’une crise majeure peut survenir bien avant ce que prévoient les scénarios classiques n’avaient pu anticiper. Nos armées doivent redevenir rapidement un rempart crédible contre les scénarios de crises qui menacent à l’horizon 2030-2040, peut-être même avant. La Fondation iFRAP propose un nouveau dimensionnement des forces armées à cet horizon avec un objectif de 3 % du PIB en 2035 et précise les efforts programmatiques, capacitaires et budgétaires associés.