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Mauvaises nouvelles pour les retraites complémentaires Agirc-Arrco

La loi sur la réforme des retraites vient à peine d'être publiée au JO (la loi a été officiellement publiée le 21 janvier 2014), et déjà les partenaires sociaux doivent se retrouver pour négocier l'avenir des retraites. C'est peu dire que la dernière réforme n'a rien réglé, au contraire, les différences se creusent entre le public et le privé.

La loi « garantissant l'avenir et la justice du système de retraites » est parue au Journal Officiel du 21 janvier 2014. Mais le 7 mars, soit moins de deux mois après, on apprend que les retraites complémentaires ne seront pas revalorisées en 2014. En principe, au 1er avril la valeur du point Arrco et Agirc, à partir desquels sont calculées les retraites de 16 millions de Français, sont réévaluées du montant de l'inflation. Mais la crise et le vieillissement démographique avaient obligé l'année dernière les partenaires sociaux (sauf la CGT) à signer en mars un accord préconisant de réévaluer la valeur du point de l'inflation - 1 point en 2014 et 2015 pour résorber les déficits constatés de 1 milliard d'euros pour l'Arrco et de 1,6 milliard d'euros pour l'Agirc.

Sauf que… en plus de cette désindexation, un correctif aurait dû être appliqué le 1er avril prochain en raison de la surévaluation de l'inflation pour 2013. En effet, la valeur du point avait était majorée de 1,75% conformément à la prévision du PLFSS, alors que l'inflation n'a été finalement que de 0,74%.

Résultat, les retraites versées auraient dû être ajustées de -1.01% + 0,3% [1], soit une baisse en valeur absolue, une option que l'accord de mars dernier avait exclue. Mais le problème reste entier et les corrections risquent de s'appliquer au-delà de 2014 et de 2015.

Les caisses Arrco et Agirc envisagent donc de nouvelles mesures d'économies pour redresser la barre : au programme, réduction des frais de gestion, simplification des structures et éventuelle refonte des critères de réversion.

Sur les deux premiers points, ce sont des pistes que nous avons appelées de nos vœux depuis notre étude parue en 2009 sur la fusion des caisses de retraites complémentaires. Nous avions chiffré alors à 1 milliard d'euros les économies qui pouvaient être faites sur les coûts de gestion.

L'autre piste vers laquelle les partenaires sociaux pourraient être contraints de s'orienter c'est de durcir les conditions de la réversion. Le site toutsurlaretraite.com indique les conséquences d'un possible alignement vers le bas :

Ainsi, les pensions de réversion de l'Arrco pourraient être octroyées aux conjoints survivants à partir de 60 ans comme à l'Agirc et non à 55 ans comme aujourd'hui. Le niveau de réversion qui représente actuellement 60% de la pension du défunt à l'Agirc et à l'Arrco pourrait être abaissé à 54% à l'image du régime général. En revanche, il ne serait pas question d'instaurer des conditions de ressources comme dans le régime général. Toutefois, une « proratisation » de la réversion en fonction de la durée de mariage pourrait être mise en place à l'Agirc et à l'Arrco. Aujourd'hui, le veuf ou la veuve perçoit 100% de la pension complémentaire de réversion qu'il ou elle ait été marié(e) 5 ou 20 ans avec le défunt(e). Un pourcentage pourrait être appliqué en fonction du nombre d'années de mariage sachant que la réversion n'est pas autorisée en cas de Pacs ou de concubinage.

Pendant ce temps au Quai d'Orsay…

La presse anglaise (le Daily Telegraph) a révélé que l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin avait bénéficié d'un dispositif de fin de carrière réservé aux hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères représentant une année de traitement « majoré(e) du montant de l'indemnité de résidence à Paris » (décret du 8 juin 2011), indemnité pouvant être réduite en cas d'activité du bénéficiaire. Le décret mentionne que le nombre d'agents susceptibles d'être admis au bénéfice du dispositif est fixé à trente. La Fondation iFRAP s'est penchée sur la question et effectivement, c'est possible. L'ancien Premier ministre a pu bénéficier d'une mesure mise en place en 2007 pour faire sortir les ministres plénipotentiaires et les conseillers des Affaires étrangères hors classe âgés entre 58 ans et 62 ans en leur versant en une seule fois l'équivalent de la moitié de 6 ans de primes (prime de rendement (environ 1.900 euros par trimestre), indemnité forfaitaire pour travaux (1.887 euros par mois environ), indemnité de fonction et de résultat (environ 300 euros par mois) soit 33.844 euros x 6 = 203.064 / 2 = 101.532 euros)

Si les mesures évoquées plus haut sont mises en place il faut absolument dire que les inégalités entre retraites publiques et retraites privées vont s'aggraver : en effet, aux différences concernant la réversion (sous plafond de ressources pour la CNAV), s'ajoutent les majorations pour 3 enfants (plafonnement pour la CNAV, plafonnement pour les complémentaires), et les règles de réévaluation (gel pour les complémentaires, tandis que les retraites de la fonction publique sont indexées sur l'inflation [2]). Alors que les dépenses de pension dans la fonction publique, connaissent une forte accélération à la fois sous l'effet de l'augmentation du nombre de retraités et du montant de la pension moyenne, aucune mesure ne semble envisagée pour en contenir l'évolution. Ces dépenses sont même sanctuarisées puisque les efforts d'économies du gouvernement sont toujours mentionnés "hors CAS pensions" c'est-à-dire hors pensions de retraite.

Source : Jaune Rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique 2014

Au final, on ne pourra plus continuer à affirmer comme on l'a entendu jusqu'à présent, et notamment à l'occasion de la dernière réforme des retraites, que malgré des règles différentes, les taux de remplacement sont identiques entre fonctionnaires et salariés du privé.

[1] Puisque l'inflation prévue pour 2014 est de 1,3% ; la revalorisation est donc de l'inflation - 1% = 0,3%

[2] attention : comme pour la CNAV les retraites de la fonction publique vont faire l'objet d'un report d'indexation d'avril à octobre