tarifs sociaux de gaz et d'électricité
A la suite des questions posées par Eva Joly et d'autres responsables politiques au gouvernement sur le retard mis à la publication des tarifs sociaux pour le gaz et l'électricité, RFI (Radio France International) a demandé son point de vue à la Fondation iFRAP, le 3 février 2012.
Note cadre correspondant à cette entretien :
Question Radio France International : Le décret mettant en place un tarif social pour l'électricité n'a pas encore été pris alors que la loi a été votée il y a plusieurs mois. Qu'en pensez-vous, dans cette période de grand froid ?
Comme indiqué dans nos Propositions 2012 , la Fondation iFRAP est défavorable à la multiplication des tarifs sociaux (loyers, cantines, crèches, électricité, gaz, mazout, internet, téléphone fixe et portable, trains et transports urbains, entrée dans les musées, cinémas, spectacles, etc.) La Fondation propose au contraire le versement par la collectivité d'une seule allocation sociale fixée en fonction des situations des personnes (ou d'un nombre très réduit d'allocations).
Une exception à cette règle : la couverture de risques dont les coûts sont imprévisibles et considérables, comme la santé qui doit pouvoir être prise en charge à part par la collectivité, sans limite si besoin.
Pourquoi ?
1. Ces multiples allocations sont humiliantes et infantilisantes. Le message transmis par ces multiples allocations c'est : « Vous êtes incapables de gérer un budget. Nous, on sait ce qui est bon pour vous et on va choisir ce à quoi vous devez dépenser votre argent ». Une position valable pour des personnes « incapables » mais pas pour la masse des personnes qui sont simplement « pauvres ». De plus, le risque est de voir ces allocataires traités d'abord comme des « pauvres » par leurs nombreux différents fournisseurs, et non plus comme des consommateurs ordinaires, une situation très dévalorisante pour les intéressés. Une fois leur allocation unique reçue, c'est aux personnes elles-mêmes de faire des choix entre leurs différents besoins.
2. Comme on le voit avec le retard concernant les tarifs sociaux pour le gaz et l'électricité, toutes ces allocations sont très difficiles et très coûteuses à distribuer et ne sont pas facilement ciblées. Elles sont donc sources de fraudes.
3. La multiplicité de ces allocations autorise, nécessite même, l'intrusion d'un nombre considérable d'organismes et d'entreprises publiques et privées dans la vie privée de millions de personnes (situation familiale, employeur, chômage, niveau des revenus, état de santé, passé, attitudes, etc.) Le cas des fichiers de Paris Habitat, dénoncés hier, est typique : des données très personnelles étaient accessibles à un grand nombre d'employés.
Faudra-t-il bientôt que les personnes pauvres dévoilent tous ces renseignements au boulanger ou à l'épicier de leur quartier ?