Faut-il vendre 10 % des participations de l'État ?
Après le tollé suscité par la proposition, formulée par trois élus Renaissance, de céder des participations de l'État pour réduire la dette, la présidente de lIiFRAP a fait les comptes : selon Agnès Verdier-Molinié , cette mesure permettrait effectivement de diminuer la dette !
Cette tribune a été publiée dans les pages du JDD le vendredi 25 octobre 2024. |
La proposition de céder des participations par trois élus Renaissance fait grand bruit. Tout le monde est d'accord pour faire baisser la dette mais, dès qu'il y a une proposition concrète pour faire baisser les dépenses, c'est un véritable pugilat qui se déclenche... L'État détient 180 milliards de participation dans le champ de l'Agence des participations de l'État dans des entreprises et on ne pourrait pas en céder 10 % ? Ce serait brader les bijoux de famille ? Ce serait contraire à l'idée de faire baisser le déficit car cela ferait baisser les dividendes que touche l'État... Tous ceux qui critiquent cette proposition ont fortuitement oublié que les entreprises dans lesquelles l'État a des participations nous coûtent cher aussi, qu'il faut parfois les recapitaliser, qu'elles sont aussi endettées (reprise de la dette de SNCF Réseau pour 2,1 milliards d'euros et 0,9 milliard de charges d'intérêt, 9,7 milliards pour la nationalisation d'EDF , dette d'ADP consolidée dans la dette publique pour 8,57 milliards d'euros...), que cela compte dans notre dette publique. Rien que les interventions post-covid ont représenté plus de 18 milliards d'euros. Les bijoux de famille sont-ils tant que cela des « bijoux » ?
Un levier qu'il faudra utiliser
Dans le rayon des critiques, il est tout à fait vrai que céder des participations de l'État ne baissera pas le déficit public annuel mais bien uniquement la dette totale. Mais, si l'on se montre honnête sur le sujet du redressement de nos comptes publics, la cession de participations de l'État dans des entreprises est un levier qu'il faudra absolument utiliser pour alléger notre dette par rapport à la richesse nationale et atténuer un peu le poids annuel de la charge de la dette qui risque de devenir insoutenable dans les prochaines années. Ces opérations pourraient même atténuer l'augmentation de la dette publique liée à l'effet récessif sur la croissance du PIB en début d'ajustement, surtout si celui-ci est bien de 60 milliards d'euros.
Même en vendant des parts, l'État peut garder une minorité de blocage ou même une super action.
Avec 290 milliards de participations au total, l'État français possède beaucoup plus de participations cotées et non cotées que nos grands voisins européens (OCDE). La France peut tout à fait céder 10 % des participations de l'État sans pour autant que l'État perde son influence. Est-ce que l'État a besoin de détenir 100 % de la RATP, de la Monnaie de Paris, de France Télévisions ou de Radio France ? La réponse est non ! Même en vendant des parts, l'État peut garder une minorité de blocage ou même une super action pour conserver un droit de veto sur l'ensemble du capital, ce que l'on nomme une « golden share ».
Faire baisser la dette de 26 milliards
La Fondation IFRAP a fait les comptes : vendre 50 % de nos participations à la RATP, 50 % de France Télévisions, 50 % de Radio France, 50 % de la Monnaie de Paris et 15 % de la Française des jeux, 15 % de La Poste , permettrait, entre autres cessions, de réaliser 19 milliards de cessions et de supprimer 7 milliards de dette publique inhérents à ces entreprises... et donc de faire baisser la dette de 26 milliards si on utilise les 19 milliards de cessions en sus pour désendetter.
Certes, l'État reçoit environ 4 milliards par an de dividendes mais la moitié de ces milliards proviennent des dividendes versés par la Banque de France. Au sein des 2 milliards restants, si l'on fait ces 10 % de cessions de participations, l'impact en moindres dividendes serait seulement de 374 millions d'euros. Pour 26 milliards de dette en moins, cela se regarde et on comprend que le ministre des Comptes publics soit ouvert sur le sujet