Evaluation des programmes économiques de François Fillon, Benoit Hamon, Marine Le Pen, Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon
Qui baissera les dépenses ? Et les impôts ? Qui fera reculer le plus le chômage ? Qui atteindra le meilleur taux de croissance ? Grâce à un modèle économétrique universitaire, Nemesis, la Fondation iFRAP a évalué les programmes des candidats de l'élection présidentielle dont nous avons pu détailler les programmes, programmes que vous pouvez retrouvez sur notre comparateur des programmes.
Le graphique ci-dessous, parfois appelé « carré magique », permet d’apprécier les conséquences des programmes économiques des 5 candidats, analysés à l’aune de quatre indicateurs économiques qui reflètent quatre objectifs de la politique économique : la croissance, la compétitivité, l’équilibre des finances publiques, l’emploi. Les quatre indicateurs retenus sont l’amélioration du solde commercial (pour la compétitivité), le taux de croissance annuel moyen sur la période, le taux de chômage (sa baisse indiquant une politique efficace en termes d’emploi) et le poids de la dette publique (pour apprécier le retour à l’équilibre des finances publiques) à horizon 2022, puis 2027. L’ampleur de la surface formée par le quadrilatère permet d’apprécier l’efficacité du programme préconisé à l’aune des quatre indicateurs retenus.
Comme le montrent les graphiques suivants sur les dépenses publiques, les prélèvements obligatoires et le solde des administrations publiques en points de PIB, l’ajustement budgétaire n’est pas réalisé de la même manière par tous les candidats, même ceux qui parviennent à contenir la dette publique. François Fillon, et dans une moindre mesure Emmanuel Macron, procèdent à des économies de dépenses nettes qui font diminuer le poids des dépenses publiques dans le PIB (celui-ci atteint 51,3% en 2022 pour François Fillon et 53,5% pour Emmanuel Macron contre 53,9% dans le scénario de référence). Benoit Hamon laisse les dépenses publiques stables au niveau élevé qu’elles ont atteint ces dernières années (autour de 56%). Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont des programmes bâtis autour de nombreuses dépenses supplémentaires et interventions accrues du domaine public, aboutissant à une hausse extrêmement forte du poids des dépenses publiques qui atteindrait 61,7% en 2022 avec le programme de Marine Le Pen et 62,5% dans celui de Jean-Luc Mélenchon.
Un point sur le scénario de référence : Il s'agit d'une prospective d’évolution de l’économie française, comme si les administrations continuaient à tourner toutes seules sans changement majeur de trajectoire. Ce scénario a été bâti à partir des projections de Bercy pour la période 2017-2019, puis à un peu plus long terme. |
En 2022, le taux de chômage est ainsi de 8,6% avec le programme de François Fillon, 9,2% avec celui de Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron, 9,4% avec celui de Benoît Hamon, 11,7% avec celui de Marine Le Pen (contre 9% dans le scénario de référence).
Comme le montre le graphique ci-dessus sur l’évolution de l’emploi marchand, la stratégie médiane choisie par Emmanuel Macron de faibles économies de dépenses, mais également de faible baisse des prélèvements obligatoires, apparaît peu favorable à la création d’emplois marchands (537.000 emplois marchands créés sur la période soit 72.000 de moins que dans la trajectoire de référence qui crée 608.000 emplois sur la période). La stratégie tournée vers l’amélioration de la compétitivité des entreprises choisie par François Fillon est celle qui permet la création du plus grand nombre d’emplois marchands sur la période (717.000 emplois marchands créés sur la période avec le programme de François Fillon soit 109.000 de plus que dans le scénario de référence). Les stratégies de hausse des dépenses publiques pour stimuler la croissance (Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen), dont on a vu précédemment les incidences sur les prix et la compétitivité, sont finalement décevantes en matière de création d’emplois marchands (chez Marine Le Pen, la sortie de l’euro en 2019 renforce les effets négatifs sur l’emploi). Sur la période, la stratégie de Benoît Hamon permet la création de 487.000 emplois marchands (121.000 de moins que dans le scénario de référence), celle de Jean-Luc Mélenchon 531.000 (78.000 de moins que dans le scénario de référence) quand celle de Marine Le Pen en détruirait 227.000 (soit 835.000 emplois marchands de moins que dans le compte de référence).
François Fillon, et dans une moindre mesure Emmanuel Macron, procèdent à des économies de dépenses nettes qui font diminuer le poids des dépenses publiques dans le PIB (celui-ci atteint 51,3% en 2022 pour François Fillon et 53,5% pour Emmanuel Macron contre 53,9% dans le scénario de référence). Benoit Hamon laisse les dépenses publiques stables au niveau élevé qu’elles ont atteint ces dernières années (autour de 56%). Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ont des programmes bâtis autour de nombreuses dépenses supplémentaires et interventions accrues du domaine public, aboutissant à une hausse extrêmement forte du poids des dépenses publiques qui atteindrait 61,7% en 2022 avec le programme de Marine Le Pen et 62,5% avec celui de Jean-Luc Mélenchon.
Le seul candidat à opter résolument pour une stratégie de baisse des prélèvements obligatoires (stratégie d’un « contre-choc fiscal ») est François Fillon. Les baisses massives de prélèvements obligatoires qu’il engage dès le début du quinquennat entrainent le poids des prélèvements obligatoires 0,7 point en-dessous de son niveau du compte de référence (43,8% en 2022 avec le programme Fillon contre 44,5% dans le scénario de référence). Les programmes d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen ne font que légèrement fluctuer le taux des prélèvements obligatoires autour de son niveau du compte de référence. Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon ont choisi de financer une partie de leur surcroît de dépenses publiques par un accroissement sensible des prélèvements obligatoires. En 2022, le taux des prélèvements obligatoires atteint 46,5% avec le programme de Jean-Luc Mélenchon et 45,4% avec celui de Benoît Hamon, soit respectivement 2 et 0,9 points au-dessus du niveau du compte de référence.
L’évolution du solde des administrations publiques a des conséquences sur l’alourdissement de la dette. Le poids de la dette atteint respectivement 116,5% et 114,7% du PIB en 2022 avec la mise en place des programmes de Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen. Une partie de cette envolée du poids de l’endettement public, et des déficits publics, provient de l’augmentation des taux d’intérêt sur les emprunts d’Etat, conséquence de l’affolement des marchés financiers devant les stratégies de dérapage budgétaire clairement assumées par ces candidats (chez Marine Le Pen, la hausse des taux d’intérêt est encore plus forte du fait des craintes puis des conséquences de la sortie de l’euro).
Malgré le niveau élevé de la dette publique et le solde public encore largement déficitaire, neuf ans après la crise économique et financière, plusieurs candidats font le pari d’un dérapage budgétaire qui, à leurs yeux, permettrait le retour de la croissance (Mélenchon, Hamon, Le Pen et… même Macron la première année). La plupart de ces candidats condamnent la politique d’austérité prétendument menée depuis plusieurs années et comptent sur le supplément de croissance et d’inflation pour rendre moins prégnant le problème de la dette publique. C’est un peu vite oublier que la France souffre également d’un problème de compétitivité…
La stimulation artificielle de la croissance et du pouvoir d’achat des ménages, par de nouvelles hausses de dépenses publiques, entraine une hausse des importations. Le surcroît d’inflation qui apparaît suite à la mise en œuvre de ces stratégies, pèse sur la compétitivité et ralentit les exportations. Le solde commercial se détériore rapidement et ces stratégies s’avèrent finalement perdantes. Dans l’économie ouverte et globalisée qui est désormais la nôtre, la nécessité de compétitivité est essentielle et l’oublier, c’est s’exposer rapidement à une première force de rappel : la détérioration du solde de la balance commerciale.